Homélie de la fête de la Présentation du Seigneur

4 février 2014

Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon. C’était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d’Israël, et l’Esprit Saint était sur lui. L’Esprit lui avait révélé qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Messie du Seigneur.

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Texte de l’homélie :

« Et soudain viendra dans son Temple, le Seigneur que vous cherchez. »

Bien chers Frères et sœurs,

La Présentation de Jésus au Temple à laquelle est associée la purification de Marie fut, très tôt, l’objet d’une fête particulière avec procession de cierges rappelant, entre autres, notre consécration baptismale.
Ensemble, redécouvrons la richesse de cet événement pour nous, chrétiens, appelés à suivre Jésus « Lumière du monde ».

Une démarche humble et obéissante

Quel contraste entre ce charpentier, sa jeune femme et leur bébé, venus d’un village perdu de Galilée, et ce lieu grandiose du Temple de Jérusalem tout rutilant de dorures et de marbre !
Que venaient donc faire Joseph et Marie ? Présenter au Seigneur leur premier-né, offrant en sacrifice deux petites colombes, parce qu’il leur était impossible de payer un agneau, selon les prescriptions du Lévitique (Chapitre XII, v8).
Rien d’extraordinaire, finalement ! Après l’inouïe de Noël, cette humble famille ne fait qu’obéir aux pratiques de leur religion et suivre leur vie ordinaire de parents dans l’acceptation des contraintes banales de l’existence et les servitudes sans gloire de notre condition humaine.

Mais, Marie et Joseph ne sont pas seuls à se rendre au Temple.

La présence de deux vieillards

Après la visite des bergers, quarante jours plus tard, Syméon et Anne prennent le relais. À la différence toutefois que ce n’est plus dans une campagne perdue qu’ils témoignent, mais au cœur de la Ville Sainte de Jérusalem, dans le Temple, lieu par excellence de l’indicible Présence divine. Comme les bergers avant eux, ils se sont laissé guider.

Un vieillard tout d’abord, ni prêtre, ni scribe, ni préposé au sanctuaire, mais qui, précise Saint Luc, n’est pas là par hasard. Homme juste et pieux, Syméon a la certitude qu’il ne mourra pas sans voir le Seigneur.
« Conduit par l’Esprit » il se rend au Temple, et, à l’étonnement de ses parents, reconnaît en ce bébé, le Messie, le Salut préparé pour tous les peuples, "Lumière des nations et Gloire d’Israël".
Un vieillard comblé : le Sauveur d’Isarël est là, dans ses bras…

De même, Anne, 84 ans, une veuve dépouillée de tout ce qui garantissait sa place dans une société où le mari a seul des droits juridiques. Loin de se replier, Anne a fait de sa vie une offrande : « servant Dieu, jour et nuit dans la prière ».
Conduite par l’Esprit, elle aussi se rend au Temple et, à la vue du bébé « proclame les louanges de Dieu et parle du petit à tous ceux qui voulaient l’entendre »…

Frères et sœurs, reprenez les titres donnés à l’enfant, à ce moment dans le Temple. Ils sont extrêmement puissants : « Messie, Salut, lumière, gloire, délivrance… » une véritable investiture du Christ « dans son Temple » !
N’est-ce pas là Celui qu’annonçait le prophète Malachie :

« Le Seigneur que vous cherchez - le retour de la gloire du Seigneur au milieu de son peuple. » (3,1-4).

Un signe de contradiction

Cependant, cette investiture, n’est pas sans perspectives déroutantes pour ce jeune couple dont le vieillard annonce que l’enfant provoquera la division et blessera profondément le cœur de sa mère. Et combien Syméon dit vrai… car nous le savons, une offrande quelle qu’elle soit ne peut aller sans sacrifice, un amour authentique ne peut être sans blessure douloureuse…
Quelques mots, et tout est dit de la mission de ce bébé - non seulement - mais aussi de la liberté de l’homme à accueillir ou refuser d’être « sauvé ».

Il faudra donc se décider, certains seront pour, le plus grand nombre sera contre. Triste réalité de l’homme préférant les ténèbres plus que la lumière, l’esclavage plus que la libération, la chute plus que le relèvement, la perte plus que le salut. En deux mots : la mort plutôt que la vie.
2000 ans après, en ce 2 février, nous en savons quelque chose de cette triste « culture de mort » que beaucoup dénoncent encore en descendant dans les rues de nos capitales…

Le sens de cette présentation

Il est évident que Jésus bébé n’avait pas besoin d’être présenté au Temple. C’est en contemplant l’humilité et l’obéissance de Marie et de Joseph que médite le 4e mystère du Rosaire, que nous pouvons le comprendre. Mystère de Jésus vrai Dieu et vrai homme…

Mystère de Celui qui s’est dépouillé sans se réserver un seul privilège, comme nous le rappelle la lettre aux Hébreux :

« Unique grand prêtre miséricordieux et fidèle… » (Hb 2,17)

Ainsi se réalisait, par anticipation, la Nouvelle Alliance que le Christ scellera 30 ans plus tard dans le sacrifice de la croix.

Mais aussi, Frères et sœurs, on ne peut évoquer le sens de cet événement, sans parler de l’Église, ce Temple nouveau dans lequel Jésus continue de vivre au milieu de nous, Temple à travers lequel, Il ne cesse de nous parler et de nous donner la Vie, non d’une manière abstraite et générale, mais de façon tellement unique et personnelle, comme dans chaque sacrement dont celui de l’Eucharistie, par lequel Il va à la rencontre de chacun.

Que signifiait donc ce cierge que nous tenions entre nos mains lors de la procession d’entrée, sinon justement l’accueil de Jésus Lumière des Nations venant à notre rencontre dans le Temple de son Corps qu’est l’Église, et le rayonnement en nous de cette lumière qu’il nous envoie transmettre au monde qui nous entoure ?

En conclusion :

Premièrement : Ce mystère de Salut requiert de notre part une réponse consciente et libre ; c’est le sens du « Amen » que nous retrouvons dans nos liturgies, comme cet « Amen » qui devrait éclater avec puissance après la doxologie conclusive de la grande prière eucharistique de la messe.
Et pour dire cet « Amen », pour accueillir en nous ce cadeau du « Salut », bien sûr, Dieu n’attend pas de nous la perfection, sinon nous n’aurions pas besoin de Son cadeau ; mais parce qu’Il nous sait fragiles et pécheurs, Dieu nous donne aussi - par son Église - le sacrement de la Réconciliation qui nous permet de L’accueillir un peu mieux chaque jour.
Comme nous avons du mal à croire en la Miséricorde de Dieu ! Comme nous avons du mal à croire que nous sommes ses enfants bien-aimés !

Deuxièmement : Comme au jour de notre baptême, puis de notre profession de foi, un cierge nous a été remis ! Que faisons-nous de cette lumière ? Et qu’en ferons-nous demain ?
À notre mort, nos proches allumeront encore un cierge, signe de cette lumière, qui, depuis l’aube de notre vie, nous aura guidés (espérons-le) tout au long de nos jours !
Cette lumière que nous avons reçue, c’est le Christ appelé à briller au-dedans comme au-dehors.
Et dans notre vie quotidienne, frères & sœurs, comment transmettre cette « Lumière » ?
Simplement, par le témoignage d’une vie chrétienne fidèle, par une parole qui soutient, un regard qui relève, par des actes inspirés de foi et d’amour.
Mais encore, en s’arrachant à l’indolence sommeillante d’une vie chrétienne fade, sans caractère, en tenant sa lampe allumée et ardente dans la communauté chrétienne.
Mais aussi, en n’ayant pas peur d’être signe de contradiction dans le monde, en osant s’impliquer dans la société et servir la vie de nos frères lorsque celle-ci est menacée de sa conception à sa fin naturelle. On pourrait encore en ajouter à cette liste …

N’oublions pas que Celui qui s’est révélé « Lumière du monde » (Jn 9, 5) nous dit aussi :

« Vous êtes la lumière du monde ! » (Mt 5, 14)

Oui, frères et sœurs, cette Lumière, nous l’avons reçue en plénitude en nous, pour nous et pour le monde, et ce n’est pas choquant ni prétentieux de le dire, simplement, c’est marcher vers le Père avec le Fils dans l’Esprit en entraînant avec nous nos contemporains.
Le problème, c’est peut-être que, trop souvent, tout ceci résonne en nous comme un langage beau et symbolique et que nous n’y croyons pas vraiment ou du moins pas assez.
Sans doutes sommes-nous encore trop riches, trop riches de nos connaissances, de nos titres, trop riches de nous-mêmes…

Finalement, aujourd’hui encore, qu’est-il demandé à chacun sinon d’être pauvre pour se laisser conduire par la main, comme Syméon et Anne, et avec eux, montrer au monde Le Christ : unique Seigneur, Médiateur et Sauveur.

Voilà, Frères et sœurs, l’Évangile qu’ensemble, nous avons à vivre et transmettre … !

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre de Malachie 3,1-4.
  • Psaume 24(23),7.8.9.10.
  • Lettre aux Hébreux 2,14-18.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 2,22-40 :

Quand arriva le jour fixé par la loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus le portèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, selon ce qui est écrit dans la Loi :
’Tout premier-né de sexe masculin sera consacré au Seigneur.’
Ils venaient aussi présenter en offrande le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur : un couple de tourterelles ou deux petites colombes.

Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon. C’était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d’Israël, et l’Esprit Saint était sur lui. L’Esprit lui avait révélé qu’il ne verrait pas la mort avant d’avoir vu le Messie du Seigneur.
Poussé par l’Esprit, Syméon vint au Temple. Les parents y entraient avec l’enfant Jésus pour accomplir les rites de la Loi qui le concernaient.

Syméon prit l’enfant dans ses bras, et il bénit Dieu en disant :
« Maintenant, ô Maître, tu peux laisser ton serviteur s’en aller dans la paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples :
lumière pour éclairer les nations païennes, et gloire d’Israël ton peuple. »

Le père et la mère de l’enfant s’étonnaient de ce qu’on disait de lui.
Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère :
« Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division. Et toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée.
Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d’un grand nombre. »

Il y avait là une femme qui était prophète, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d’Aser. Demeurée veuve après sept ans de mariage, elle avait atteint l’âge de quatre-vingt-quatre ans. Elle ne s’éloignait pas du Temple, servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière.
S’approchant d’eux à ce moment, elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem.

Lorsqu’ils eurent accompli tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth.
L’enfant grandissait et se fortifiait, tout rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui.