La nullité de mariage

Depuis 1991, le P. Laurent-Marie travaille au service du Tribunal de l’Officialité
Il s’agit d’un service d’Eglise qui, au terme d’une procédure très précise, cherche à établir s’il y a eu un vrai mariage entre deux baptisés
La mission du juge est d’interroger les témoins, de recueillir les preuves, d’entendre les arguments des parties et de leurs avocats, d’évaluer le travail des experts pour ensuite rendre une décision
Il agit au sein d’un collège de trois juges dont l’un peut être un laïque
Mais encore ?


Pourquoi demander à l’Eglise de reconnaître un mariage comme nul ?

L’Église peut reconnaît la nullité d’un mariage si elle constate qu’il n’a jamais été validement conclu, s’il manquait un élément essentiel au moment du mariage :

  • si l’engagement n’était pas vraiment libre et suffisamment réfléchi ;
  • s’il y avait un manque grave de lucidité sur l’engagement de mariage ;
  • si l’un des deux souffrait, au moment du consentement, de troubles psychiques le rendant incapable d’assumer son engagement ;
  • s’il y avait, lors du mariage, un refus positif d’un des éléments essentiels qui constituent l’alliance matrimoniale, à savoir la fidélité, l’indissolubilité et la fécondité ;
  • si l’on a caché volontairement un aspect important de sa personnalité qui est de nature à troubler gravement la vie conjugale et familiale.

En fait, le tribunal ecclésiastique essaie de répondre à trois questions :

  • les époux savaient-ils à quoi ils s’engageaient ?

Se marier, c’est établir un lien, un et indissoluble, en vue de créer une communauté de vie et d’amour et en vue de la procréation et de l’éducation des enfants."

  • Le voulaient-ils vraiment ?
  • Le pouvaient-ils ?

Il faut noter enfin qu’il suffit qu’un seul des deux soient « défaillant » pour que le mariage soit reconnu nul.

Quelle est la procédure à suivre ?

  • On doit d’abord demander à l’évêché l’adresse de l’Officialité qui est le tribunal ecclésiastique.
  • L’officialité indique un avocat ecclésiastique (il ne demande pas d’honoraires).
  • Avec les conseils de celui-ci, il faut rédiger un mémoire pour expliquer les motifs de la demande de nullité.
  • Le Vicaire Judiciaire ou Official, toujours un prêtre, estime si les éléments apportés sont suffisants pour justifier l’ouverture d’une procédure.
  • L’instruction, menée par celui qu’on appelle le Juge Ponant, consiste à recueillir la déposition des époux et des témoins. On peut aussi avoir recours à des experts (psychiatres…).

Il faut bien comprendre que l’on ne juge pas des personnes, comme dans une procédure pénale, mais on cherche à établir un fait : Y a-t-il eu vrai mariage ? Voilà pourquoi la procédure et la sentence évitent soigneusement de porter des jugements moraux.

  • Une fois l’instruction close, les avocats préparent leur plaidoirie. Le lien matrimonial en tant que tel est défendu lui aussi, par un Défenseur du Lien. La procédure est écrite.
  • Le tribunal, composé de trois juges, après avoir pris soigneusement connaissance de l’ensemble des pièces du dossier (qui peut parfois comporter plusieurs centaines de pages), se réunit pour délibérer et voter. Il revient alors au juge ponant de rédiger la sentence en reprenant les arguments juridiques et en les discutant.

Lorsque le mariage est déclaré nul, le dossier passe devant un autre tribunal en deuxième instance. Ce tribunal va promulguer un décret de confirmation, s’il est convaincu du bien-fondé de la décision.
S’il n’est pas convaincu, il va interroger de nouveaux témoins et, éventuellement envoyer le dossier, en troisième instance, à Rome, au tribunal de la Rote.
Cette éventualité se présente une à deux fois par an, sur une quarantaine de cas.

Qu’est-ce qui vous motive, Père Laurent-Marie, à vous investir dans cette mission ?

Cette mission m’a beaucoup éclairé sur les raisons de l’échec d’un couple, indépendamment de la question de savoir s’il y a eu ou non mariage valide.
Des carences dans la préparation du sacrement, l’absence d’une vie de foi ordinaire (qui comporte la fréquentation des sacrements), du dialogue et du pardon expliquent en grande partie les échecs.

C’est une mission qui reste très méconnue au sein même de l’Eglise et nous devons faire face à une charge de travail de plus en plus écrasante avec de très faibles moyens. Mais il faut rappeler sans cesse à nos pasteurs qu’il n’existe dans la vie de l’Eglise que peu de décisions qui aient sur la vie des fidèles autant de conséquences.
Je désire mentionner pour finir le fait que de nombreuses tâches dans un Tribunal ecclésiastique peuvent être remplies par des laïques, hommes ou femmes.