Homélie du 4e dimanche du Temps Ordinaire

5 février 2012

« Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais fort bien qui tu es : le Saint, le Saint de Dieu. »
Jésus l’interpella vivement : « Silence ! Sors de cet homme. »

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie :

Aujourd’hui, frères et sœurs bien-aimés, j’aimerais vous parler du démon.

Ce n’est pas si fréquent que cela d’entendre une homélie sur le démon, puisque c’est rare que l’on puisse aborder ce sujet-là, on le sait bien. C’est devenu comme « politiquement incorrect », même à l’intérieur de l’Eglise ; on préfère parler du Mal, de l‘Esprit du Mal. Pourtant, il est important de redéfinir les fondamentaux concernant le démon. En ce jour, nous avons une belle occasion à travers la lecture de l’Evangile qui nous est donnée.

Jésus, le jour du Sabbat, expulse un esprit mauvais. Quelqu’un qui était sous l’emprise du démon qui en est libéré.

Le jour du Sabbat, c’est le jour ou aucune parole divine n’a été dite. Seul Dieu peut dire une parole le jour où il s’est tu. Au moment de la Création, Il parle ; comme au moment de la re-Création, au moment du Salut…

Qu’est-ce que le mal ?

Le démon est une créature ; il n’est pas Dieu

Tout d’abord, on peut se demander quel est le statut du démon : c’est une créature. Nous ne croyons pas au Dieu du Bien ou au Dieu du Mal, comme le pensaient les manichéens. Pour eux, ces deux dieux étaient à égalité et s’affrontaient. Non ; nous croyons, avec la Parole de Dieu qui nous en parle à maintes reprises, que ce soit dans le livre de la Genèse, où l’on voit bien que c’est une créature – le serpent – qui symbolise le démon, mais aussi dans le livre de Job, où c’est sous l’autorisation de Dieu, en demandant la permission de Dieu, que le démon va pouvoir toucher Job. On voit ainsi que c’est une créature qui est soumise à Dieu. Et c’est très important. Cela veut aussi dire que, dans le plan du Salut de Dieu, le mal dont le démon est à l’origine nous permet de revenir à la source, lorsqu’ il est vaincu par l’offrande de Jésus sur la Croix.
C’est ce que nous avons lu dans le petit verset de l’Alléluia :

« Béni soit le Seigneur notre Dieu, Sur ceux qui habitaient les ténèbres, il a fait resplendir sa lumière. »

Le démon est une créature ; il n’est pas Dieu. Cela veut dire qu’il n’a pas le dernier mot. Celui qui a le dernier mot, c’est le Seigneur, avec sa miséricorde, avec la force de son amour manifesté en Jésus au moment de sa crucifixion. Mais, nous croyons aussi en cette existence qui, selon l’écriture, nous est présenté comme un archange. Lucifier signifie « Celui qui porte la Lumière ». Il est le plus beau des archanges, pour ainsi dire. Celui qui avait reçu une beauté, une perfection, une grandeur. Mais, au lieu de vivre cette grandeur, comme dépendant de Dieu, comme une grâce, il l’a vécue comme un combat contre Dieu. Pour pouvoir comme s’enorgueillir des dons qu’il a reçus, et éloigner toute personne de Dieu, pour devenir lui-même le centre, et devenir la source.

C’est important de parler de ce démon, des démons, ces anges qui ont suivi Lucifer, comme la Bible nous le raconte, en particulier dans l’Apocalypse, comme ceux qui ont lutté contre Dieu ; ils l’ont vu comme une menace, et ont voulu s’ériger comme dieux eux-même.

Les démons agissent aussi dans notre réalité visible

Il faut en parler, car la plus grande victoire du démon, c’est de ne plus faire parler de lui, et nous en sommes peut-être complices parfois, pour ne pas faire peur aux enfants, par exemple …

C’est au cœur de notre foi, car Jésus est là pour mettre un point final à l’action du démon sur cette terre. On peut se demander quels sont ceux qui confessent la divinité du Christ ? quels sont les premiers à dire qui est le Christ, à le reconnaître ? ce sont les démons !. C’est donc déjà la victoire de Jésus sur le Mal lorsque l’on lit dans le passage de l’Évangile d’aujourd’hui, l’esprit mauvais qui dit :

« Je sais fort bien qui tu es : Le Saint, le Saint de Dieu ! »

Le démon croit en Dieu…

L’Esprit du Mal n’ a pas de doute sur l’existence de Dieu, sur la divinité du Christ

C’est intéressant de voir comment le démon agit dans notre vie : il agit par la tentation. Il nous présente quelque chose qui est mauvais mais sous un aspect bon. Comme un faux bonheur. « Ah ! si je possédais telle chose, qui ne m’appartient pas » ; « Tiens, si je mentais pour gagner un pouvoir ou un aura supplémentaires » . Ainsi de tout ce qui est du domaine de la luxure, des péchés capitaux, toutes ces choses qui sont à l’origine des différents péchés. Chaque fois, cela est ainsi présenté à notre imagination : « Regarde comme c’est bon ! regarde comme ce serait agréable », alors que, au fond, dès qu’on lui cède, cela nous laisse vide, avec un goût amer. Cela veut dire que nous devons être formés et informés au plan moral de ce qui est objectivement bon, de ce qui et le vrai bonheur !

Comment lutter contre le mal ?

La parole de Dieu nous remet dans la perspective du vrai bonheur

Le vrai bonheur, c’est de vivre avec Dieu dans la foi, ici bas, et dans le face à face, dans l’autre monde. Alors oui, nous avons comme un combat spirituel. Si le démon a été vaincu par la Croix du Seigneur, par l’amour victorieux de Jésus qui a obéi à son père, alors que le démon veut au contraire le faire rentrer dans la désobéissance, alors, nous aurons un combat spirituel à livrer. L’Esprit-Saint parle à notre cœur, certes, et l’Esprit-Saint est plus fort que tout, mais nous croyons aussi qu’en nous même, il y a un autre esprit, qui n’est pas l’Esprit-Saint, mais l’esprit du Mal, qui veut, lui, nous éloigner de Dieu. Force est de constater, lorsqu’on regarde la télévision, ou en ouvrant les journaux, que cet esprit du Mal est encore très actif sur notre terre.

Mais, en même temps, nous croyons qu’il est déjà vaincu. En théologie, on parle du « déjà » et du « pas encore ». C’est à dire que « déjà il est vaincu par l’amour victorieux de Jésus » mais « pas encore dans la plénitude ». « Déjà nous sommes sauvés », mais « pas encore dans le face à face ».

Il faut se remettre face à ce combat spirituel et de mettre une garde quelque part dans notre imagination et à notre esprit : à la fois se former sur ce qui set objectivement bon et objectivement mauvais pour ne pas tomber dans des pièges, et dans des séductions. Car il séduit, quelque part, en présentant quelque chose comme scintillant, alors qu’au fond, cela nous éloigne de Dieu. Plus on est formé dans la vie morale, dans la vie spirituelle, plus on est capable de lutter. Mais c’est aussi important de ne pas lui laisser la porte ouverte.

Nous sommes forcés de constater que certains sont imprudents, notamment dans tout ce qui est des pratiques occultes, que ce soit du spiritisme, même si ça peut faire rire de voir un verre qui danse et va de lettre en lettre, de parler aux esprit, faire tourner les tables, toutes ces choses dont vous avez entendu parler. Le Père Verlinde a prêché un carême à Notre-Dame de Paris il y a quelques années et a parlé de ces pratiques. Vous n’avez pas idée du notre des personnes qui préfèrent cela – cartomancie, nécromancie (faire parler les morts), l’écriture automatique, le spiritisme… - alors que l’on ne sait jamais à quel esprit on s’adresse. Et combien de personnes ont été travaillées par l’esprit mauvais, l’Esprit du Mal : je peux le dire comme prêtre car j’ai du prier pour ces personnes et les accompagner. Elles n’étaient pas possédées, mais comme infestées intérieurement, car elles ont ouvert la porte, pensant que par ces pratiques-là, elles arriveraient mieux à leur fin que par la confiance en Dieu.

Au fond, l’Evangile de ce jour nous dit : celui qui a une parole qui a autorité, dans le sens latin : faire grandir, celui donc qui nous fait grandir dans une confiance envers Dieu notre Père, c’est le Christ. Cette parole est performative, tout comme la Parole de Dieu lors de la Création. Il dit, et cela est.

« Silence ! sors de cet homme » : cette parole s’accomplit, comme au commencement de la Genèse, au commencement du Monde.

La Foi met à notre disposition des armes pour lutter contre l’Esprit du Mal

Oui, frères et sœurs bien-aimés, nous avons des armes pour lutter contre l’Esprit du Mal, contre le démon, et les anges qui l’ont suivi. Et contrairement à ceux qui sont tombés aussi bas et ont fait des pactes avec le démon, toutes les sectes sataniques - n’oubliez que c’est une réalité et que cela existe même si on en parle peu – ayons recours aux armes spirituelles qui nous sont données pour pouvoir être forts face à la tentation :

- communier régulièrement le dimanche,
- avoir régulièrement recours au sacrement de réconciliation,
- écouter la parole de Dieu,
- prier quotidiennement,

Ces armes nous permettent de nous protéger ; nous sommes comme avertis, nous avons un discernement entre ce qui peut être un faux bien, ou ce qui peut être la volonté de Dieu. Car le démon veut aussi se présenter comme volonté de Dieu. Il nous faut donc le discernement des esprits : est-ce que c’est l’esprit de Dieu, ou est-ce que c’est l’Esprit de Satan ? il est vrai que cette pratique habituelle de la vie chrétienne nous aide à ce discernement. ,

Alors, demandons au Seigneur, peut-être, de venir libérer en nous ce qui peut être une complicité avec le mal, qui parfois s’enracine dans nos blessures psychologiques, et qui fait que l’on se complait dans cette blessure, qui nous éloigne finalement de Dieu, et nous rend tristes intérieurement. Demandons au Seigneur par cette Eucharistie, par cette Communion à Son Corps et à Son Sang, parce que nous écoutons la Parole de Dieu, demandons-lui d’être libérés intérieurement de ces complicités avec l’Esprit du Mal. Certes, il est peu probable que l’on serait ici si l’on avait fait un pacte avec Satan, à priori, nous ne sommes pas dans cette dynamique-là… mais, nous avons laissé d’une manière ou d’une autre l’Esprit du Mal nous envahir, nous n’avons pas été assez fermes intérieurement, pour renoncer à quelque chose qui nous coupait de la Communion d’avec nos frères, d’avec Dieu.

Demandons dans cette Eucharistie la force pour pouvoir renoncer, et de présenter dans le sacrement de la Réconciliation ce qui a pu nous éloigner de Dieu, toutes les fois où nous avons écouté les séductions de celui qui était l’ennemi, et qui continue d’être l’ennemi du seigneur. Alors, frères et sœurs bien-aimés, oui, nous pourrons rendre grâce et bénir le Seigneur parce que, sur ceux qui habitaient les ténèbres, il a fait resplendir sa Lumière,

Amen


Références des lectures du jour :

  • Livre du Deutéronome 18,15-20.
  • Psaume 95(94),1-2.6-7ab.7d-8a.9.
  • Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 7,32-35.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 1,21-28 :

Jésus, accompagné de ses disciples, arrive à Capharnaüm.
Aussitôt, le jour du sabbat, il se rendit à la synagogue, et là, il enseignait. On était frappé par son enseignement, car il enseignait en homme qui a autorité, et non pas comme les scribes.

Or, il y avait dans leur synagogue un homme tourmenté par un esprit mauvais, qui se mit à crier :
— « Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais fort bien qui tu es : le Saint, le Saint de Dieu. »
Jésus l’interpella vivement :
— « Silence ! Sors de cet homme. »
L’esprit mauvais le secoua avec violence et sortit de lui en poussant un grand cri.

Saisis de frayeur, tous s’interrogeaient : « Qu’est-ce que cela veut dire ? Voilà un enseignement nouveau, proclamé avec autorité ! Il commande même aux esprits mauvais, et ils lui obéissent. »

Dès lors, sa renommée se répandit dans toute la région de la Galilée.