Comment vivre la mort ?

Conférence Spi&Spi - Père Pierre-Marie

Comment vivre la mort ? Cette question n’est pas si souvent abordée…
Qu’y a-t-il après la mort ? Quelle est la vision chrétienne de la mort et des morts ? Quel lien avec nous-mêmes ? avec l’Église ? Que dit notre foi chrétienne sur « l’après » de la mort.

Père Pierre-Marie

Cet enseignement est basé sur le Catéchisme pour Adultes des Évêques de France, livre ancien qui précède le Catéchisme de l’Église Catholique.
Pour accéder au texte complet, rendez-vous dans les documents à télécharger.

Texte de l’enseignement :

Pour les chrétiens, la personne qui n’est plus en vie fait encore partie de la communauté. Souvent, dans les églises de campagne, on passe par le cimetière pour entrer dans l’église.
L’Église est celle des vivants, mais ceux qui nous ont quittés restent membres de l’Église. Et ils peuvent agir sur nous, comme nous pouvons agir sur eux.
C’est la Communion des Saints : dans le Christ, dans la foi, dans la prière, je peux avoir un contact spirituel avec les défunts, je peux prier et demander la prière des défunts.

« Il y a l’épaisseur d’un papier à cigarette entre le Ciel et la Terre » disait le Père Lamy.

Nous chrétiens, croyons en la vie éternelle. Et elle est source d’espérance, d’amour, d’action. Nous prenons conscience que ce que l’on vit ici retentit dans l’éternité, particulièrement pour les actes d’amour. Il n’y a que l’amour qui rentre au Ciel. Ces actes d’amour contribuent à la manifestation de l’amour de Dieu.
En Dieu, il y a communion entre nous ici-bas et nos morts.

Perdre la notion de la vie éternelle fait que nous perdons la notion d’espérance, ainsi que la notion du « pourquoi vivre ». Et alors c’est la porte ouverte à une certaine violence, parce qu’on a besoin de sens.
Cependant, la mort reste un échec. Nous ne sommes pas faits pour la mort.
« Je veux que vous ayez la vie et la vie en abondance » nous dit Jésus. Nous avons été faits pour la vie.

Nous, chrétiens, avons un regard d’espérance. Le Christ dans sa Passion a vaincu la mort. L’amour de Jésus qui va jusqu’au bout est plus fort que le péché et que la mort. Jésus Fils de Dieu mort et ressuscité est le cœur de notre foi. La mort n’a pas le dernier mot. C’est l’amour qui a le dernier mot.

Saint Paul nous dit que des trois vertus de foi, d’espérance et de charité, la plus grande est la charité. C’est l’être de Dieu que d’être amour et communion de personne.

La Révélation comporte, en lien avec l’annonce du Christ ressuscité, le promesse de « la résurrection de la chair » et de la « vie éternelle ». Que dit-elle donc du sort de ceux et celles qui ne sont plus de ce monde et demeurent dans l’attente de l’achèvement ultime du règne de Dieu ? L’Ancien Testament, du reste, met en garde contre les pratiques d’interroger les morts. Il affirme toutefois que les morts ne sont pas anéantis. Ils subsistent de quelque manière, mystérieusement, auprès de Dieu.

Nous avons en Christ les promesses de la vie éternelle et de la résurrection de la chair .

Un seul exemple transmis par les évangiles, c’est l’exemple du Christ qui a eu ce corps glorieux. Pourquoi la résurrection de la chair ? Cela fait partie de notre Credo. Nous croyons que si l’on pense une plénitude d’amour et de joie, notre corps aussi y est associé. Saint Paul nous dit :

« Ne savez-vous pas que nos corps sont les Temples du Saint-Esprit ? »

L’Ancien Testament met en garde contre les pratiques d’entrer en contact avec les morts. On veut avoir prise sur l’au-delà en dehors de la foi, en dehors du Christ, par ses propres forces, par des techniques. Mais on ne sait pas à quel esprit on a à faire !! Il faut y renoncer. C’est dans la foi et dans la confiance et dans la miséricorde de Dieu que se vit le contact avec nos morts.

« La prière pour les morts, présente déjà dans le judaïsme, recommandée et pratiquée ensuite par l’Église, atteste qu’ils ont une certaine forme d’existence. Le Nouveau Testament a repris la symbolique juive d’un lieu où les morts attendent, mais il affirme que la mort permet une relation nouvelle avec le Christ. Ainsi "l’union de ceux qui sont encore en chemin avec leurs frères qui se sont endormis dans la paix du Christ n’est nullement interrompue" » (LG 49).

La mort permet une relation nouvelle avec le Christ. La relation que je peux avoir avec les défunts continue dans le Seigneur, dans la prière, dans la vie de foi. On peut demander la prière de ceux qui nous ont précédés, dont nous croyons qu’ils sont déjà auprès du Seigneur. Est-ce que je fais appel dans la foi de l’Église à ceux qui m’ont précédés ? Lorsque l’Église canonise, elle donne une personne en modèle comme chemin sûr pour aller vers le Seigneur.

L’immortalité de l’âme

En accueillant cette vérité qu’à la mort, la vie humaine n’est pas totalement détruite, qu’elle est transformée dans une communion nouvelle avec Dieu, l’Église soutient que subsiste après la mort un élément spirituel, traditionnellement appelé "âme".
En relation avec le Dieu immortel qui l’a créée, l’âme est elle-même immortelle.

Platon disait "Le vrai monde, c’est le monde d’après." Il subsiste après le corps une âme qui transcende la matière. D’autres pensent que lorsque le corps est anéanti, la personne elle même est anéantie.

Croire à la vie éternelle influe sur notre comportement dans notre vie terrestre. Notre âme immortelle est en nous-même cette trace d’éternité qui est un des signes de la création de Dieu, on porte en nous-même quelque chose de l’éternité de Dieu.

« Le mot âme est à entendre dans le sens utilisé par l’Écriture et la Tradition, à savoir comme principe spirituel et vital de la personne humaine source de son unité, et non comme une partie de l’homme à côté du corps. L’homme est "corps et âme mais vraiment un" » (GS 14).

Le corps n’est pas la prison de l’âme. Corps et âme sont unis intimement. Il n’y a pas de dualité. Ce que vit le corps retenti sur l’âme, ce que vit l’âme spirituellement retentit sur le corps (exemple des maladies psychosomatiques). Il y a une unité corps-âme qui donne une unité à notre vie.

Par la résurrection, on garde notre personnalité au Ciel. Même dans une autre réalité, transcendante. Et pour accéder à ce corps là, il faut la foi : les pèlerins d’Emmaüs le reconnurent à son geste, lorsqu’ils reconnurent le Christ.

Nous croyons que Dieu est un dieu personnel, et que la personne est faite pour la communion personnelle. Il n’y a pas de réincarnation. Notre âme est faite pour notre corps. Nous demeurerons dans l’éternité avec les actes que nous avons posés.

La connaissance de Dieu que j’ai sur terre me donne une communion bien plus plénière dans l’au-delà. Ce développement dans la connaissance de Dieu entrainera une connaissance surabondante au Ciel.
Ici-bas, je prépare la communion que je vais avoir avec Dieu au Ciel. Tout sera mis sous le regard de Dieu, et dans l’amour de Dieu.

Le jugement particulier

Au moment de la mort, l’existence de chaque homme est placée sous la lumière de Dieu et cette lumière éclaire tout ce qui a été vécu. C’est ce que l’on appelle le jugement particulier. Ce jugement particulier (il concerne chacun au moment de sa mort) n’attend pas la fin des temps. Il détermine la « situation intermédiaire » dans laquelle se trouvent les défunts avant le jugement général (où la vérité sera faite sur la vie et l’histoire de l’humanité tout entière) et la résurrection des morts. Chacun est mis par Dieu en face de sa vérité. Jugement sauveur pour ceux qui auront accueilli les paroles du Christ, pour ceux qui auront fait le bien ; jugement de condamnation pour ceux qui auront fait le mal. Le jugement n’a rien d’arbitraire et consacre la valeur de toute vie.

Parler de jugement est difficile. On est mal à l’aise avec ce mot. On est capable de poser des actes, de faire un choix. Après la mort, on sera mis sous le regarde de Dieu. L’amour de Dieu fera la vérité sur notre vie.
Soi ce regard de Dieu est accueilli avec humilité dans la miséricorde, et ce sera un chemin de Salut, soi il y a rejet de Dieu, rejet volontaire et conscient.
Les actes que j’ai posés m’aideront à accueillir ce regard. Le fait d’avoir à répondre de notre vie est un acte d’amour. Nous sommes responsables.

Le moment de la mort est un moment crucial. La mort est une rencontre pour le chrétien, c’est d’abord un face à face. Ceux qui se sont enfermés sur eux-mêmes ne verront même plus le pauvre Lazare qui est à la porte du riche.

L’éternité va dépendre de notre vie ici-bas. Cela donne une profondeur à notre vie, une amplitude presque vertigineuse. Avec la certitude de la miséricorde de Dieu. Parce qu’on aura fait confiance dans la miséricorde de Dieu. Parce qu’on aura accueilli le pardon.

Ceux qui n’ont pas la lumière de leur foi ont la lumière de leur conscience, c’est la lumière de Dieu dans chaque personne.
Cette lumière habite toute personne humaine. La personne sera sauvée dans le Christ parce qu’elle aura été fidèle à cette lumière intérieure. Mais si j’ai été contre cette lumière intérieure, les conséquences seront là.

Le purgatoire

Pour parvenir à cette contemplation de Dieu, une « étape » de purification, appelée purgatoire, peut être nécessaire. Il ne s’agit ni d’un lieu, ni d’un temps ; on peut parler plutôt d’un état. En tout cas, le purgatoire, qui est bien une peine, n’est pas à concevoir comme une punition, par laquelle Dieu se vengerait en quelque sorte de nos infidélités. La communion avec Dieu, dans laquelle nous introduit la mort, nous fait prendre conscience douloureusement de nos imperfections et de nos refus d’aimer, et du besoin de nous laisser purifier par la puissance salvatrice du Christ .
C’est Dieu lui-même qui purifie et transforme. Mais la Tradition de l’Église catholique affirme que ceux qui sont au purgatoire bénéficient des prières et des supplications adressées en leur faveur à Dieu par leurs frères, et aussi de l’intercession des saints déjà introduits dans la béatitude de la vision de Dieu.

Notre corps est un avec notre âme. La mort établit un état de violence. La séparation corps-âme est violente, c’est la mort. Notre corps mortel va terminer en poussière, l’âme demeure. A la résurrection des morts, nous ressusciterons avec un corps qui transparaitra de la lumière du Seigneur : la résurrection de la chair. S’il y a un bonheur parfait, je ne l’imagine pas sans mon corps. L’âme sans le corps est incomplète.

L’amour de Dieu donnera une plénitude. Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus disait :

« Je passerai mon Ciel à faire du bien sur la Terre. »

Les âmes ne sont donc pas inactives. Il y a peut-être une sorte de cheminement dans la vie après la mort, une croissance, allant d’émerveillement en émerveillement, une béatitude dynamique et non statique…

Le purgatoire : c’est un état de l’âme dans lequel l’âme a besoin de purifier sa capacité d’aimer. Et ce qui va la purifier, c’est le désir de voir Dieu face à face. Il n’y a que l’amour qui purifie, même ici-bas, et l’amour seul qui entre au Ciel. Entre le purgatoire et le Ciel, l’état de l’âme se purifie.

Pour la majorité de l’humanité, il y aura un temps de purification. Soi sur Terre avec la conversion intérieure (temps du Carême : je veux travailler sur moi-même avec la grâce de Dieu pour arriver à une capacité d’aimer de plus en plus désintéressée : c’est le combat spirituel que chacun mène).

Le Paradis, le Purgatoire, et l’Enfer sont des états de l’âme, ce ne sont pas des lieux.

Au purgatoire, l’amour de Dieu nous purifie.

La Vierge Marie, comme personne humaine, est celle qui nous précède dans le Royaume et nous indique le chemin. Cette communion avec la Vierge Marie nous aide. Nous sommes invités à la contempler. Elle est signe d’espérance.

Dans ce temps de Carême, dans cette Semaine Sainte, nous allons, contempler la mort, et la Résurrection du Christ à Pâques.