Homélie du 15e dimanche du Temps Ordinaire

13 juillet 2021

Ils partirent, et proclamèrent qu’il fallait se convertir.
Ils expulsaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d’huile à de nombreux malades, et les guérissaient.

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Texte de l’homélie

Chers frères et sœurs, le temps de l’été et des vacances (pour ceux qui peuvent en prendre) est ou devrait être un temps où l’on ralentit les activités pour contempler. C’est d’ailleurs l’une des fonctions du sabbat pour les juifs. Comme le dit un rabbin, il faut savoir s’arrêter de construire sa maison pour l’habiter.
Dans cet esprit, je vous propose de nous arrêter sur la deuxième lecture : l’hymne magnifique de Saint Paul au début de son épître aux Éphésiens. On dirait qu’il prend plaisir à contempler le bon Dieu. Selon mon habitude, je retiendrais trois aspects de cette contemplation : Saint Paul contemple le projet de Dieu ; il prend le temps de savourer divers bienfaits de Dieu et enfin, il revient sans cesse sur le Christ qui est au centre de tout.
Dieu a un projet ; les bienfaits de Dieu sont multiples ; le Christ est au centre.

Dieu a un projet

Dans l’hymne que nous avons lue, de nombreuses expressions disent que les choses ne se sont pas faites au hasard ou par une causalité impersonnelle mais par Dieu. Voici quelques expressions :

« Il nous a choisis (…). Il nous a prédestinés (…). Ainsi l’a voulu sa bonté. (…) selon que sa bonté l’avait prévu dans le Christ. (…) Nous sommes devenus le domaine particulier de Dieu, nous y avons été prédestinés. »

Notre vie a une direction et une signification. droite

Qu’il nous est bon de savoir qu’il a un pilote dans l’avion ! Il y a un but, une finalité ; nous ne sommes pas gouvernés par le hasard. Notre histoire humaine a un sens, ce qui veut dire à la fois direction et signification : notre histoire avance vers son accomplissement. Dans notre monde, à force de nier l’existence de Dieu, nos contemporains ont le sentiment qu’il n’y a plus personne aux commandes.
Dans certains cas (bioéthique), les hommes veulent se mettre aux commandes à la place de Dieu mais cela produit souvent des désastres…

Dans les moments de crise en particulier, il est important de savoir qu’il y a quelqu’un aux commandes. En écrivant cette hymne, saint Paul n’est pas naïf car il écrit plus loin :

« Nous ne luttons pas contre des êtres de sang et de chair, mais contre les Dominateurs de ce monde de ténèbres, les Principautés, les Souverainetés, les esprits du mal qui sont dans les régions célestes. » (Ep 6, 12)

Mais Saint Paul se refuse à souscrire à une forme de complotisme. Il a foi en la Providence de Dieu. Si vous voulez en avoir un aperçu, je vous invite vivement à relire l’histoire du Patriarche Joseph dans le livre de la Genèse : nous voyons qu’au-delà des manœuvres humaines, nous sommes dans la main de Dieu.

Saint Paul, qui a pourtant rencontré bien des épreuves, se refuse à entrer dans une forme de pessimisme et de fatalisme. Il nous apprend à ne pas nous laisser entraîner dans la voie de l’amertume, de la plainte, de la critique, du découragement lorsque nous rencontrons l’épreuve ou la difficulté.

Comme le disait très bien Benoît XVI dans son encyclique sur l’espérance :

« Ce ne sont pas les éléments du cosmos, les lois de la matière qui, en définitive, gouvernent le monde et l’homme, mais c’est un Dieu personnel qui gouverne les étoiles, à savoir l’univers ; ce ne sont pas les lois de la matière et de l’évolution qui sont l’instance ultime, mais la raison, la volonté, l’amour – une Personne. Et si nous connaissons cette Personne et si elle nous connaît, alors vraiment l’inexorable pouvoir des éléments matériels n’est plus l’instance ultime ; alors nous ne sommes plus esclaves de l’univers et de ses lois, alors nous sommes libres. » (Benoît XVI, Spe Salvi n° 5)

Oui, il y a un pilote dans l’avion et ce pilote est bon. Le projet de Dieu est un projet d’amour. Les mots « bénédiction, amour, grâce, bienveillance » parsèment le texte. Ce n’est pas un projet froid et inhumain mais un vrai projet d’amour.

« Ainsi l’a voulu sa bonté, à la louange de gloire de sa grâce ». Tout est motivé par son amour pour nous.

Les bienfaits de Dieu sont multiples

Au début de son hymne, Saint Paul déclare :

« Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ (…) nous a bénis et comblés des bénédictions de l’Esprit, au ciel, dans le Christ. »

La suite de son hymne consiste à détailler ces bénédictions de Dieu.

Il ne suffit pas de dire : Dieu m’aime. Je vous encourage beaucoup à repérer les signes de l’amour de Dieu pour vous. Vous savez bien que pour que la gratitude nous nourrisse, il faut prendre le temps de détailler les bienfaits dont nous sommes l’objet. Si nous nous contentons d’avaler tout rond, sans prendre le temps, de goûter et de savourer ces bienfaits, cela ne nous nourrit pas vraiment.
Il faut prendre le temps d’assimiler comme le faisait la Vierge Marie. À plusieurs reprises l’évangile nous est dit qu’elle « retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (Lc 2, 19). C’est ce que fait saint Paul dans cette hymne. C’est ce que nous sommes appelés à faire nous aussi. Je me contente de relever quelques unes des bénédictions que saint Paul énumère :

« Dieu le Père nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour. »

Quelle différence entre le fait de faire partie d’une foule anonyme et d’avoir été choisis ! Nous ne sommes pas acceptés plus ou moins à contrecœur mais vraiment choisis !

« Dieu le Père nous a prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus, le Christ. »

Dieu a voulu créer un lien particulier avec nous au point que nous sommes ses fils adoptifs. Il y a un vrai lien avec lui ; nous ne lui sommes pas des étrangers.

« Dans le Fils bien-aimé (…), par son sang, nous avons la rédemption, le pardon de nos fautes. »

Dieu ne s’est pas découragé de nous ; il ne nous a pas rejetés du fait de notre péché mais il a voulu nous sauver en Jésus.

« Dans le Christ (…), nous sommes devenus le domaine particulier de Dieu ».

Comment mieux dire que Dieu a voulu avoir une relation particulière avec nous !

« Vous avez reçu la marque de l’Esprit Saint. »

Quelle grâce que de pouvoir bénéficier d’une effusion de l’Esprit Saint, l’Esprit même de Dieu…

« Esprit de sagesse et d’intelligence, Esprit de conseil et de force, Esprit de connaissance et de crainte du Seigneur. » (Is 11, 2)

Le Christ est au centre

Dans ces quelques versets, le nom de Jésus, du Christ, revient sans cesse. Saint Paul s’adresse au « Père de notre Seigneur Jésus Christ » parce que c’est par Jésus qu’Il s’est révélé à nous. Nous sommes « choisis, dans le Christ ».
Nous sommes « prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus, le Christ ». La grâce, Il nous la « donne dans le Fils bien-aimé ».
C’est « en Lui, par son sang, nous avons la rédemption, le pardon de nos fautes. » C’est dans le Christ qu’Il va « récapituler toutes choses, celles du ciel et celles de la terre ». C’est encore dans le Christ que « nous sommes devenus le domaine particulier de Dieu ».
Nous sommes invités à espérer « d’avance dans le Christ ». C’est encore dans le Christ que nous avons « reçu la marque de l’Esprit Saint ».

Cela revient plus ou moins à la grande doxologie que le prêtre prend en votre nom à la fin de la prière eucharistique :

« Par lui, avec lui et en lui, à toi, Dieu le Père tout-puissant, dans l’unité du Saint-Esprit, tout honneur et toute gloire, pour les siècles des siècles. »

« Le texte grec suggère que le Christ est devenu le « kefalaion », c’est-à-dire qu’il est le point cardinal, l’axe central vers lequel l’être créé converge et acquiert tout son sens. » (JP II, 13 octobre 2004)

Dans notre vie comme dans le calendrier, on devrait pouvoir dire : « Avant Jésus-Christ » et « Après Jésus-Christ ». Lorsque nous avons véritablement rencontré Jésus, il y a un avant et un après. Au vrai sens du terme, le centre du monde, le centre de l’histoire humaine (l’alpha et l’oméga), c’est Jésus-Christ.

Nous ne proclamons pas une sagesse humaine ou une philosophie ; nous annonçons une personne : Jésus-Christ, qui est « puissance de Dieu et sagesse de Dieu » (1 Co 1, 24).

« Prenez garde à ceux qui veulent faire de vous leur proie par une philosophie vide et trompeuse, fondée sur la tradition des hommes, sur les forces qui régissent le monde, et non pas sur le Christ. » (Col 2, 8)

Comme l’a expérimenté Thérèse d’Avila, nous ne pouvons aller vers Dieu sans passer par le Christ.

Conclusion :

Le commentaire de la deuxième lecture ne nous a pas éloignés de l’évangile de ce jour où Jésus envoie les Douze en mission. En effet, il est inutile de partir en mission si nous n’avons pas fait la rencontre de Jésus. Inutile d’essayer de convaincre les autres si nous-mêmes ne sommes pas émerveillés de la bonté de notre Dieu. En cela la louange est la meilleure préparation à l’évangélisation. D’ailleurs, ce n’est certainement pas un hasard si l’auteur de l’épître aux Éphésiens est un grand évangélisateur !

Alors, en ces mois d’été, prenons le temps de goûter et voir comme le Seigneur est bon ! (cf. Ps 33, 9 ; 1 P 2, 3).

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Amos 7,12-15.
  • Psaume 85(84),9ab-10.11-12.13-14.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Éphésiens 1,3-14.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 6,7-13 :

En ce temps-là, Jésus appela les Douze ; alors il commença à les envoyer en mission deux par deux. Il leur donnait autorité sur les esprits impurs, et il leur prescrivit de ne rien prendre pour la route, mais seulement un bâton ; pas de pain, pas de sac, pas de pièces de monnaie dans leur ceinture.
« Mettez des sandales, ne prenez pas de tunique de rechange. »
Il leur disait encore : « Quand vous avez trouvé l’hospitalité dans une maison, restez-y jusqu’à votre départ.
Si, dans une localité, on refuse de vous accueillir et de vous écouter, partez et secouez la poussière de vos pieds : ce sera pour eux un témoignage. »

Ils partirent, et proclamèrent qu’il fallait se convertir.
Ils expulsaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d’huile à de nombreux malades, et les guérissaient.