Homélie du 30e dimanche du Temps Ordinaire

31 octobre 2012

L’aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus. Jésus lui dit :
— « Que veux-tu que je fasse pour toi ? »
— « Rabbouni, que je voie. »
— Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t’a sauvé. »

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Texte de l’homélie :

Chères familles du Père Lamy, chers amis,

L’évangéliste Saint Marc n’est pas un journaliste. Le propos d’un évangéliste, c’est de nous prendre par la main, et de nous amener à avoir foi dans le Seigneur. C’est à dire, à recevoir le Seigneur, Le recevoir jusque dans notre cœur, à adhérer à ce qu’Il dit et à marcher à Sa suite.

La guérison des aveugles est un événement qui nous est destiné

Il y a deux récits de guérison d’aveugle : celle d’aujourd’hui, et aussi, quelques chapitres plus tôt. Et chaque fois, dans son évangile qui est bien construits, marquent la fin d’une section, la fin d’un passage. Et dans ces guérisons d’aveugles, il va y avoir une progression.

La fois précédente, c’était une guérison qui se faisait en deux temps : il voyait bien pas encore parfaitement (les hommes comme des arbres), c’était un peu confus. Et puis dans ce récit, cela se fait directement. Cela vient illustrer le discours et le chemin des disciples qui commencent à voir qui est Jésus, qui est Jésus pour nous.

Et bien, en cette année que le Pape a proclamée « Année de la Foi », Benoît XVI a le désir que nous relisions l’Évangile, certes, mais que nous fassions surtout ce chemin pour découvrir qui est Jésus et pour que nous puissions Lui donner notre foi, c’est à dire notre cœur, notre intelligence, nos forces, et le servir, l’accueillir et rayonner de Sa vie et de Sa grâce.

La lettre aux Hébreux nous concerne également

Aujourd’hui, dans les lectures, il y a un de ces thèmes d’approfondissement que fait l’auteur de l’épître aux Hébreux (Saint Paul ou l’un de ses disciples) : il nous dit que Jésus est prêtre. C’est le sens du petit texte que nous avons lu. Et je voudrais que nous puissions approfondir un peu cela.

Juste après le passage que nous avons lu, Saint Paul se rend compte qu’il est en train de dire des choses qui peuvent être difficiles. Mais il dit que nous ne sommes plus des petits enfants, car nous avons reçu les sacrements du Seigneur : le Baptême, l’Eucharistie, et je l’espère, bientôt, la Confirmation. Et nous pouvons accueillir cette parole.

L’auteur de l’épître aux Hébreux prend la comparaison avec les prêtres dans l’Ancien Testament. Il résume dans la première phrase : « C’est un homme », puis : « Il est établi en faveur des hommes, et fait les relations entre Dieu et les hommes », mais, il va rajouter quelque chose qui va faire l’essence du sacerdoce : « Il est prêtre ». Qu’est-ce que cela veut dire ? cela signifie qu’Il offre le sacrifice en rémission des péchés. Jésus est donc vraiment prêtre. Et c’est pour cela que l’on a ces citations développées par la suite.

Cela remonte à Abraham qui a été appelé. Rappelons-nous sa foi totale qui a ouvert notre monde à la foi véritable dans le Seigneur. Dieu lui a fait un serment irrévocable. Il ne peut revenir dessus. Et ce serment est accompli dans la parole du psaume :

« Je l’ai juré, Tu es prêtre pour l’éternité à la manière de Melchisédech. »

On est souvent perdu dans le livre des Hébreux, car il y a toujours cette comparaison entre le prêtre de l’Ancien Testament et Jésus qui est vraiment prêtre. Alors, cela fait un problème , parce que Jésus n’est pas prêtre à la manière de l’Ancien Testament. Il n’est pas fils de Lévi, ni fils d’Aaron. Il est fils de David, comme on l’a entendu dans l’Évangile. Mais, l’auteur va reprendre tout son raisonnement en disant cette parole de psaume, en l’approfondissant : cela va devenir comme un refrain dans le texte pour nous dire qu’Abraham a été rencontré par ce Melchisédech qui était le prêtre du Très-Haut. Et ce prêtre a béni Abraham (le père des croyants, le père de Lévi, le père du chef des prêtres et d’Aaron).
Il l’a béni et Abraham lui a donné la dîme sur tous ses biens. Et il dit : si c’est lui qui l’a béni, c’est parce que c’est un sacerdoce supérieur.

Le rôle prophétique de Melchisédech

Mais, ce sacerdoce, cette offrande est faite pour les péchés, pour le bien, pour que nous puissions vivre dans notre humanité libérée, restaurée, en plénitude. C’est cela le but de Jésus. C’était déjà le but de Dieu lorsqu’Il appelle Abraham : « En toi seront bénies toutes les familles de la Terre ». Et en Jésus, dans son sacerdoce, nous, pécheurs, sommes tous bénis, nous sommes « bien-dits », nous sommes restaurés. Les Chrétiens sont ceux qui son « bien-dits » par Dieu, qui sont dans la bonne relation avec eux-même, avec Dieu et avec les autres. Et là-dessus, nous avons toujours à grandir.

Alors, ce Melchisédech représente ce sacerdoce. En plus, il y a un élément symbolique à travers le pain et le vin qu’il offrait et qui rappellent le cœur du sacerdoce de Jésus : l’Eucharistie, offrande du Pain et du Vin. Il vient de manière efficace nous purifier de nos péchés. Il vient nous bénir et suivre Jésus. Cela veut dire apprendre à être bien en nous même, à être bien avec les autres, c’est à dire à pouvoir donner tout le fruit nécessaire.

Ce sacerdoce, Jésus l’a accompli une fois pour toutes. Et Il l’a donné à chacun d’entre nous. Vous souvenez-vous, au cours du rite du baptême, des paroles du prêtre qui accompagnent l’onction d’huile :

« Aujourd’hui, tu es devenu membre de la communauté chrétienne : Prêtre, Prophète et Roi ». (Rite du baptême)

Le sacerdoce des baptisés les appelle à la mission

Ce sacerdoce est cette capacité d’offrir pour le péché et de ramener tous ceux qui sont égarés, tout ce qui est égaré en nous, dans l’Amour du Seigneur, dans la Miséricorde. Ce sacerdoce est la fonction même de l’Église. Voici les amis de Jésus qui sont appelés à faire cela, à ramener toute chose sous le regard de Dieu et dans l’amitié avec Dieu.

Et c’est chacun de nous qui avons à le faire. Il y a bien sur les prêtres. Et comme Familles du Père Lamy, vous le savez bien puisque vous parrainez un frère (qu’il soit prêtre ou non) pour que son action soit dirigée vers la réception de la Grâce de Dieu, chacun à sa place. Vous savez bien combien cela est important, et combien cette association de prière avec le ministère du prêtre est importante.

On a besoin des prêtres, parce qu’ils sont donnés pour que nous tous, vous tous, puissiez vivre ce sacerdoce. C’est à dire ramener le monde dans sa beauté. Ramener le monde dans la sainteté. Ramener le monde, blessé, malade, dans les voies du Seigneur.

Jean-Paul II a expliqué le sens de ce sacerdoce dans un de ses écrits

Je voulais vous citer un très beau texte de Jean-Paul II dans son encyclique sur la Miséricorde. Ce très beau texte explique comment Jésus a exercé ce sacerdoce : Il l’exercé en donnant Sa vie pour nous, dans ce sacrifice, en s’offrant. Et Il s’est offert avec amour, Il s’est offert pour que nous puissions être touchés, pour que nous puissions ensuite, comme on le voit dans les actes des apôtres, le regarder, et recevoir la vie en comprenant l’amour qu’Il a donné, en comprenant ce que Dieu ressent devant l’homme pécheur, devant nos péchés. Il nous y invite : Il y invite les prêtres et Il y invite chacun d’entre nous. Alors, Il le fait à travers Son sacrifice. Le texte dit ici :

« Il offrit ses prières et supplications avec grands cris et larmes à Celui qui pouvait Le sauver de la mort. Et Il fut exaucé. » (Epître aux Hébreux)

On sait cela par Sa Résurrection, par la manifestation de Jésus vivant. Non pas séparé de nous par la mort, mais bien plus uni et nous communiquant cette force de la grâce.

Voici le texte de Jean-Paul II qui est si fort :

« L’Église a le droit et le devoir de faire appel au Dieu de Miséricorde « avec de grands cris ». Ces grands cris, qui sont comme le sacerdoce par excellence de Jésus dans l’offrande qu’Il fait de Lui sur la Croix, doivent caractériser l’Église de notre temps. Un cri qui implore la miséricorde selon la nécessité de l’homme dans le monde contemporain.
Dieu est fidèle à Lui-même, à Sa paternité, à Son amour.

Comme les prophètes, faisons appel à l’aspect maternel de cet amour qui, comme une mère, suit chacun de ses fils, chacune de ses brebis perdues, et cela même s’il y avait des millions d’égarés, même si dans le monde, l’iniquité prévalait sur l’honnêteté, même si l’Humanité méritait pour ses péchés un nouveau déluge. Comme la génération de Noé.

Ayons recours à l’Amour paternel que le Christ a révélé, et qui atteint son sommet dans la Croix, la mort et la résurrection. »

Et voilà ce que Jésus nous donne : Jésus prêtre nous donne le regard juste sur le monde. Devant les difficultés du monde, nous risquons de regarder avec nos sentiments, avec nos jugements personnels, avec nos peurs et nos réflexes de se refermer sur nous dans un parti, dans une nation, dans une communauté spéciale. Et Jésus nous entraîne derrière Lui, par Son sacerdoce, à aller chercher les brebis perdues, à voir chacun comme une brebis perdue.

Jean-Paul II termine le texte en disant :

« Cet amour de tous les hommes sans aucun exception ni discrimination, sans différence de race, de culture, de langue, de conception du monde, sans distinction entre ami et ennemi. »

Voici ce que Jésus nous invite à faire. Ainsi, on comprend mieux cet amour qu’Il a pour les pécheurs. Cette capacité de rencontrer tout le monde, sans regarder si c’est un Romain, un Samaritain, un lépreux, un collecteur d’impôts, un parisien….etc !

Regardons chacun comme une brebis que le Seigneur appelle. Et notre travail, par notre prière, est vraiment de ramener au Seigneur la multitude, en nous laissant ramener nous-même, bien sur. Et cela, nous le pouvons aussi par cette grâce que certains ont reçue, au service du peuple. Pour que vous puissiez vivre cette grâce du sacerdoce de Jésus, il y en a certains qui sont ordonnés prêtre pour être des guides, pour être comme des icônes pour vivre en plénitude ce sacerdoce et le mettre à la portée de chacun à travers les sacrements : la Grâce qui coule du côté du Christ.

Demandons la grâce, en ce jour, d’approfondir notre foi, de regarder Jésus prêtre, Jésus qui nous donne la Vie, Jésus qui offre Sa vie, et apprenons à offrir toute notre vie. C’est ce que l’on fait aussi le soir dans la prière, d’offrir chacun ce que nous avons vécu : ce qui est bon, ce qui est moins bon, ce qui est mal, même peut-être, mais de le mettre sous le regard de Jésus. Que ce soit en nous, que ce soit dans les autres.

Et demandons-Lui ainsi d’avoir un cœur semblable au Cœur du Christ. Voyez comme c’est beau ici : nous faisons appel à l’aspect maternel d’un père ou d’une mère qui suit son enfant. Et quelque soient ses chemins, elle va le chercher, ne désarme pas, et lui communique cet amour, pour qu’il soit béni, pour qu’il soit bien, pour qu’il puisse grandir,

Amen


Références des lectures du jour :

  • Livre de Jérémie 31,7-9.
  • Psaume 126(125),1-2ab.2cd-3.4-5.6.
  • Lettre aux Hébreux 5,1-6.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 10,46-52 :

Jésus et ses disciples étaient venus à Jéricho. Et tandis que Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une foule nombreuse, un mendiant aveugle, Bartimée, le fils de Timée, était assis au bord de la route.

Apprenant que c’était Jésus de Nazareth, il se mit à crier : « Jésus, fils de David, aie pitié de moi ! ». Beaucoup de gens l’interpellaient vivement pour le faire taire, mais il criait de plus belle : « Fils de David, aie pitié de moi ! ». Jésus s’arrête et dit :
— « Appelez-le. »
On appelle donc l’aveugle, et on lui dit :
— « Confiance, lève-toi ; il t’appelle. »
L’aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus. Jésus lui dit :
— « Que veux-tu que je fasse pour toi ? »
— « Rabbouni, que je voie. »
Et Jésus lui dit :
— « Va, ta foi t’a sauvé. »

Aussitôt l’homme se mit à voir, et il suivait Jésus sur la route.