Homélie de la solennité du Christ-Roi (forme extraordinaire du rite romain)

3 novembre 2014

« Mon royaume n’est pas de ce monde ; si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour que je ne fusse pas livré aux Juifs, mais maintenant mon royaume n’est point d’ici-bas. »

(La solennité du du Christ-Roi a été fêtée le dimanche 26 octobre 2014, selon le calendrier de la forme extraordinaire du rite romain.)

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Texte de l’homélie :

Mes bien chers frères,

Chaque jour, et plusieurs fois par jour, nous nous adressons à notre Père des Cieux et nous demandons que Son règne arrive, qu’il s’établisse définitivement sur cette terre pour notre plus grand bonheur. Et depuis le jour de notre Confirmation, nous avons reçu toutes les grâces nécessaires pour travailler à l’avènement de ce règne.
En effet, le Christ a été établi par Dieu pasteur éternel de nos âmes, chef et tête de toute l’Humanité rachetée par son sang. Il est notre berger, Celui qui nous guide et nous accompagne jusqu’au Royaume de Dieu, jusqu’à cette maison où notre Père attend notre retour, jusqu’au banquet céleste où nous fêterons dans la joie des noces éternelles l’alliance de Dieu avec son peuple.

Dieu règne : Il règne sur toute la Création et sur la destinée de l’homme ; Il règne sur les personnes comme sur les peuples et rien n’échappe à sa puissance. Il a créé toute chose avec ordre et mesure mais le drame du péché a détruit cette harmonie, cette beauté originelles. Le Père a envoyé son Fils unique rétablir cette souveraineté divine en révélant aux hommes la présence du royaume de Dieu, de ce règne de la justice, de vérité et d’amour, ce règne qui commence et se manifeste dans le cœur d’un homme, celui de notre seigneur Jésus-Christ.
Dans son humanité, le Verbe incarné réalise toute la justice et reçoit toute la grâce dont est capable un cœur humain, un cœur de chair. C’est Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, qui a terrassé les forces du mal par Sa victoire sur la Croix ; par Sa Résurrection, Il a brisé les portes de l’enfer et Son Ascension manifeste aux hommes de tous les temps qu’Il a été établi par Dieu comme le Médiateur qui intercède efficacement pour ses frères les hommes, puisqu’Il est assis désormais à la droite du Père.

Dans l’épître que nous venons d’écouter, Saint Paul nous dit :

« Nous-mêmes, le baptême nous a fait entrer dans son royaume ».

Le Christ règne dans le cœur des justes, de tous ceux qui cherchent à être fidèles à la grâce, Il règne dans son Église qu’Il gouverne invisiblement et qu’Il préserve de toute souillure et de tout péché. Il règne chaque fois que l’Esprit Saint remporte une victoire sur l’erreur, sur le péché et le mensonge ; Il règne chaque fois que l’Évangile est accueilli, répandu et communiqué. Il règne et Il proclame Ses droits alors qu’Il semble humilié et qu’Il comparaît devant Pilate.
En effet Il s’est acquis ce royaume par Sa Passion très sainte, par le sang de Son sacrifice.

Jésus jugera toutes les nations parce que Dieu le Père l’a établie roi, juge et pasteur de toute la Création. Dieu a enfin trouvé en lui un pasteur selon Son cœur, capable de prendre soin de tout le troupeau immense de l’humanité.
Le Christ ressuscité et glorieux est littéralement le lieutenant du Père, Son ambassadeur, Son vicaire, Son fondé de pouvoir.
C’est ce que Dieu avait déjà promis jadis par la bouche du prophète Ézéchiel :

« Je susciterai pour le mettre à la tête de mes brebis un pasteur qui les fera paître, mon serviteur David : c’est Lui qui les fera paître et sera pour eux un pasteur.
Moi, Yahvé, je serai pour eux un Dieu, et mon serviteur David sera prince au milieu d’eux.
Je conclurai avec eux une alliance de paix. »

Jésus-Christ est ce Messie, le nouveau David, dont la mort a rassemblé en un seul troupeau la multitude des hommes que le péché avait dispersé.
Et nous mêmes sommes appelés à servir ce royaume par une vie sainte, par le souci du bien véritable de ceux qui nous entourent ou que nous rencontrons. A tous nous voulons offrir la grâce du salut par notre amitié, notre cordialité, notre disponibilité, notre sens du vrai et du bien. Nous voulons que chaque homme ouvre son cœur à l’amour de Dieu, et qu’il découvre dans le Cœur de Notre Seigneur la source jamais tarie de la grâce rédemptrice, et qu’ainsi, il puisse se consacrer entièrement à ce divin Cœur afin de parvenir plus sûrement au Ciel, afin, aussi, de coopérer plus efficacement au salut du monde.
Nous voulons, pour le dire en un mot, que chaque homme se soumette librement au doux empire de Jésus-Christ. Voilà pourquoi la fête du Christ-Roi est indissociable du culte du Sacré-Cœur. Voilà pourquoi aussi nous renouvellerons à la fin de cette messe, devant le Saint Sacrement exposé, la consécration du genre humain au Sacré-Cœur de Jésus, consécration prévue par le pape Pie XI alors que justement, il instaurait cette fête du Christ-Roi.

Comme vous le savez sans doute, chaque fête liturgique a son histoire, et il est essentiel de s’y référer pour pouvoir en tirer tout le fruit spirituel. Or la fête liturgique du Christ Roi a été instituée en 1925 au moment de clôture de l’année sainte, pour rappeler aux fidèles et au monde entier la suprématie du Christ, la réalité de son autorité y compris dans le domaine temporel.
Certes l’Église reconnaît et a toujours reconnu l’existence de réalités créées qui obéissent à leur propre loi de développement et de croissance. En ce sens, le christianisme n’a jamais été une théocratie où le pouvoir religieux devrait tout régir, tout ordonner et tout absorber. Non, l’Église a une mission qui est toute surnaturelle, celle de sauver les hommes en leur faisant connaître la personne et le message de Jésus-Christ. Pour le reste, elle ne peut donner que des principes généraux, rappelant que tout dans la société doit être ordonné au bien véritable de l’homme, c’est à dire à son développement intégral.

Cependant qui dit distinction ne dit pas séparation, voire ignorance ou opposition. Déjà les papes du XIXe siècle avaient condamné très fermement le laïcisme libéral qui consiste à ordonner la société selon des principes immanentistes, en feignent d’oublier la finalité et l’orientation surnaturelle de tout homme.
Notre vingtième siècle a montré à quelles extrémités pouvait aboutir l’oubli des droits de Dieu et de l’homme. Face à la montée de la barbarie totalitaire, le pape Pie XI institua donc cette fête du Christ-Roi pour rappeler que le Christ règne non seulement sur les individus mais aussi sur les sociétés, les états et les communautés politiques. Cette doctrine qui appartient à la Révélation et qui a encore été rappelée par le Catéchisme de l’Église catholique, nous devons la faire nôtre.

Voilà, chers frères, ce que vient nous rappeler la fête du Christ-Roi. Prenons donc la résolution de laisser la grâce du Christ régner sur toute notre vie,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre des Proverbes 8, 22-24 et 32-35.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 1, 26-38 :

En ce temps-là, Pilate dit à Jésus :
— « Tu es le roi des Juifs ? »
Jésus répondit :
— « Dis-tu cela de toi-même, ou d’autres te l’ont-ils dit de moi ? »
Pilate répondit :
— « Est-ce que je suis Juif ? Ta nation et les chefs des prêtres t’ont livré à moi : qu’as-tu fait ? »
Jésus répondit :
— « Mon royaume n’est pas de ce monde ; si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour que je ne fusse pas livré aux Juifs, mais maintenant mon royaume n’est point d’ici-bas. »
Pilate lui dit :
— « Tu es donc roi ? »
Jésus répondit :
— « Tu le dis, je suis roi. Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité : quiconque est de la vérité écoute ma voix. »