Ordination sacerdotale et première messe du frère Raphaël

Dimanche 13 et lundi 14 juin 2010

« Être serviteur : plaise à Dieu que ce soit la trame de mon sacerdoce ! »

Le dimanche 13 juin à 15h en la Cathédrale de Strasbourg, Mgr Christian Kratz, évêque auxiliaire, a ordonné prêtres 10 diacres du diocèse de Strasbourg dont notre Frère Raphaël.
Le 14 juin, le Père Raphaël disait sa première messe dans la chapelle de Notre-Dame des Bois, lieu du pèlerinage fondé par le Père Lamy.


"Mon ordination est célébrée après 10 ans de vie religieuse dans la congrégation des serviteurs de Jésus et de Marie. Rattaché au prieuré d’Ottmarsheim, j’ai suivi ma formation théologique à l’université de Fribourg (Suisse) et suis le dernier arrivé dans l’équipe des diacres du diocèse. Je suis devenu religieux après l’École spéciale militaire de Saint-Cyr, une période déterminante dans mon discernement par les amitiés et les exemples rencontrés. Auprès de mes amis militaires et religieux, le désir de servir s’est imposé comme vraiment digne d’être vécu, a trouvé son lieu chez les Serviteurs et enfin comme prêtre.
Il me reste à présent à rendre grâce pour les messes que désormais, je célébrerai.
Être Jésus, agir en son Nom : comment ne pas être pris de vertige devant la démesure du sacerdoce ? …"

Nous vous laissons découvrir l’homélie de cette première messe, ainsi que les photos de ces 2 événements.


Homélie de la première messe du Frère Raphaël à Notre Dame des Bois, le 14 juin 2010

Messe votive à Marie « Cause de notre joie »

« Comment m’est-il donné que vienne à moi la mère de mon Seigneur ? » (Lc 1, 4 »)
Cette exaltation d’Élisabeth dans le mystère de la Visitation exprime mon sentiment à l’occasion de cette première messe à Notre Dame des Bois. Oui, aujourd’hui, je suis heureux. Heureux et étonné. Heureux d’être prêtre, d’être ici aux pieds de celle qui porte le salut du monde, heureux d’être avec vous, chers parents, chers frères de communauté et chers pèlerins familiers de ce rendez-vous du lundi. Et étonné d’avoir été appelé, d’avoir reçu un tel cadeau !

La première messe permet traditionnellement au nouveau prêtre de faire mémoire de son itinéraire de vocation, de remercier ceux qui ont compté de près ou de loin dans ce choix. Permettez que je réserve l’évocation de ces liens terrestres aux messes de prémices en famille ou en communauté. A Notre Dame des Bois, le lieu par excellence où le ciel se fait familier, je voudrais remercier notre famille première et ultime, celle de Dieu, de sa Mère et de ses saints. Une action de grâce comme une promenade dans mon histoire personnelle en compagnie de la plus jeune, de la plus belle et de la plus souriante des biens aimées. Dans ce cheminement, tout n’a pas été linéaire, transparent ; tout n’est pas racontable… On ne montre que ce qui brille - ce que d’ailleurs je vais m’empresser de faire ! Et pourtant, notre foi est que Dieu fait feu de tout bois, que rien de notre histoire, fût-elle bien sombre, ne lui échappe. Que dans toute part d’ombre, de ténèbres, il y a une bonne nouvelle a décrypter. Première messe ? Il y en a eu en fait beaucoup d’autres avant…

Il y eut d’abord les messes où j’ai suivi. Ainsi pour mes souvenirs d’enfance dans une famille où l’on naît chrétien, où le Bon Dieu nous est donné au biberon sans conservateur et avec seulement un peu de produits ajoutés. On y apprend d’ailleurs à connaître Marie – on la porte dans nos prénoms, la prie chaque soir – avant son Fils. C’est Elle qui nous introduit au bonheur d’être chrétien. On la prie pour obtenir un nouveau vélo, pour que les parents cèdent à nos envies… La messe est la grande affaire du dimanche matin, même si nos cris et nos déplacements détournent l’attention de quelques-uns et font que les parents ont souvent le rouge au front.

Puis vint le temps des messes subies. C’est la période de l’adolescence où l’on ne croit plus vraiment que la messe soit nécessaire. Messes subies parce que incompréhensibles ; messes parfois évitées (ce qui n’était d’ailleurs jamais sans conséquences). Dans des impasses, des voies où l’on se brûle les doigts, Marie restait souvent l’ultime recours d’un cœur finalement inassouvi par les plaisirs faciles et mondains. C’est à Elle que j’attribue tant de rencontres de jeunes témoins, des amitiés d’exception où se donnait à respirer la bonne odeur du Christ, bref toute une prédication vivante percutante pour un ado saturé de discours !

Enfin arriva le temps des messes choisies. La foi est désormais adulte, elle n’est plus affaire de tradition où de faire-valoir. Et la messe devient un rendez-vous attendu, qu’on assume aussi. C’est le temps où Dieu, de quelque chose, devient quelqu’un. Tant de personnes par leur témoignage de vie me parlent de lui, me renvoient à lui. Alors revient la question de la vocation, préalablement enfouie pour des motifs qui ne tiennent plus. La vie religieuse séduit, elle me paraît mériter tous les efforts, justifier tous les sacrifices. Au fond, c’est dans cette voie que je serai moi-même. Marie accompagne ces choix me dit-on. Et c’est vrai : elle est le refuge quand le désespoir guette, que mes souffrances ou celles des autres sont trop lourdes. Les paroles du « Souvenez-vous » entendues autrefois à la prière familiale peuvent alors être les miennes, oui : « on a jamais entendu dire qu’aucun de ceux qui ont imploré vos suffrages ait été abandonné ».

Il me reste à présent à rendre grâce pour les messes que désormais, je célébrerai. Être Jésus, agir en son Nom : comment ne pas être pris de vertige devant la démesure du sacerdoce ? Mais le vertige accule justement à se laisser porter. C’est le moment de ré-entendre le Père Lamy, pour qui « Marie est une habile chiffonnière ». C’est qu’elle fait de l’or de notre boue !

Être simple

A Notre Dame des Bois, je demande une grâce pour mon sacerdoce. Une grâce qui, il me semble, est la caractéristique de ces lieux, grâce qui m’a toujours émerveillé dans notre Congrégation : la simplicité. N’est-elle pas cet ornement de l’âme qui nous fait sans artifice, oublieux de nous-même parce que préoccupé de la seule présence de Dieu ? Par elle, nous sommes accessibles, nous ne sommes pas des « monsieurs ». C’est elle aussi qui nous rend capables de rire de nous-même, signe d’un cœur qui ne s’appartient plus. Me revient cette histoire de notre fondateur se rendant pour un baptême en calèche : « je monte dans ma voiture, le fond se défonce. Celui qui me conduisait était assis sur son cheval et moi debout les pieds sur les ridelles. Ils m’ont amené ainsi sur la place. Tous riaient et cela a plu aux gens. J’ai dit à ceux qui riaient : mon carrosse est défoncé ! » Marie enseignante et protectrice de la simplicité ! Alors Dieu peut prendre toute la place, alors nous sommes vraiment libres.

Après beaucoup trop de « moi je » (les ados disent RMTV, « raconte moi ta vie »), il est temps d’entrer dans le merci des mercis, l’eucharistie qui les englobe tous.