Homélie de la solennité de l’Épiphanie du Seigneur

10 janvier 2014

« Quand ils virent l’étoile, ils se réjouirent d’une très grande joie.
Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe. »

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Texte de l’homélie :

Frères et sœurs,

J’espère que vous avez poursuivi votre luminothérapie ? Nous avions commencé à Noël, avec ces mystères de lumière qui sont là pour nous fortifier dans l’Espérance. En effet, dans la première lecture, il est beaucoup question de cette lumière qui nous est donnée pour nous faire avancer dans la nuit.

Il y a plusieurs cercles concentriques :

  • la naissance au milieu de Marie et de Joseph
  • puis les bergers
  • et aujourd’hui, c’est l’ouverture aux païens avec les rois mages.

Et justement, dans cette fête de l’Épiphanie, on commémore traditionnellement cette ouverture aux païens : Jésus n’est pas venu uniquement pour le peuple juif, mais pour tous les hommes. Ainsi, chaque fois que Jésus nous choisit, ce n’est pas "contre", mais "pour".

Choisis "pour" le monde

En effet, s’Il a mis le peuple élu à part, ce n’est pas « contre » les païens mais « pour » eux. Cela est vrai de tout chrétien : s’Il nous a choisis, ce n’est pas pour vous éloigner des autres comme si nous étions une catégorie de « purs » dans une génération pervertie et dévoyée. C’est au contraire « pour » tous ceux qui ne connaissent pas Dieu.
Si c’était pour nous éloigner des autres, ce ne le serait jamais que pour un temps. Car, en première finalité, c’est pour les autres que Dieu s’est donné à nous.

Il y a un peu plus d’un mois, le pape François nous a donné une lettre apostolique sur l’évangélisation, que vous l’avez peut-être déjà lue. Dans l’évangélisation, il parle beaucoup du mouvement d’aller aux périphéries ; mais il y a aussi le mouvement d’accueillir ceux qui viennent des périphéries, et qui s’adressent à l’Église pour poursuivre leur chemin. C’est dans cette perspective que je voudrais lire avec vous quelques étapes dans l’évangile d’aujourd’hui, dans cette vision de celles et ceux qui sont loin de l’Église et qui s’adressent à vous, à nous, pour aller de l’avant dans leur itinéraire.

La recherche authentique des « mages »

Ceux que l’on appelle les « rois mages » n’étaient pas des astrologues qui lisent dans les lignes de la main. Ils étaient plutôt des astronomes, les scientifiques de l’époque, qui menaient une recherche de type scientifique et intellectuelle, une authentique recherche de la vérité.
C’est cette recherche qui les met en route et les conduit vers Jérusalem. Ils se mettent à la suite de cette étoile.

Ils n’hésitent pas à faire du chemin (pas seulement extérieur mais aussi intérieur) pour trouver une réponse. Ils représentent les « païens » d’aujourd’hui dont beaucoup ont une recherche authentique de Dieu.

Passer par Jérusalem

A un moment de leur parcours, l’étoile les conduit à Jérusalem. Guidés par leur intuition soutenue par la grâce de Dieu, ils ont fait une grande partie du chemin ; mais pour les derniers pas, ils doivent passer par Jérusalem. Ainsi en est-il de beaucoup de gens qui cheminent et à un certain moment s’adressent à l’Église pour aller plus loin. En dépit de toutes ses imperfections, l’Église est l’interprète authentique de la Parole de Dieu.
Dans notre cheminement spirituel, nous avons besoin des autres. Il est important de savoir demander conseil à ceux qui sont plus avancés dans la vie spirituelle.

Interroger la Parole de Dieu

Les scribes de Jérusalem ont un excellent réflexe : ils scrutent la Parole de Dieu. Et dans notre cas, lorsque des chercheurs de Dieu s’adressent à nous, notre réflexe devrait être le même : scruter la Parole de Dieu, de chercher dedans la réponse qu’ils attendent.
La demande des « mages » est comme un aiguillon pour interroger Dieu dans Sa Parole afin de pouvoir leur donner une réponse.

Il se passe alors quelque chose d’étonnant : les scribes sont tout à fait en mesure de dire :

C’est à À Bethléem en Judée, car voici ce qui est écrit par le prophète : " Et toi, Bethléem en Judée, tu n’es certes pas le dernier parmi les chefs-lieux de Judée ; car de toi sortira un chef, qui sera le berger d’Israël mon peuple".

C’est bien le lieu précis où le Sauveur doit naître mais ils ne se déplacent pas. Que s’est-il passé ? Paradoxalement, dans le palais d’Hérode, la bonne nouvelle de la naissance du Messie suscite non pas la joie mais la crainte et des réactions hostiles. Hérode a peur de perdre son pouvoir. A tort, il voit le Christ comme un concurrent qui va lui enlever son pouvoir. Or Jésus ne vient pas lui enlever son pouvoir mais seulement rectifier une façon erronée de l’exercer.

Les scribes non plus ne se dérangent pas : ils étaient peut être plus enfermés dans une science livresque que dans un contact vivant avec le mystère de Dieu. Cela peut hélas aussi nous arriver : nous savons bien où trouver Jésus (dans les pauvres, les souffrants, les purs de cœurs, les petites fidélités quotidiennes, …) mais nous ne nous déplaçons pas toujours, nous ne mettons pas toujours la Parole en pratique. Or la Bible n’est pas une encyclopédie de connaissances religieuses, elle est un livre de vie. Sans le vouloir, les « mages » rendaient un grand service aux scribes car ils leurs apportaient une bonne nouvelle. C’était un service réciproque. Ainsi en est-il des « païens » d’aujourd’hui qui viennent nous interroger. Ils nous aident nous-aussi dans notre cheminement vers Dieu, dans la mesure où nous acceptons de bouger, de nous déplacer, de nous remettre en route.

Plier le genou et adorer

En tout cas, les « mages » sont allés jusqu’au bout de leur démarche : éclairés par la Parole de Dieu, ils ont retrouvé leur étoile, se sont remis en route et sont parvenus jusqu’à la grotte de Bethléem. A Bethléem leur étoile s’est arrêtée car en Jésus nous avons la révélation plénière et définitive. En rencontrant Jésus, ils éprouvent une joie profonde.

A un certain moment, notre recherche de la vérité doit pour ainsi dire s’arrêter, dans le sens où nous sommes appelés, spirituellement parlant, à plier le genou devant la vérité découverte. Les mages se prosternent et adorent. Et pourtant, il s’agit d’un nouveau-né. Ils ont trouvé une autre forme de royauté que celle d’Hérode, la royauté de l’amour. Jésus n’est pas une vérité relative mais LA vérité et la vérité est l’Amour qui se fait chair. Une fois que nous le découvrons, nous devons lui faire hommage de notre intelligence et de notre volonté. Nous sommes invités à lui soumettre notre volonté et à nous en remettre totalement à lui en le reconnaissant comme notre roi, notre Seigneur, notre rédempteur (l’or pour le roi ; l’encens pour Dieu ; la myrrhe pour le serviteur souffrant).

Marie a accueilli les mages et leur a donné son fils à adorer. Elle s’est en quelque sorte effacée pour que toute l’adoration soit adressée à son fils. Si Marie a enfanté Jésus, ce n’est pas pour elle d’abord mais pour l’humanité entière.

En même temps, en accueillant la salutation d’Élisabeth, la visite des bergers puis celle des mages, Marie reçoit aussi de multiples confirmations dans son propre chemin de foi.

Que Marie nous aide à accueillir les demandes de ceux qui recherchent Jésus, à les guider vers Jésus et, ce faisant, à nous-mêmes progresser dans la foi,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Isaïe 60,1-6.
  • Psaume 72(71),1-2.7-8.10-11.12-13.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Éphésiens 3,2-3a.5-6.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 2,1-12 :

Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand. Or, voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile à l’orient et nous sommes venus nous prosterner devant lui. »
En apprenant cela, le roi Hérode fut bouleversé, et tout Jérusalem avec lui.
Il réunit tous les grands prêtres et les scribes du peuple, pour leur demander où devait naître le Christ.
Ils lui répondirent : « À Bethléem en Judée, car voici ce qui est écrit par le prophète :
‘Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n’es certes pas le dernier parmi les chefs-lieux de Juda, car de toi sortira un chef, qui sera le berger de mon peuple Israël.’ »

Alors Hérode convoqua les mages en secret pour leur faire préciser à quelle date l’étoile était apparue ; puis il les envoya à Bethléem, en leur disant : « Allez vous renseigner avec précision sur l’enfant. Et quand vous l’aurez trouvé, venez me l’annoncer pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui. »
Après avoir entendu le roi, ils partirent. Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient les précédait, jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit où se trouvait l’enfant.

Quand ils virent l’étoile, ils se réjouirent d’une très grande joie.
Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe.
Mais, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.