De très jolis voyages… qui ne nous coûteront pas cher !

Histoire d’un petit enfant malade qui a rencontré le Père Lamy

Voici le témoignage de deux sœurs qui avaient leur neveu à élever suite au décès de sa mère.

L’histoire relate la rencontre entre le Père Lamy et le petit garçon dans les étapes de sa maladie, jusqu’à son retour vers le Seigneur dans la sérénité, guidé par la Vierge Marie :


C’est en septembre 1925 que nous entendîmes parler pour la première fois du Père Lamy : une employée de chemin de fer du Nord, qui avait fait le pèlerinage de Notre-Dame des Bois au mois de juin précédent, nous raconta qu’elle avait demandé au Père de prier pour la guérison de ses douleurs. Celui-ci avait répondu qu’elle souffrirait beaucoup, mais que dans deux ans elle serait guérie.

Émue par ce récit, ma sœur s’informa s’il serait indiscret de demander à voir ce saint prêtre pour solliciter la bénédiction de la très sainte Vierge sur un jeune neveu que nous avions à la maison. Sa mère, morte depuis deux ans, nous avait confié l’enfant, et son père nous avait laissé toute liberté pour l’élever chrétiennement. […] La très sainte Vierge avait vu la sincérité de notre désir. Elle arrangea si bien les choses que, le 20 décembre, ma sœur put conduire petit Louis rue Denfert, où le Père Lamy,les reçut et donna à l’enfant la bénédiction tant désirée.

C’est ici que, pour nous, se place un fait merveilleux. La bénédiction avait été reçue le 20 décembre et aussitôt l’enfant, bien portant jusque là, fut pris soudain d’une grippe, ce qui n’avait rien de surprenant par cette saison, Le médecin, appelé le 23 décembre, ordonna un petit repos mais ajouta que le samedi 26 petit Louis pourrait retourner à l’école et y passer le dernier jour de l’année scolaire.

Le 25 décembre, l’enfant, se trouvant bien, assista heureux et content à la grand’messe et aux vêpres de Noël, très fier de tenir la mitre de Mgr Henry, qui officiait. Les cérémonies termi­nées, l’abbé P. lui dit : « Remonte chez tes tantes. Tu dois en avoir assez pour aujourd’hui ». Le 26, il n’alla pas à l’école, et, le dimanche 27, seulement à la messe de onze heures. Le 28 il était fatigué de nouveau. Le docteur fut appelé, qui interdit à petit Louis le séjour qu’il devait faire chez son père à Noisy pendant les vacances du premier de l’an. Une congestion se déclara et, durant tout le mois de janvier et une partie de février, l’enfant dut garder le lit ou la chambre. Que de prières il adressa à Notre-Dame pour sa propre guérison, pour sa famille, pour les pécheurs, pour la meute de louveteaux à laquelle il appartenait et pour l’abbé qui la dirigeait ! Il endu­rait les cataplasmes et tous remèdes pour ceux qui ne connais­sent pas le petit Jésus, « et, disait-il, il y en a beaucoup ! »

Le 14 février 1926, comme il semblait assez bien remis, voulant lui faire un grand plaisir, nous le menons rue Denfert pour une seconde visite. Justement c’étaient les Quarante Heures à la chapelle de l’Infirmerie Marie-Thérèse.

Le Père Lamy nous reçut, de même que la première fois, avec sa grande bonté et son aimable sourire. Comme plusieurs personnes se trouvaient là et qu’il n’y avait pas assez de chaises pour toutes, petit Louis s’assit sur le prie-Dieu du Père, juste en face de lui. L’enfant lui dit : « Je voudrais voir la sainte Vierge et savoir comment Elle est ». Il répondit en le tenant par le cou : « Nous lui demanderons tous les deux ». Et conti­nuant : « La très sainte Vierge n’est pas très grande, un peu plus grande que toi. Elle a de très jolies mains, un peu plus grandes que les tiennes, une belle robe bleue, un joli voile blanc, puis, au-dessus de sa tête, une jolie couronne de lis, de roses et de marguerites ».

Le regard de petit Louis ne le quittait pas et il semblait jouir de la vue de tout ce que lui disait le Père, Plusieurs personnes qui se trouvaient la parlaient de Notre Dame des Bois, de sa chapelle et de sa cloche, du petit âne du père et de sa voiture, ce qui charmait l’enfant, qui désirait tout voir. Sa marraine dit : « Petit Louis voudrait aller à Notre Dame des Bois et voir le petit âne ». « Et bien, répondit le Père, il ira là bas. » Puis, se tournant vers l’enfant et se penchant vers lui en souriant, il ajouta d’une voix grave : « Nous irons cueillir la violette, le coucou, le muguet, la reine des bois, toutes les fleurs printanières,….et puis …..(ceci dit très lentement), Nous ferons de très jolis voyages et des voyages qui ne nous coûteront pas cher ».
Ces paroles furent dîtes avec un accent que l’on ne peut rendre au milieu d’un silence que personne n’osait rompre. Dès cet instant elles restèrent gravées dans notre mémoire imprimées avec tout le pressentiment qu’elles comportaient.

Après une promesse de se revoir et une dernière bénédic­tion, nous reprîmes le chemin de la maison. Le soir, avant de s’endormir, Louis dit a l’aînée de ses tantes : « Marraine, aujourd’hui j’ai été bien, juste chez le Père ». Et immédiatement après, les espérances de guérison dispa­rurent. Puis, mi-février, il fallut rappeler le docteur pour de forts maux de tête, et le docteur ne nous cacha pas combien la situation de l’enfant devenait critique. Craignant une méningite tuberculeuse, il demanda une contre visite. Celle-ci eut lieu le 18 février, mais auparavant, le 17, qui était le mercredi des Cendres, l’enfant en s’éveillant avait demandé à sa marraine :
— « Quand est-ce qu’on met les petites poussières ? »
— « Quelles poussières, mon chéri ? » (Elle crut qu’il délirait)
— « Tu sais bien, sur le front »
— « Mais c’est aujourd’hui. »
— « Alors tu ne vas pas à la messe ? »
— « Mais si, j’y vais tout de suite. »

En sortant de l’église, elle alla trouver l’abbé P., qui était venu souvent voir petit Louis depuis qu’il était alité. Il avait vu l’enfant quelques jours auparavant et, bien que navré des nouvelles que lui donna ma sœur, il ne pouvait y croire. Elle lui répéta la question de l’enfant au sujet des cendres et elle ajouta :
« Vous savez, M. l’Abbé, qu’il nous avait réclamé de lui-même le petit Jésus. Je crois qu’il ne faudrait pas tarder ».
— « Les choses en sont déjà à ce point ? »
— « Oh ! je ne dis pas aujourd’hui, mais demain si vous voulez bien. »
— « Je vais monter le voir et c’est entendu pour demain. »

Quelques instants après, l’abbé arrivait et nous disait :
— « Il n’aura pas peur ? »
— « Oh non, M, l’Abbé, répondit ma sœur ; il nous a dit plusieurs fois : Cela ne me ferait rien de mourir, parce que j’irais au Ciel, je verrais la sainte Vierge, Mémère Ina (sa mère), et je jouerais avec le petit Jésus. »

A la vue de l’abbé, petit Louis fut ravi comme il l’était toujours à chacune de ses visites et il reçut les cendres avec joie. En sortant, l’abbé nous dit non sans émotion : « Je comprends votre peine. A cet âge (dix ans) ! Il est charmant, mais… mais… il est si pur ! » Nous comprîmes que le bon Dieu le voulait et qu’il fallait faire ce sacrifice, si dur qu’il fût.

L’enfant gardait jour et nuit sur sa tête l’image de Notre-Dame des Bois que lui avait donnée le Père Lamy lors de sa première visite, et il invoquait fréquemment cette bonne Mère.

Le 18 février, il reçut avec joie la Sainte Communion. Dans la journée, notre curé vint le voir et remit à petit Louis un Christ de mission, qu’il prit avec ferveur, qu’il embrassa et qu’il posa sur son cœur. M. le Curé fut touché.

Le soir de ce même jour eut lieu la consultation des doc­teurs dont le diagnostic confirma celui du médecin traitant. Ils décidèrent de faire une ponction pour savoir s’il s’agissait bien de tuberculose et elle fut faite le 21 février.

C’est ici que l’on peut juger de l’esprit de sacrifice de l’enfant. Au premier cri qu’il jeta, sa marraine lui dit : « Oh ! petit Louis, comme M. l’Abbé va recevoir une grande grâce aujourd’hui ! » Alors, ce fut un silence complet et l’opération se continua sans autre incident, puisque son abbé et le petit Jésus seraient contents.

La journée se passa aussi bien que possible. Son père, ses frères et sœurs, tous venus le voir, purent croire à un mieux sensible, mais le soir à huit heures commença l’agonie. Il eut, jusqu’à minuit, un délire intense, qui se manifestait surtout par des gestes empreints de religion : encensements, bénédiction. Puis, tout d’un coup, un mouvement brusque le fit se retour­ner ; il leva son regard vers une image de la Sainte Vierge placée en face de son lit ; il la regarda comme dans une extase et le calme se fit. Cependant il endurait des souffrances atroces et la paralysie le gagnait. Il perdit l’usage de la parole et ne rouvrit plus les yeux pendant quatre jours. Les moments où il semblait revivre étaient ceux où il sentait la présence de l’abbé près de lui. Il nous avait dit quelques jours avant : « J’aime quand M. l’Abbé vient, parce qu’il me fait de petites croix sur le front et je suis bien ».

Enfin, la dernière nuit, il reconnut son père et, sans le voir, lui passa les bras autour du cou ; mais, malgré la douceur qu’il en ressentait, ce pauvre père les lui retira doucement en disant : « C’est bon les caresses, mais il n’en faut pas trop ». Alors, il resta tranquille.

Il eut sa connaissance jusqu’à la dernière minute. Le matin, il comprit l’abbé qui lui récita la prière de promesse du louveteau ; une larme coula sur sa joue. Au docteur qui lui demandait s’il souffrait toujours, il fit non de la tête.

A un heure moins vingt, le jour de la fête des Saints Clous et de la Sainte Lance, Louis partit pour le Ciel. Le petit Jésus l’y avait appelé. C’était le 26 février 1926. Maintenant il prie pour son père et pour nous.

Quelques jours après, à une personne qui le connaissait bien et qui lui parlait de petit Louis, le Père Lamy répondit : « Il est dans le parterre de la très sainte Vierge ».

Lors d’une visite de ses tantes à l’Infirmerie Marie-Thérèse, l’une d’elles dit au Père Lamy : « Lui qui voulait tant voir la sainte Vierge ! » « Il la voit, répondit-il, et il n’en est pas privé. »

Une autre fois, Mlle C. dit encore au Père Lamy :
— « Lui qui aurait tant aimé dire la messe, il doit la dire au Ciel ? »
— « Non, répliqua le Père. Au Ciel, on ne dit plus la messe. Il est.., il est avec le chœur des anges. Il chante le cantique nouveau et, il suit l’Agneau. Petit Louis était pieux ; il avait quelque chose d’angélique. »