Homélie du 23e dimanche du Temps Ordinaire

22 septembre 2017

« S’il t’écoute, tu as gagné ton frère »

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Texte de l’homélie :

Frères et sœurs bien-aimés,

Il est bon de le restituer cet évangile que nous venons de lire à l’intérieur même du contexte dans lequel il a été prononcé.
Nous sommes au chapitre 18 de Saint-Mathieu, juste avant, dans les chapitres 14 à 16, il y a eu tout ce qui est la formation de l’Église, dans le chapitre 17 la Transfiguration, et là dans ce chapitre 18 il s’agit de comment vivre en Église, comment vivre en communauté.
Ce début du chapitre 18 commence mal avec les apôtres qui se disputent pour savoir qui est le plus grand.
Dans ce chapitre, le Seigneur parle à deux reprises du pardon.
Le fait de vivre en communauté de croyants qu’on appelle l’Église, mais aussi de vivre en communauté familiale, paroissiale, en communauté de travail, ne va pas de soi.

À travers cet Évangile nous allons méditer sur ce qu’est le pardon et la réconciliation.
Ce sont deux choses différentes.

Le Seigneur prend ici l’exemple d’une correction fraternelle :

« Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère. S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins. S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain. »

Dans la réconciliation il faut que l’autre reconnaisse ses torts. Cela n’est pas si simple de reconnaître ses propres torts.
Cette semaine j’ai eu cette expérience d’une personne qui rationalisait, c’est à dire qui se donnait des raisons d’agir dans une dureté de cœur, d’être injuste.
Ici c’est la même chose, on demande à cet homme de pardonner à son frère, mais il s’entête et certainement il donnera des raisons tout à fait valables pour ne pas pardonner.

La réconciliation suppose d’être au minimum 2 personnes, que l’une des personnes se sente agresseur et l’autre se découvre aussi agressée.
La réconciliation va permettre à l’agresseur et à l’agressé de dire qu’il ne veulent pas que le mal ait le dernier mot dans leur relation, mais que l’amour et la confiance circule à nouveau entre eux. Je te demande pardon et j’ai besoin aussi d’entendre que tu me pardonnes.

Certaines personnes ne reconnaissent pas qu’elles ont été agressés, c’est alors compliqué de pardonner et d’être pardonné.
C’est un acte d’humilité, tant de demander pardon, que de recevoir cette demande de pardon et de le donner.

Il y a des rituels de pardon.
On pense bien sûr au sacrement de la réconciliation, mais c’est important que dans des couples, en famille, il y ait un petit rituel de pardon quand on s’est offensé. Parfois nous avons besoin d’entendre « je te demande pardon » et non pas « je m’excuse ».
Dans « je m’excuse » l’autre n’existe pas.
Dans la foi catholique nous avons cette grâce du sacrement de la réconciliation qui fait qu’on verbalise, on dit ses péchés et on reçoit le pardon par la bouche du prêtre.

Mais cette question n’est pas toujours si simple. Le pardon, la réconciliation, ne sont pas toujours au rendez-vous à cause de notre dureté de cœur. Il y a aussi des pardons très durs à donner pour des actes qui bouleversent la vie entière.

Mais si la réconciliation n’est pas possible, le pardon est toujours possible. Le pardon est plus une démarche personnelle .
Même si l’autre n’a pas reconnu ses torts, je sens que j’ai pardonné grâce à 2 critères :

  • lorsque je pense à l’autre paisiblement. Quand la pensée où l’idée de l’autre me vient, je n’ai pas tout de suite un océan de violence qui se déchaîne en moi.
  • lorsque je me réjouis du bien qu’il lui arrive et je m’attriste du mal qui l’afflige.

C’est bien aussi de prendre conscience que si Jésus, dans la 5e demande du Notre Père, demande de pardonner nos péché comme nous pardonnons aussi, il faut reconnaître une certaine limite dans le pardon.
Ces actes de pardon son des signes avant-coureurs de cette grande réconciliation où Dieu sera tout en tous.

C’est pour cela que le Seigneur nous invite à prier. Il faut renoncer à une relation parfaite entre les hommes, à une perfection dans l’amour, surtout quand on a été blessé. Mais ce n’est pas parce que le pardon n’est pas parfait que je n’ai pas à me mettre en route. Ce n’est pas parce que la confiance n’est pas tout de suite au rendez-vous que je n’ai pas non plus à entamer cette démarche et à changer mon cœur.
C’est à la fois une urgence et à la fois cela nous demande de rester dans une grande humilité. Même si après des pardons qu’on s’était donnés reviennent parfois la dureté de cœur, le désir de violence face à une personne qui m’a blessé, qui a peut-être cassé ma réputation… à ce moment là on demande pardon au Seigneur et on essaie de se remettre en route.

Mais ce n’est pas parce que ce n’est pas un pardon parfait, qu’il ne faut pas le donner.
Il peut y avoir une forme de tentation de découragement qui bloque notre mise en route. C’est important de se mettre en route, même si je sais que la communion avec cette personne ne sera peut-être pas au rendez-vous. Il y a des personnes toxiques aussi, desquelles il ne faut pas s’approcher. Il y a des personnes qui nous font du mal, qui cassent la relation, avec qui la relation est très compliquée. À ce moment là on s’humilie devant le Seigneur en lui disant qu’on souhaite être bienveillant, que je veux du bien à cette personne et non du mal, ce qui est déjà un premier pas basique comme chrétien.

Dimanche prochain le Seigneur nous demandera de remettre 70 fois 7 fois, ce sera encore quelque chose d’important dans l’enseignement de la manière de vivre en Église. C’est à cela qu’on reconnaît que nous sommes disciples de Jésus, c’est à la capacité de pardonner, c’est vraiment un signe très fort d’appartenance au Christ.

Demandons au Seigneur qu’il nous aide, c’est d’abord en contemplant l’humilité du Seigneur sur l’autel que l’on peut aussi rentrer dans cette démarche d’humilité et de demander au Seigneur qu’il change notre cœur de pierre en cœur de chair.

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Ézéchiel 33,7-9.
  • Psaume 95(94),1-2.6-7ab.7d-8a.9.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 13,8-10.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 18,15-20 :

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
« Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul.
S’il t’écoute, tu as gagné ton frère.
S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins.
S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain.

Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel.
Et pareillement, amen, je vous le dis, si deux d’entre vous sur la terre se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, ils l’obtiendront de mon Père qui est aux cieux.
En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. »