Homélie du Baptême de Jésus

12 janvier 2015

Il y eut une voix venant des cieux : « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. »

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Texte de l’homélie :

Frères et sœurs bien-aimés,

Que signifie le baptême de Jésus ?

En fait, il n’y a pas une mais plusieurs significations. Ces significations ne s’excluent pas mais bien au contraire elles se complètent. J’en retiendrai trois : le baptême comme manifestation de la divinité de Jésus ; le baptême comme une sorte d’intronisation ou ordination de sa vie publique ; le baptême comme anticipation de la mort et de la résurrection du Christ.

Le baptême comme la manifestation de la divinité de Jésus

Dans le prolongement de l’Épiphanie, la fête de la manifestation du Seigneur, nous pouvons voir le baptême comme un lieu où nous est révélée la divinité de Jésus. Jusqu’ici Jésus a vécu une vie cachée où l’on a pu voir qu’il était vraiment homme : il a été conçu dans le sein d’une femme ; il est né ; il a appris à parler, à marcher, à exercer son métier, …
Lors du baptême, une voix venue du ciel déclare qu’il est « le Fils bien-aimé ». Dès sa conception dans le sein de Marie, Jésus est le fils bien-aimé du Père mais cela devient public au moment du baptême.

Pour certaines hérésies, il est difficile de concevoir que Dieu ait pu être vrai homme. Selon elles, Jésus n’était qu’un homme jusqu’au moment du baptême. C’est à ce moment qu’il a en quelque sorte revêtu la divinité. De la même façon, elles ne peuvent pas concevoir que le Fils de Dieu ait pu mourir sur la croix.
Pour ces hérésies, le Fils de Dieu a abandonné sa dépouille humaine avant les souffrances et la mort de la croix qui n’étaient pas dignes de lui.

Dans le prolongement de Noël, nous pouvons continuer à nous émerveiller du fait que le Fils de Dieu se soit fait vrai homme avec toutes les limites et la possibilité de souffrir que cela comporte. S’il l’a fait, c’est parce qu’il nous aime vraiment !

Le baptême comme inauguration de sa vie publique

Une deuxième signification consiste à voir dans le baptême une sorte d’intronisation. Avec le baptême s’ouvre la vie publique du Christ. De fait les premiers récits de la vie du Christ commençaient par le moment du baptême (Évangile de Marc que nous avons lu). Saint Pierre, dans le discours qu’il fait dans les Actes (Ac 10, 34-38) fait du baptême de Jésus le début de son histoire. Lors du baptême, Jésus est oint d’Esprit et de puissance pour accomplir sa mission.

Jésus voit l’Esprit descendre sur lui comme une colombe : c’était justement la principale caractéristique du Messie attendu que d’être rempli de l’Esprit même de Dieu ; le prophète Isaïe, par exemple, avait parlé à plusieurs reprises du Messie sur qui reposerait l’Esprit :

« Sur lui reposera l’Esprit du Seigneur : esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de vaillance, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur. » (Is 11, 2).

Et la vocation de ce messie, c’est encore Isaïe qui la décrit :

« L’Esprit du Seigneur Dieu est sur moi : le Seigneur, en effet a fait de moi un messie, il m’a envoyé porter joyeux message aux humiliés, panser ceux qui ont le cœur brisé, procurer aux captifs l’évasion, aux prisonniers l’éblouissement… » (Is 61, 1).

À travers cela, on voit combien la présence de l’Esprit-Saint est importante pour accomplir une mission.

Le baptême comme anticipation de la mort et de la résurrection du Christ

Une troisième signification consiste à voir dans le baptême une anticipation de la mort et de la résurrection du Christ.
Le baptême est un abaissement supplémentaire : non seulement le Verbe de Dieu s’est fait homme mais, comme s’il descendait une marche de plus, il s’est mis au rang des pécheurs. Jésus se fait solidaire non pas seulement de l’homme en général mais de l’homme pécheur pour le délivrer de son péché. Bien sûr, le Christ n’a pas péché mais il a accepté d’en porter les conséquences sur lui. En introduisant la vie publique de Jésus, le baptême annonce déjà le terme de la vie de Jésus sur terre : sa mort sur la Croix et la résurrection.

Dans l’évangile de saint Matthieu, Jean-Baptiste résiste en quelque sorte à Jésus qui vient se faire baptiser :

« C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! », mais Jésus lui répond : « Laisse faire pour le moment, car il convient que nous accomplissions ainsi toute justice. » (Mt 3, 14-15)

Dans cette réponse de Jésus, nous pouvons déjà entrevoir quelque chose de la justice de Dieu qui vient payer pour les coupables.
Dans le baptême, il y a une anticipation de la Croix.

« Le baptême est l’acceptation de la mort pour les péchés de l’humanité, et la voix qui se manifeste au baptême – ’celui-ci est mon Fils bien-aimé’ (Mt 3, 17) – est une anticipation de la résurrection »
(Benoît XVI, Jésus de Nazareth, p 38).

C’est pourquoi dans les discours de Jésus lui-même, le mot baptême désigne sa mort (cf. Mc 10, 38 ; Lc 12, 50).
L’Église d’Orient, dans sa liturgie et sa théologie, établit un rapport étroit entre le baptême du Seigneur et la mort et la résurrection du Christ. L’iconographie reprend ces correspondances. L’icône du baptême de Jésus représente l’eau comme un tombeau liquide ayant la forme d’une grotte sombre qui représente les enfers.
Puis le ciel s’ouvre au dessus de Jésus.

De même, au moment de la mort de Jésus, le rideau du temple – sur lequel était représentée la voûte céleste – s’est déchiré précisément parce que la mort de Jésus nous a ouvert de nouveau le Ciel. La communication entre le ciel et la terre se rétablit. La communion entre le ciel et la terre, entre Dieu et l’homme, est restaurée. Le ciel s’était fermé par le péché d’Adam ; aujourd’hui il s’ouvre à nouveau par l’obéissance du Christ.

Conclusion

Le baptême du Christ est donc tout à la fois l’incroyable humilité et charité du Christ venu se mettre au rang des pécheurs. Mais par ailleurs, s’il n’était qu’un homme, il ne pourrait pas nous libérer de l’emprise du péché. La bonne nouvelle du baptême, c’est que le Christ est Dieu. Aujourd’hui nous est manifestée la divinité du Christ, attestée par l’Esprit-Saint et le Père.

Dans chaque fête que nous célébrons, nous ne sommes pas appelés à rester comme des spectateurs mais à entrer vraiment dans le mystère. Par le baptême, la grâce d’un profond renouveau nous est offerte en Jésus. C’est en entrant dans le baptême de Jésus que le Ciel nous est ouvert.
Vous avez remarqué que le Ciel s’ouvre après que le Christ ait été baptisé, après qu’il soit descendu dans les eaux du Jourdain. Le Ciel s’ouvre pour nous aussi à condition que nous passions par les larmes du repentir et de la contrition, à condition que nous reconnaissions humblement notre péché.
Ce Baptême du Seigneur qui annonce sa mort et sa résurrection est déjà une annonce de la victoire.

Et en ces jours très sombres où l’on voit des attentats qui font beaucoup de morts innocents, en France, mais aussi dans beaucoup de pays du monde où les hommes sont martyrisés pour leur foi, nous pouvons regarder le Christ qui veut nous faire passer de la mort à la vie.
Demandons à Marie de nous accompagner. On a besoin d’une mère, particulièrement dans les moments difficiles, eh bien qu’elle nous conduise justement de la mort à la vie.

Amen.


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Isaïe 55,1-11.
  • Livre d’Isaïe 12,2.4bcd.5-6.
  • Première lettre de saint Jean 5,1-9.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Marc 1,7-11 :

En ce temps-là, Jean le Baptiste proclamait :
« Voici venir derrière moi celui qui est plus fort que moi ; je ne suis pas digne de m’abaisser pour défaire la courroie de ses sandales.
Moi, je vous ai baptisés avec de l’eau ; lui vous baptisera dans l’Esprit Saint. »

En ces jours-là, Jésus vint de Nazareth, ville de Galilée, et il fut baptisé par Jean dans le Jourdain.
Et aussitôt, en remontant de l’eau, il vit les cieux se déchirer et l’Esprit descendre sur lui comme une colombe.
Il y eut une voix venant des cieux : « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. »