Homélie de la fête de la divine miséricorde

3 avril 2008

« Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »

Il n’y a pas d’enregistrement pour cette homélie, veuillez nous en excuser…

Texte de l’homélie :

Chers frères et sœurs,

Au terme d’une semaine qui nous a fait revivre les apparitions du ressuscité à quelques femmes et disciples, l’Église nous présente aujourd’hui l’apôtre Thomas, l’absent de ce premier soir de Pâques, celui qui ne s’en laisse pas conter, « le réaliste » auquel, parfois, on aime à s’identifier.

Un homme moderne

En méditant ce récit de Saint Jean, j’ai d’abord pensé à l’émouvante conviction avec laquelle, dès son retour, ses amis ont aidé Thomas à rattraper sa malchance, lui contant l’événement jusque dans ses moindres détails. Étonnamment aujourd’hui, Thomas à la tête dure ! Il lui faut des preuves concrètes bien à lui : non seulement il veut voir, mais encore toucher, palper, mettre son doigt là où étaient les clous, introduire sa main jusque dans la plaie du côté percé par la lance…
Ah, comme il nous ressemble ce Thomas qui ne croit qu’à ce qu’il touche, qui exige de voir, qui a peur de se laisser duper et qui se veut sans illusion.
Car n’est-il pas vrai, Frères et sœurs que pour beaucoup, la foi est bien faible et la vie chrétienne médiocre. D’aucun ne s’est-il pas surpris lui-même à rêver parfois d’une vie spirituelle plus enthousiaste, plus vivante, tout en sachant bien aussi que, comme Thomas, il n’y aura pas de choc décisif si rien ne vient répondre à son besoin de réel et son appétit de voir et toucher le divin.
Oui, frères et sœurs, c’est bien cela, et nous en sommes tous convaincus au fond de nos cœurs : qui peut vaincre tant de résistance humaine, sinon Dieu et lui seul ! Et comment Dieu peut-il s’y prendre ? Saint Jean nous en donne ici, justement, quelques réponses.

La manière divine d’agir

Face à l’homme : la Divine Miséricorde…
Aucun reproche. Au contraire, mettant ses mains et son côté à sa disposition, Jésus montre à Thomas qu’il comprend ses exigences. Voilà, l’extrême bonté divine : ne pas contrarier, se rendre docile à l’humaine volonté, afin d’emmener celle-ci bien au-delà d’elle-même… Et c’est alors que se produit le miracle.
Ébloui par la fente vivante des clous et de la lance, Thomas est soudainement convaincu de tout l’amour dont il est aimé, lui personnellement. Et tandis qu’il est conduit bien plus loin qu’il ne l’avait imaginé, le voici dans une joie autrement plus profonde, « indicible et pleine de gloire »comme l’écrit St Pierre, jaillissante du regard intérieur, béatitude de la foi qui pénètre les mystères de Dieu pour en faire découvrir « La Largeur, la Hauteur et la Profondeur ».
Alors, Thomas, réconcilié, s’effondre en pleurant : « Mon Seigneur et mon Dieu ».
Cri de foi d’un homme pour qui le toucher est devenu inutile. Oui, mais le plus sublime encore, frères, c’est que ce cri professe le Dieu trois Saint… l’Invisible devenu visible en notre chair.
Acte de foi sans doute le plus magnifique de tout l’Évangile, parce que le plus explicite en la divinité de Jésus de Nazareth. Et c’est pourquoi, depuis ce jour et durant 2000 ans, cette profession résonnera dans l’Église de tous les siècles comme l’ultime point d’orgue de la Révélation divine.

Le chemin de notre foi

Croyants et incroyants, ne sommes-nous pas tous ensemble dans cet évangile mouvementé ? Comme il nous faudrait que l’incrédulité de Thomas nous soit, en quelque sorte profitable !
Pour nous qui sommes parfois, ou malheureux de ne pas croire ou de croire insuffisamment ; pour nous qui sommes parfois tentés de jouer « aux enfants gâtés » avec Dieu, de lui demander des preuves, de se soumettre à nos vérifications et contrôles… de se faire voir, entendre et toucher…
Ah, Frères et sœurs, si en ce dimanche de la Miséricorde, nous pouvions, enfin, faire disparaître nos doutes, nous convaincre que c’est lui, le Christ et que c’est nous, les hommes d’aujourd’hui, qu’il a tant aimés et qu’Il aime toujours ! Mais surtout, si nous pouvions une bonne fois pour toute comprendre ce que veut dire :

« Heureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jean.20,29)

Il nous serait alors possible d’éviter la déconvenue, pire la grande douleur de Thomas, l’amère regret d’avoir résisté et de ne pas avoir fait confiance au Seigneur. Oui, Frères, comme il faudrait que notre rassemblement hebdomadaire autour de l’autel, autour du Christ mort et ressuscité, fortifie notre Foi et notre Espérance et nous libère enfin de notre incrédulité, de notre entêtement, de nos exigences…
Et comme il sera beau, alors, ce cadeau que nous ferons à Dieu, le seul qui lui plaise : croire en Lui avant même de l’avoir vu !

Un message d’espérance pour nous et notre monde

Et quel monde ! Des Thomas de toutes sortes, sceptiques, sensibles aux seules preuves scientifiques ; mal-croyants dans le brouillard du doute après avoir reçu une vague catéchèse ; chercheurs de tout genre souvent déçus par le spectacle d’une Église jugée peu crédible.
Faut-il désespérer pour tous ces Thomas d’un monde en plein désarroi ?
Le Christ est ressuscité. De nouvelles surprises peuvent toujours jaillir de son cœur transpercé et de ses mains ouvertes pour nous. À l’heure qu’il aura choisie, ne fera-t-il pas signe en personne, lui qui attendit une semaine pour retrouver Thomas au contour de son incroyance et lui révéler toute la réalité de Sa présence et de Son Amour.

C’est pourquoi, frères et sœurs, il nous faut croire que le Christ tient en réserve pour eux comme pour nous, le cadeau d’une grâce qui finira par révéler son visage miséricordieux. Aussi avons-nous toutes les raisons de faire confiance en la puissance d’un amour qui ne peut oublier personne, mais attend chacun pour l’inviter à ressusciter ! Même et surtout les Thomas de notre temps.

Frères et sœurs, tels sont les fruits que nous devons cueillir sur l’arbre de la Pâque, en cette fête de la Miséricorde, aujourd’hui plus que jamais.

Conclusion

« De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. »

Une chose est certaine, c’est qu’il n’y a pas de grâce donnée qui ne soit accompagnée d’une mission. Dans l’évangile de ce jour, cette mission c’est d’être envoyé.
Qu’est-ce à dire ? Que vous et moi, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, « je » suis envoyé par le Père. Cela veut dire que lorsque « je » rencontre quelqu’un dans mon travail, dans ma rue, dans ma maison, « je » suis envoyé, en Son Nom et pour Son compte, comme Jésus lui même était envoyé par le Père.
Qu’est-ce que je dis de Jésus à mon frère, à ma sœur ? Qu’est-ce que mes gestes, mes paroles, mes attitudes disent de ce Dieu-Miséricorde à mon entourage et au monde ?

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre des Actes des Apôtres 2,42-47.
  • Psaume 118(117),2-4.13-15ab.22-24.
  • Première lettre de saint Pierre Apôtre 1,3-9.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 20,19-31 :

C’était après la mort de Jésus. Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! »
Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur.
Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. »
Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. »

Or, l’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu.
Les autres disciples lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ! »
Mais il leur déclara : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! »

Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient verrouillées, et il était là au milieu d’eux. Il dit : « La paix soit avec vous ! »
Puis il dit à Thomas :
— « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »
Alors Thomas lui dit :
— « Mon Seigneur et mon Dieu ! »
Jésus lui dit :
— « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »

Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.