Marie et Joseph, pèlerins d’espérance

Enseignement donné pour les Equipes Notre-Dame

Le sacrement est un signe accompagné d’une parole dans lequel Dieu manifeste Sa présence à une personne. Or, il y a une particularité avec le sacrement de mariage, car il est le seul que l’on reçoit à deux. Cela suppose un déplacement pour accueillir l’autre qui vient à ma rencontre et réaliser la promesse que Dieu a faite à chacun et me pousse à me donner à lui, à elle.

Par les débuts de leur vie conjugale, Marie et Joseph nous montrent cet amour et cette confiance dans le Seigneur et nous invitent à faire mémoire de notre sacrement de mariage. Nous sommes appelés à considérer notre lien conjugal comme un lieu de mission.

Conférence donnée lors du rassemblement END province Nord Est Ile de France.

Père Pierre-Marie

Père Pierre-Marie nous explique combien il est nécessaire de prendre en compte ce mouvement intérieur pour accueillir l’autre et de le considérer comme différent de soi-même pour le rejoindre au mieux à travers les engagements, les âges de la vie et ce que la vie de parent fait expérimenter.
La parole des couples à ce sujet est attendue car beaucoup voudraient vivre cette saveur et ce goût de la vie conjugale qui vient de l’Esprit-Saint, par la Sainte Trinité.

L’enseignement se base sur le texte écrit par sœur Marie-Anne LEROUX, Bénédictine au monastère de Saint-Thierry.

Titre : Les déplacements de la Sainte Famille : la volonté de Dieu par les songes.

De Nazareth à Bethléem : Les « mauvais moments » et le dessein de Dieu

« En ces jours-là, parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre […] Joseph, lui aussi, monta de Galilée, depuis la ville de Nazareth, vers la Judée, jusqu’à la ville de David appelée Bethléem. Il était en effet de la maison et de la lignée de David. Il venait se faire recenser avec Marie, qui lui avait été accordée en mariage et qui était enceinte. » (Luc 2, 1-5)

Ce récit, lu chaque année dans la nuit de Noël, situe la naissance de Jésus au moment d’un recensement. Cet édit ordonné par l’empereur oblige Joseph et Marie à parcourir environ 145 kilomètres pour aller de Nazareth à Bethléem.

Or Marie est enceinte et semble proche de son terme. Objectivement, le moment est mal choisi. Alors qu’ils portent, comme en germe, l’espérance d’Israël, on s’attendrait à ce que Dieu leur réserve quelques privilèges afin que le Messie tant attendu naisse dans un cadre protégé. Il n’en est rien. Joseph et Marie reçoivent cet ordre de partir à un moment délicat pour eux et dans des conditions incertaines.

Malgré tout, le texte ne mentionne aucun signe de protestation de la part de Joseph et de Marie. Le calme qui émane de ce silence nous fait comprendre qu’ils accueillent cette contrariété de la vie avec docilité, comme faisant partie du dessein de Dieu ou du moins, n’étant pas contraire à la volonté de Dieu. Cette obéissance aux évènements permet à Dieu de les rendre artisans de Son dessein de salut. En effet, si ce recensement survient au « mauvais moment », c’est pourtant précisément cet évènement qui pousse Joseph et Marie à se rendre à Bethléem. Or Bethléem, la « ville de David », est le lieu de naissance du roi choisi par Dieu. Jésus, descendant de David, doit naître dans cette ville pour accomplir les prophéties et manifester sa filiation royale (cf. Michée 5, 1).

Il est intéressant de regarder comment Joseph et Marie, en restant fidèles à leur devoir et en acceptant l’épreuve, collaborent pleinement au dessein divin. Ils montrent que même les responsabilités ordinaires – comme obéir à un édit ou parcourir un long chemin – peuvent être des lieux où Dieu déploie son œuvre de salut. Ils nous montrent que les évènements qui arrivent au « mauvais moment » ne nous conduisent pas nécessairement sur une mauvaise route. Ils peuvent être porteurs d’une promesse et d’une lumière insoupçonnée. Dieu sait se servir de l’adversité pour faire advenir un bien plus grand que nous ne percevons pas sur le moment.

Ce récit nous aide à poser un regard de foi sur les contrariétés de la vie, notamment celles qui nous semblent imposées de l’extérieur, celles de la « cité des hommes ». Le contexte de ce recensement montre que même les décisions politiques des puissants, Dieu peut s’en servir pour accomplir son dessein. Notre Dieu qui sait tirer un bien de l’adversité.

Pourtant, quand les évènements de la vie nous contrarient, quand ils surgissent au mauvais moment, nous avons tendance à nous braquer, à nous « cambrer », à faire « le dos rond », bref, à râler. C’est normal. C’est le regard de foi qui nous fera adopter une attitude différente, qui nous permettra d’entrer dans l’évènement en y décelant un chemin de vie, un chemin de sanctification, une voie de salut. Cette espérance nous aide à tenir bon.

De Bethléem en Égypte et d’Égypte à Nazareth : Les songes et la Providence divine

« Après leur départ, voici que l’ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph et lui dit : "Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. Reste là-bas jusqu’à ce que je t’avertisse, car Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr."
Joseph se leva ; dans la nuit, il prit l’enfant et sa mère, et se retira en Égypte, où il resta jusqu’à la mort d’Hérode, pour que soit accomplie la parole du Seigneur prononcée par le prophète : d’Égypte, j’ai appelé mon fils. » (Mt 2, 13-15)

Il est intéressant de regarder ce qui guide les protagonistes dans le chapitre 2 de l’évangile de Matthieu. Les mages sont tout d’abord guidés par une étoile qui les mène jusqu’à l’enfant Jésus (v 9), puis c’est un songe qui les avertit et leur enjoint de changer de chemin pour le retour (v 12). Au verset suivant (v 13), c’est également un songe qui avertit Joseph du danger.

Dieu sait guider les hommes par diverses médiations. Ici, c’est un astre puis des songes. Dieu peut ainsi nous faire signe clairement, mais le plus souvent, Il nous conduit par Sa Providence qui Se mêle aux évènements de notre vie ordinaire. Pour marcher sur ce chemin, Il nous revient de désirer faire Sa volonté et d’être dans cette disposition intérieure de docilité aux voies de Dieu. C’est bien le témoignage que nous donnent Joseph et Marie.

Dans cet épisode de la fuite en Égypte, il y a une concordance parfaite entre l’ordre et son exécution : au verset 13, l’ange du Seigneur s’adresse à Joseph en ces termes :

« Lève-toi, prends avec toi l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. »

Au verset 14, nous lisons :

« Il se leva, prit avec lui l’enfant et sa mère, de nuit, et se retira en Égypte. »

Ce sont les mêmes mots, s’y ajoute seulement « de nuit », indiquant une obéissance immédiate.

C’est quand même déconcertant : ils étaient à peine arrivés à Bethléem après un long voyage, qu’il leur faut à nouveau partir pour un autre long voyage. Marie porte tout juste le nouveau-né dans ses bras, et voilà qu’ils doivent, de nuit, partir vers l’Égypte, avec une distance à parcourir entre Bethléem et la frontière égyptienne d’environ 480 kilomètres (au plus court). Selon certaines traditions, la Sainte Famille aurait parcouru environ 1 240 kilomètres à dos d’âne, traversant le Nil dans leur périple. Quelques versets plus loin, à nouveau : l’ange du Seigneur apparaît à Joseph, lui annonce que le danger est passé et qu’ils peuvent rentrer à Nazareth. Matthieu rajoute :

« …pour que soit accomplie la parole dite par les prophètes : Il sera appelé Nazaréen. » (Mt 2, 23)

Le dessein de Dieu a vraiment des lignes de parcours surprenantes ! Mais c’est sans doute parce que Joseph et Marie vivent toutes ces étapes dans la foi qu’il s’en dégage malgré tout un sentiment de sérénité.

Notre vie chrétienne ne nous épargne pas les « vicissitudes de notre pauvre condition humaine » (Si 2, 4), mais la grâce de Dieu nous donne de les vivre avec Lui, sous Sa houlette. Et si Dieu nous guide de multiples manières, c’est le plus souvent de manière ordinaire, par notre vie de foi, en Église. Nous aimerions peut-être certaines fois avoir plus de signes, être guidés par une étoile, par des songes, pour que Dieu nous dise clairement vers où aller. Mais, lorsque Dieu ne dit rien, c’est qu’il nous fait confiance. À nous de discerner et d’avancer.

Se laisser guider par la Providence

Les déplacements de la Sainte Famille sont une belle leçon de Providence divine. Ils nous montrent comment Dieu guide l’histoire, même dans les moments d’incertitude ou d’attente. Par Sa Providence, Dieu agit dans les évènements en prenant en compte les manœuvres des hommes. Cette Providence englobe aussi bien les grands évènements de l’histoire que les circonstances de notre vie d’« ici et maintenant ».

Lorsqu’il nous arrive de dire d’un évènement qu’il a été providentiel, c’est que nous y reconnaissons l’action de Dieu de manière heureuse et inattendue là où d’autres voient l’effet d’un hasard. Pour certains, les exemples abondent, mais ils sont toujours éminemment personnels. Ce qui fait signe pour moi ne fera pas signe pour un autre. C’est un regard de foi qui nous fait voir les évènements de notre vie comme Dieu les voit.

Nous pouvons en dégager la dynamique d’ensemble : il y a d’abord la visée, celle qui nous oriente vers Dieu, qui nous motive à suivre ses chemins. Puis, il y a le cadre et les moyens par lesquels Dieu nous guide sur ce chemin. Ici, la Providence de Dieu joue un rôle déterminant.

Enfin, il y a notre réponse concrète et quotidienne qui s’inscrit dans les réalités de notre vie et qui consiste en premier lieu à accomplir notre devoir d’état.

Ainsi, chacun de nous, en étant fidèle à ses responsabilités quotidiennes, collabore au plan divin.