Voir l’autre comme un don de Dieu permet de garder le premier élan

23 juin 2015

« Ne ralentissez pas votre élan, restez dans la ferveur de l’Esprit, servez le Seigneur. »
Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 12,11

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Texte de l’homélie de mariage :

Chère Anne-Clémence, cher Armand,
Frères et Sœurs bien aimés,

Lors de la préparation au mariage que les fiancés ont faite avec beaucoup d’application, quand il s’est agit de choisir les lectures, je leur ai donné un critère :

Et vous qui avez déjà reçu ce sacrement du mariage, vous pouvez faire mémoire de la Parole que vous avez choisie pour ce moment fondateur de votre vie matrimoniale et familiale, parce que cette Parole est vivante. Cette Parole vous accueille et vous accompagne. Et il sera bon, Anne-Clémence et Armand, qu’au long des années de votre vie, vous puissiez revenir à cette Parole de Dieu comme à une source.

La première Lecture est vraiment très belle, c’est un programme de vie. C’est vrai, je ne sais pas trop par quoi commencer tellement chaque point est important.
J’aimerais peut-être méditer sur un seul point :

« Ne ralentissez pas votre élan, restez dans la ferveur de l’Esprit, servez le Seigneur. »
(Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 12,11.)

« Ne ralentissez pas votre élan », dit l’Apôtre Paul aux Romains.
C’est vrai que si les débuts de la vie amoureuse sont faits de beaucoup d’élan et de beaucoup de fougue et d’ardeur, ceux qui ont déjà quelques heures de vol dans la vie matrimoniale peuvent témoigner que garder cet élan n’est pas chose simple.

Pourquoi est-ce qu’on peut parfois perdre l’élan initial qui nous habite au début, sachant qu’il en va de même pour la vie sacerdotale ?
C’est parce que nous sommes confrontés à l’épreuve. Parfois, les épreuves nous découragent. Les épreuves de santé, les épreuves spirituelles, relationnelles, les épreuves matérielles, ou tout simplement l’usure du quotidien…
Comment garder son élan ?

La réponse, l’apôtre Saint Paul la donne dans la suite du verset :

« Restez dans la ferveur de l’Esprit, servez le Seigneur. »

Au fond, la grâce de l’amour que vous avez l’un pour l’autre, Anne-Clémence et Armand, c’est bien sûr quelque chose qui habite votre cœur. Mais en même temps, ça vient d’ailleurs. C’est un don de Dieu.
Et pour garder l’élan, et pour garder l’amour que vous avez l’un envers l’autre, c’est arriver à toujours voir l’autre comme un don de Dieu. Et non pas simplement un don de la vie, ou un don du ciel… Mais non. Pour nous, comme croyants, comme il est important d’avoir un regard de foi sur son conjoint !

Ce n’est pas si facile, parce qu’on peut vite tomber dans une certaine accoutumance. Je le vois bien en vie communautaire, c’est pareil. J’ai un frère de la communauté qui pourra témoigner comme il est difficile aussi de garder cet élan dans la vie religieuse.
Eh bien, il nous faut un regard contemplatif ; ainsi, nous pouvons nous demander : « Est-ce que tu vois l’autre comme un cadeau de Dieu ? ».
Et cela a été parmi les premières questions que je vous ai posées dans cette longue préparation au mariage :

Parce qu’il peut y avoir, à la place du regard de foi, simplement un regard humain, psychologique : je vois l’autre avec ses défauts et ses qualités, et on le sait bien, la vie commune pousse parfois à résumer l’autre à une liste de défauts si on ne veille pas à être attentif justement à ce regard contemplatif.
Rester sur l’élan initial, c’est se mettre dans la ferveur de l’Esprit, c’est se mettre ensemble à l’écoute du Seigneur.

Chère Anne-Clémence, cher Armand, comme il est important que dans votre vie de couple, la vie de prière soit au premier chef honorée. Vous avez, durant ce temps de fiançailles, prié beaucoup de fois, et ensemble nous avons aussi prié durant cette préparation.
Mais la préparation au mariage, c’est comme cette formation qui nous donne de marquer un style de couple. La prière ensemble n’est pas si simple. On voit parfois dans un couple où les deux sont pratiquants, où les deux sont croyants, qu’il y a de la difficulté à prier ensemble. Alors que c’est une source justement pour se raffermir dans l’élan, et rester dans la joie de l’amour.

Oui, frères et sœurs bien aimés, l’apôtre saint Paul nous demande de nous mettre à l’écoute du Seigneur parce que c’est Lui qui nous donnera cette force, c’est Lui qui vous donnera cette force de grandir dans l’amour. Parce qu’il s’agit de ça !
Parfois on voit le mariage comme si c’était un sommet puis grosso modo on fait ce qu’on peut pour tenir… Non ! C’est tout à fait l’inverse ! Vous êtes au plus bas ! et vous vous engagez à grandir, à rester dans cet élan, cet élan qui vous pousse d’amour en amour, de profondeur en profondeur, mais ça c’est une grâce !
Et c’est pour ça que vous êtes aussi aujourd’hui devant l’autel du Seigneur : pour demander cette grâce. Le mariage, ne l’oublions pas, c’est l’union de deux pauvres qui supplient la grâce pour s’aimer, et s’aimer toute une vie !
Et avec l’allongement de la durée de la vie, … c’est long ! D’où l’abondance de l’assemblée réunie pour supplier que cette ferveur du Saint Esprit descende sur vous et qu’elle puisse demeurer.

Je me souviens, par exemple, lorsque je suis rentré à l’Abbaye, pendant le « temps d’essai », j’ai été pris par une sorte d’angoisse. Je me suis dit : mais est-ce que j’arriverai à tenir ? Mais au fond, c’est un piège. C’est un piège du Démon : ce n’est pas la vraie question.
La vraie question n’est pas de savoir si dans dix ans, dans vingt ans, dans cinquante ans nous serons encore ensemble. Ce n’est pas ça la question. Parce que « dans » dix ans, vingt ans, cinquante ans, ça n’existe pas. Ce qui existe, c’est aujourd’hui.
Pour reprendre ces très beaux mots de la petite Thérèse de l’Enfant Jésus :

« Pour aimer, je n’ai qu’aujourd’hui. »

Et c’est donc d’aujourd’hui en aujourd’hui que vous irez dans la prière quémander la grâce de Dieu. Et alors, oui, cet amour s’épanouit, et comme vous l’avez choisi dans l’Évangile, il est amené à rayonner autour de vous. La fécondité d’un couple, c’est bien sûr les enfants, mais pas uniquement. L’amour lui-même rayonne, l’amour lui-même se répand, un peu comme un caillou qu’on jette au milieu d’un lac et les vaguelettes rejoignent jusqu’aux berges les plus éloignées.

Alors, oui, nous croyons que ce sacrement du mariage que vous allez vous donner l’un à l’autre, et que tous ceux qui l’ont déjà reçu le renouvellent encore aujourd’hui, nous croyons qu’il y a là une force, plus grande que nos fragilités, que notre générosité… il y a quelque chose qui nous dépasse.

Et vous avez, dans votre amour, Anne-Clémence et Armand, découvert quelque chose de sacré. C’est pour ça que vous êtes là aujourd’hui. Parce que, c’est vrai, dans un amour qui est sincère, qui est profond, comme est le vôtre, il y a quelque chose qui vous dépasse, et en même temps qui vous habite.

Alors, soyez sel de la terre, lumière du monde, non pas par vos propres forces, mais par la grâce de Dieu.

« Ne ralentissez pas votre élan, restez dans la ferveur de l’Esprit, servez le Seigneur. »

Amen !


Évangile de Jésus-Christ selon Saint Matthieu 5, 13-16

"Vous êtes le sel de la terre. Si le sel se dénature, comment redeviendra-t-il du sel ?
Il n’est plus bon à rien : on le jette dehors et les gens le piétinent.
Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée.
Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau ; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison.
De même, que votre lumière brille devant les hommes :
alors en voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux."