Homélie du 17e dimanche du Temps Ordinaire

30 juillet 2023

« C’est pourquoi tout scribe devenu disciple du royaume des Cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et de l’ancien. »

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Texte de l’homélie

Voici quelques définitions de « trésor » : [( « Ensemble de choses précieuses amassées et cachées. Êtres et choses pour lesquelles on a un grand attachement. Ce à quoi on attache une grande valeur. Le trésor, ça fait rêver. Il y a toujours aujourd’hui des chercheurs, des chasseurs de trésors.

Ce matin, je désire commenter l’évangile autour de trois verbes : chercher, s’émerveiller, renoncer. Vous noterez le maillon incontournable de l’émerveillement : ce qui donne la force du renoncement, c’est l’émerveillement devant le trésor ou la perle précieuse que l’on a trouvée.

Chercher

Quand on voit des gens qui réussissent, on se demande comment ils ont fait pour à notre tour réussir. Quel est leur secret ? Quelles sont les dispositions favorables qui leur ont permis de trouver le trésor ou la perle fine ?

Les deux personnages de l’évangile considèrent qu’ils ont eu la chance de trouver le trésor. Ce qu’ont en commun celui qui a trouvé le trésor et le négociant en perles, c’est qu’ils n’étaient pas inactifs ; ils n’étaient pas allongés sur leur lit. L’oisiveté ne fait pas bon ménage avec la recherche du trésor. Dieu peut toujours nous surprendre. Mais en même temps, il aime nous voir dans une dynamique de recherche.

En ce qui concerne la découverte du trésor que constitue le Royaume de Dieu, voici quelques pistes non exhaustives qui nous mettent sur la bonne route :

Cultiver la petitesse et l’humilité

Une première disposition est certainement l’humilité. Celui qui croit déjà tout savoir aura du mal à rencontrer Jésus. C’est quelquefois précisément dans un moment de vulnérabilité que l’on découvre le trésor qu’est le Royaume de Dieu :

« Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. » (Mt 11, 25 ; cf. 1 Co chapitres 1-3)

Avoir le désir de la vérité

Cela suppose de ne pas suivre passivement le troupeau mais de se poser des questions, de rechercher sincèrement la vérité, de ne pas laisser de côté les grandes questions de l’existence : qui suis-je ? D’où je viens ? Où je vais ?

Lire et étudier la Parole de Dieu

Dieu nous a parlé ; il s’est révélé à nous. La moindre des choses, c’est d’écouter ce qu’il nous a dit.

Prendre des temps d’intériorité

Nous pouvons être beaucoup à l’extérieur de nous-mêmes. Georges Bernanos disait que la civilisation moderne « est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure ». Le silence nous fait quelquefois peur et pourtant, il est tellement essentiel.

Savoir se rapprocher d’autres personnes qui ont déjà trouvé le trésor

La foi est quelque chose d’éminemment personnel. Nous avons besoin de faire une rencontre personnelle avec Dieu. Fréquenter ceux qui ont déjà fait cette rencontre peut nous aider.

Ouvrir son cœur aux pauvres et aux souffrants

Dans le récit du jugement dernier, Jésus montre combien il s’identifie à ceux qui sont dans la détresse : « j’avais faim et vous m’avez donné à manger … » (Mt 25).

Être prêt à donner sa foi et sa confiance à Jésus

Après la multiplication des pains, les juifs demandent à Jésus : « Que devons-nous faire pour travailler aux œuvres de Dieu ? » et Jésus leur répondit : « L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » (Jn 6, 28-29)

S’émerveiller

Comme je l’ai déjà dit, le ressort qui nous permet de renoncer, c’est l’émerveillement devant le trésor et la perle précieuse. Celui qui a trouvé le trésor dans le champ et le négociant en perles fines ont eu le sentiment d’avoir eu de la chance. Le royaume de Dieu n’est jamais au bout de nos efforts. On ne le mérite pas. C’est un don gratuit. C’est d’abord cet aspect de chance qui nourrit l’émerveillement.

Comment nourrir notre émerveillement par rapport au royaume de Dieu ? Je retiendrai trois éléments :

Le temps

L’émerveillement est compliqué pour les gens pressés à l’agenda surbooké. L’émerveillement est lié à la contemplation et la contemplation est difficile quand on est en train de courir. Il y a besoin d’oxygène, de gratuité.

L’émerveillement devant le royaume de Dieu nécessite une ouverture d’esprit, une attitude réceptive. Cela ne se fait pas quand on est sous pression.

Le regard

L’émerveillement comporte toujours un certain regard. Spontanément, surtout nous, Français, nous avons tendance à voir ce qui ne va pas. Nous sommes invités à cultiver un regard positif. Ce regard positif n’est pas celui des imbéciles heureux ou des optimistes béats. Ce parti-pris est fondé sur la foi (histoire de la bouse de vache !)

C’est ce qui apparaît très bien dans la deuxième lecture de ce jour où saint Paul déclare :

« Quand les hommes aiment Dieu, lui-même fait tout contribuer à leur bien » (Rm 8, 28)

Quelques versets plus loin, Saint Paul explicite le motif de sa manière de regarder (nous lisons cela le 18e dimanche de l’année A qui sera remplacé cette année par la Transfiguration) :

« Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Il n’a pas épargné son propre Fils, mais il l’a livré pour nous tous : comment pourrait-il, avec lui, ne pas nous donner tout ?(…)
Qui pourra nous séparer de l’amour du Christ ? la détresse ? l’angoisse ? la persécution ? la faim ? le dénuement ? le danger ? le glaive ? … En tout cela nous sommes les grands vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés. J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur. » (Rm 8)

Les paroles

Il est important de veiller à nos paroles : elles ont en effet un effet rétroactif sur nous. Certaines personnes, à force de raconter leurs malheurs, sont convaincues d’être malheureuses. Mais l’inverse est aussi vrai : proclamer ce qu’il y a de beau dans notre vie contribue à notre bonheur.
L’émerveillement n’est pas pour les râleurs invétérés.

Renoncer

La découverte du trésor et de la perle précieuse appelle un choix décisif. C’est ce que le prophète Élie dit au peuple d’Israël qui suit les Baals :

« Jusqu’à quand clocherez-vous des deux jarrets ? Si le Seigneur est Dieu, suivez-le ; si c’est Baal, suivez-le. » (1 R 18, 21)

Il y a une préférence fondamentale à accorder au Royaume :

« Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît. » (Mt 6, 33)

On ne peut pas simplement l’ajouter au reste. Notre appartenance chrétienne n’est pas seulement un « plus », c’est un « tout ». On ne peut pratiquer notre foi comme une activité de loisirs.
Nous ne serons jamais assez riches pour obtenir le Royaume. L’important, c’est de vider tout son porte-monnaie, c’est de tout donner.

Comme nous le voyons avec le trésor caché dans le champ, il faut prendre le champ dans sa totalité. Considérer le Royaume de Dieu comme un vrai trésor suppose non seulement d’être prêt à tout quitter pour lui, mais aussi d’être prêt à tout accepter pour lui.

Nous sommes dans une société où nous avons tendance à « vouloir le beurre et l’argent du beurre ». Jésus nous appelle à faire des choix, c’est à dire aussi à renoncer à certaines choses. Chacun sait que choisir, c’est aussi renoncer. On pourrait dire que le renoncement est la face douloureuse du choix.

Voici quelques-uns des renoncements demandés par Jésus :

  1. Renoncer à soi-même, à son ego, à ses désirs égoïstes et à son propre intérêt. Cela implique de mettre Dieu et les autres avant soi-même.
  2. Mettre Dieu avant toutes les richesses matérielles et tous les biens terrestres.
  3. Mettre Dieu avant toutes ses affections légitimes.
  4. Renoncer au péché et à toutes les conduites mauvaises :

    « Faites donc mourir en vous ce qui n’appartient qu’à la terre : débauche, impureté, passion, désir mauvais, et cette soif de posséder, qui est une idolâtrie… Débarrassez-vous de tout cela : colère, emportement, méchanceté, insultes, propos grossiers sortis de votre bouche.
    Plus de mensonge entre vous : vous vous êtes débarrassés de l’homme ancien qui était en vous et de ses façons d’agir… Puisque vous avez été choisis par Dieu, que vous êtes sanctifiés, aimés par lui, revêtez-vous de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience
    Supportez-vous les uns les autres, et pardonnez-vous mutuellement si vous avez des reproches à vous faire. Le Seigneur vous a pardonnés : faites de même.
    Par-dessus tout cela, ayez l’amour, qui est le lien le plus parfait. » (Col 3)

Conclusion : Vous ne seriez pas ici si – d’une façon ou d’une autre – vous n’aviez pas déjà trouvé le trésor dont nous parle l’évangile. Mais à vrai dire, ce trésor est inépuisable et nous n’avons jamais fini de le découvrir. Alors je vous encourage à ne jamais sortir de cette dynamique de recherche, d’émerveillement et de renoncement.

Dans la mesure où vous l’avez trouvé, n’hésitez pas à partager ce trésor aux autres. On ne le perd pas quand on le partage aux autres, bien au contraire.

Que Marie vous y aide !

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Premier livre des Rois 3,5.7-12.
  • Psaume 119(118),57.72.76-77.127-128.129-130.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 8,28-30.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 13,44-52 :

En ce temps-là, Jésus disait aux foules : « Le royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ; l’homme qui l’a découvert le cache de nouveau. Dans sa joie, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète ce champ.
Ou encore : Le royaume des Cieux est comparable à un négociant qui recherche des perles fines. Ayant trouvé une perle de grande valeur, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète la perle.

Le royaume des Cieux est encore comparable à un filet que l’on jette dans la mer, et qui ramène toutes sortes de poissons. Quand il est plein, on le tire sur le rivage, on s’assied, on ramasse dans des paniers ce qui est bon, et on rejette ce qui ne vaut rien.

Ainsi en sera-t-il à la fin du monde : les anges sortiront pour séparer les méchants du milieu des justes et les jetteront dans la fournaise : là, il y aura des pleurs et des grincements de dents.

« Avez-vous compris tout cela ? » Ils lui répondent : « Oui ».
Jésus ajouta : « C’est pourquoi tout scribe devenu disciple du royaume des Cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et de l’ancien. »