Homélie du 24e dimanche du Temps Ordinaire

13 septembre 2022

Le fils lui dit : “Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.”
Mais le père dit à ses serviteurs : “Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller, mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds, allez chercher le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.”

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie :

Les textes de la liturgie de ce dimanche veulent nous faire découvrir un aspect caractéristique de Dieu. On nous a donné dans le livre de l’Exode un passage que vous connaissez bien : le veau d’or. Moïse qui était monté sur la montagne converser avec Dieu descend et trouve un veau en or. Et pourtant, si l’on reprend le Décalogue, on sait que Dieu avait dit :

« Je suis ton Dieu, il n’y en a pas d’autre… »

Tu ne feras pas d’image de ce qui est au Ciel, sur terre ou sous la mer. Mais, la tentation est grande : en Égypte, il y a énormément de faux dieux et de représentations et ils cèdent à la tentation. C’est bien plus facile d’avoir un dieu à portée de main, que l’on peut toucher, et dont on peut également s’éloigner : de l’autre côté du mur, on ne voit plus le veau d’or et on se sent tranquille. Il s’agit d’instrumentalisation qui facilite la relation.
Mais c’est un faute énorme car Dieu avait demandé de ne pas faire de représentation car c’est une fausse route, un passage sans issue. On fait parler Dieu, on le fera encore parler pendant quelques siècles comme un humain, avec les réactions humaines comme la colère.
Il faudra plusieurs siècles pour découvrir autre chose.

Ainsi, Dieu se met en colère et propose d’exterminer le peuple et Moïse intervient. A ce sujet là aussi, il faudra plusieurs siècles pour découvrir que l’on a pas à amadouer Dieu, et ça prendra du temps. Et dans ce dialogue de Moïse pour apaiser la colère du Seigneur, le peuple découvre que le Seigneur pardonne. Et à mesure qu’il traverse le désert, le peuple se fourvoie. Mais à chaque fois, le Seigneur va le contenter, le pardonner.

Dans l’Évangile, on voit les Publicains et les pécheurs courir après Jésus pour l’écouter, et les Pharisiens et les Scribes récriminaient contre Lui :

« Cet homme fait bon accueil aux pécheurs. »

Les Pharisiens étaient des gens tout à fait remarquables. Les évangiles nous montrent leurs défauts, mais c’étaient des personnes qui cherchaient à suivre la loi au plus près possible. Ce mouvement est né en 138 avant le Christ. Une école de théologie s’est ouverte à Jérusalem qui proposait de se former en approfondissant le loi. Ainsi, ils essayaient de la pratiquer dans les moindres détails. Cependant, l’esprit humain étant ce qu’il est, ils avaient leur travers.

Prenons un exemple : lorsque vous faites de grands efforts pour accomplir votre devoir d’état, pour faire ce qui vous paraît juste aux yeux de Dieu, vous avez certaines attentes vis à vis des autres. C’est la même chose dans la vie religieuse : on a chacun son secteur de ménage. Lorsque vous faites votre ménage avec une bonne énergie et que vous voyez un frère qui n’y met pas autant de cœur, voire ne rien faire, il est possible qu’en vous un sentiment désagréable monte en vous.

Comme cela m’était arrivé, Père André m’avait conseillé de lire un livre - que je ne lui ai d’ailleurs jamais rendu – de Saint Jean de la Croix. Et j’en ai retenu ce conseil :

« Vivez au monastère comme si y étiez seul. »

Si vous êtes seul au monastère, vous en verrez pas votre voisin qui ne fait pas son travail, son devoir d’état, et cela vous laisse en paix. Et c’est cette paix qu’il faut absolument acquérir en se souvenant qu’il aura à rendre des comptes pour ce qu’il a fait. Il n’a pas beaucoup fait le ménage parce qu’il n’a pas beaucoup aimé, et Saint Jean de la Croix nous dit que l’on rendra nos comptes sur la manière dont nous aurons aimé.

Voilà ce qu’il se passe pour les Pharisiens : ils se donnent beaucoup de mal et ils voient que les autres n’en font qu’à leur tête, ils en prennent et ils en laissent et cela les met en difficulté. C’est pourquoi ils récriminent car, pour eux, pour pouvoir rester purs, il fallait se séparer de ceux qui allaient de travers, les pécheurs, car ils risquaient de les faire tomber comme je viens de l’expliquer.

Et Jésus donne un parabole pour eux, celle qui parle des quatre-vingt-dix-neuf brebis : c’est ce qu’Il est venu faire pour nous, Il est venu pour chercher celle qui était perdue. Et les Pharisiens avaient oublié qu’ils étaient pécheurs malgré tous les efforts qu’il faisaient pour être parfaits. Et voici ce que leur dit Jésus :

« Il y a beaucoup plus de joie au Ciel pour un pécheur qui se convertit ! »

Il donne ensuite une autre parabole avec cette femme. Elle signifie que l’on a dut prix aux yeux de Dieu, et tout pour Lui est bon pour essayer de ramener un pécheur, pour qu’un pécheur revienne vers Lui. Et si un pécheur ne revient pas, c’est Lui qui va le chercher comme dans la brebis perdue, car on a un prix immense aux yeux de Dieu.

Enfin, il donne cette parabole du fils qui a demandé sa part d’héritage, et qui va tout dépenser, tout dilapider. Nous faisons nous-même souvent la même chose, dilapidant les dons que Dieu nous donne. Et lorsqu’il est dans la misère, lorsqu’il a faim – il faut généraliser en arriver là pour se mettre à réfléchir - il rentre en lui-même et se dit qu’à la maison, son père traite les ouvrir bien mieux que là où il est. Il prend ainsi le décision de retourner et de dire à son père :

« Père, j’ai péché contre le Ciel et contre toi… »

Il s’est sans doutes demandé tout le long du chemin comment il serait accueilli. Même avec la phrase qu’il avait préparée et apprise par cœur, il ne pouvait pas le savoir… et il se trouve que le Père l’attend ! Nous aussi, le Père nous attend.
Et dès qu’il le voit, il court l’embrasser et se jeter à son cou. Le fils répète sa petite formule apprise par cœur, mais il n’a pas le temps de finir que déjà on le rhabille, on lui met une bague au doigt et des sandales aux pieds, et on commence le festin… C’est comme dans la brebis perdue :

« Il y a une grande joie au Ciel pour un pécheur qui se convertit ! »

Mais, le fils prodigue comme le fils aîné, peut-on dire qu’ils aimaient vraiment leur père ? Le fils cadet certes, s’enfuit et dilapide tout, mais l’aîné fait des reproches à son père : « Tu ne m’as jamais donné un chevreau ! » et le père lui répondre :

« Tout ce qui est à moi est à toi ! »

S’il avait été dans une relation d’amour et de confiance avec son père, il aurait pu lui demander un chevreau lorsqu’il recevait ses amis, et le père le lui aurait donné de bon cœur. Mais au lieu de cela, il lui fait le reproche de n’avoir rien donné alors qu’il n’a jamais rien demandé !

Ces paraboles nous montrent la miséricorde de Dieu, Son attitude quand Il vient nous chercher car nous avons du prix à Ses yeux, et en fin de compte, Il se réjouit pour un seul pécheur qui se convertit.

Saint Paul, quand à lui, exulte de joie quand il pense à tout ce que Dieu a fait pour lui, qu’Il soit venu le chercher là où il était, lui, blasphémateur et violent qui persécutait les Chrétiens. Il découvre qu’Il lui a fait miséricorde, que pour Dieu tout cela n’était rien du tout…
C’est pour cela qu’il est dans une reconnaissance infinie.

C’est aussi notre cas lorsque nous avons fait l’expérience de la miséricorde de Dieu : on est tout à notre joie et on veut la faire partager aux autres ! Et l’on devient apôtre pour montrer tout ce que Dieu a fait pour nous. Ainsi, il exulte de joie en voyant la miséricorde de Dieu à son égard.

Au cours de cette Eucharistie, demandons et réjouissons-nous pour la miséricorde de Dieu à notre égard,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre de l’Exode 32,7-11.13-14.
  • Psaume 51(50),3-4.12-13.17.19.
  • Première lettre de saint Paul Apôtre à Timothée 1,12-17.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 15,1-32 :

En ce temps-là, les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : « Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux ! »
Alors Jésus leur dit cette parabole : « Si l’un de vous a cent brebis et qu’il en perd une, n’abandonne-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la retrouve ?
Quand il l’a retrouvée, il la prend sur ses épaules, tout joyeux, et, de retour chez lui, il rassemble ses amis et ses voisins pour leur dire : “Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue !”
Je vous le dis : C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion.

Ou encore, si une femme a dix pièces d’argent et qu’elle en perd une, ne va-t-elle pas allumer une lampe, balayer la maison, et chercher avec soin jusqu’à ce qu’elle la retrouve ?
Quand elle l’a retrouvée, elle rassemble ses amies et ses voisines pour leur dire : “Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé la pièce d’argent que j’avais perdue !”
Ainsi je vous le dis : Il y a de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit.

Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : “Père, donne-moi la part de fortune qui me revient.” Et le père leur partagea ses biens.
Peu de jours après, le plus jeune rassembla tout ce qu’il avait, et partit pour un pays lointain où il dilapida sa fortune en menant une vie de désordre.
Il avait tout dépensé, quand une grande famine survint dans ce pays, et il commença à se trouver dans le besoin. Il alla s’engager auprès d’un habitant de ce pays, qui l’envoya dans ses champs garder les porcs. Il aurait bien voulu se remplir le ventre avec les gousses que mangeaient les porcs, mais personne ne lui donnait rien.
Alors il rentra en lui-même et se dit : “Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim ! Je me lèverai, j’irai vers mon père, et je lui dirai : Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Traite-moi comme l’un de tes ouvriers.”
Il se leva et s’en alla vers son père. Comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de compassion ; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers.
Le fils lui dit : “Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.”
Mais le père dit à ses serviteurs : “Vite, apportez le plus beau vêtement pour l’habiller, mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds, allez chercher le veau gras, tuez-le, mangeons et festoyons, car mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé.”
Et ils commencèrent à festoyer.
Or le fils aîné était aux champs. Quand il revint et fut près de la maison, il entendit la musique et les danses. Appelant un des serviteurs, il s’informa de ce qui se passait.
Celui-ci répondit : “Ton frère est arrivé, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il a retrouvé ton frère en bonne santé.”
Alors le fils aîné se mit en colère, et il refusait d’entrer. Son père sortit le supplier.
Mais il répliqua à son père :
— “Il y a tant d’années que je suis à ton service sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour festoyer avec mes amis. Mais, quand ton fils que voilà est revenu après avoir dévoré ton bien avec des prostituées, tu as fait tuer pour lui le veau gras !”
Le père répondit :
— “Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. Il fallait festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé !” »