Homélie du 26e dimanche du Temps Ordinaire

30 septembre 2021

« Celui qui est un scandale, une occasion de chute, pour un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes, et qu’on le jette à la mer. »

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie

« Serais-tu jaloux pour moi ? Si le Seigneur pouvait faire de tout Son peuple un peuple de prophètes ! s’Il pouvait mettre Son esprit en eux… »

Voilà ce désir de Moïse, sa réponse, alors qu’il a réuni les soixante-dix anciens autour de la tente de la rencontre, à l’écart du camp, et qu’ils se met à prophétiser, deux hors du camp se mettent à prophétiser. Alors, un jeune alerter prévenir Moïse lui disant que cela ne convient pas.

Si vous avez entendu le texte, vous vous rappellerez que les soixante-dix prophétisent, mais que cela ne dura pas. Or, comme le fait remarquer la lecture juive de la Bible, Eldad et Médad ont continué à prophétiser et notamment sur le monde à venir.
Et c’est ce désir de Moïse qui est exprimé là : la louange du Seigneur, l’expression de la parole en Son nom n’est pas réservée à quelques-uns. D’ailleurs, le prophète Joël prenait le relais en disant :

« L’esprit sera répandu sur toute chair… »

Et les auteurs de l’Ancien Testament en parlent avec la Pentecôte qui les concernait eux ainsi que tous ceux qui sont devenus disciples. C’est aussi les paroles qui sont prononcées au cours du rite du baptême au moment de l’onction du Saint Chrême, signe spécial de l’Esprit-Saint :

Nous sommes appelés à parler devant, à parler pour le Seigneur, en Son nom, comme il est dit dans l’Évangile. Et dans l’Évangile, on se retrouve avec cette question : « comment est-ce possible que cette parole ne soit pas réservée à des spécialistes ? »

Et dans le même Évangile, devant leurs réactions face à la Parole qui se répand et n’est pas toujours accueillie, Jésus les qualifie de « Fils du tonnerre ». Ils dénoncent à Jésus des personnes qui guérissent en Son nom et qui « ne font pas partie de nous ».
Dans le texte, il y a d’ailleurs tout un jeu entre le « nous » et le « moi », entre un homme face au groupe.

Et l’Évangile ici vient pointer du doigt les Apôtres qui pensent que la Parole de Dieu leur appartient parce qu’ils font partie du cercle proche de Jésus, alors qu’au contraire, Il est venu pour répandre Sa parole pour tout homme pour qu’il puisse être rempli de l’Esprit Saint et à son tour, devenir un témoin.

On parle beaucoup aujourd’hui de disciple missionnaire et il nous reste malheureusement dans la tête cette question de ce que nous allons devoir « faire ». La vraie question est « qu’est-ce que je dis ? Qu’est-ce que je rayonne ? Qu’est-ce que je partage ? »

Hier, j’entendais le récit du témoignage d’un converti à l’Islam, et il disait justement :

« C’est grâce à l’audace de certains que j’ai rencontrés, de tel pasteur qui a osé me donner une bible, de telle personne qui a osé me dire : « Jésus t’aime », alors que je fréquentais déjà des Chrétiens et que je n’avais encore jamais entendu ces paroles… »

Et Jésus a bouleversé sa vie, et l’a amené à accueillir le baptême et à rentrer dans l’Église.

Être disciple missionnaire en se mettant à la portée de tous

Comme le pape insiste, comme tout le monde le chante comme un refrain, être disciple missionnaire c’est accepter d’être rempli de la grâce de Dieu, de laisser la Parole de Dieu travailler, raisonner en moi, et de pouvoir en donner le fruit, de pouvoir la communiquer.

Dans cet Évangile, Jésus insiste beaucoup : Il est dans le Nom de Dieu. Ce Nom du Père, c’est cette présence de Dieu. Et Jésus continue en parlant de ce verre d’eau :

« Celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen je vous le dis, il ne restera pas sans récompense… »

Pour les Apôtres qui viennent de discuter de savoir qui est le plus grand, ce n’est pas facile à comprendre même avec cet exemple du petit enfant au milieu d’eux :

« Si vous n’accueillez pas le Royaume comme un petit enfant accueille la vie, vous n’y entrerez pas… »

Au sujet de l’Évangélisation, à travers le verre d’eau, nous pensons aussi à la Samaritaine, et à Jésus qui lui demande à boire… Rappelons-nous de l’Esprit qui est communiqué après dans le dialogue, et cette femme assoiffée connaître enfin la Vérité du sens de la vie, la vérité sur Dieu.
Et c’est à travers ce petit geste de charité qu’Il nous montre l’exemple. Notons que Jésus est Lui-même le demandeur auprès de la Samaritaine car en effet, Il n’est pas en position de pouvoir pour répandre la Parole. Il n’intervient pas comme un spécialiste, Il la laisse simplement fructifier et se propager. Il la communique.

C’est important pour nous d’apprendre à communiquer, à parler ensemble, de pouvoir le faire d’une manière plus fluide, afin de partager de l’action du Seigneur en nous, de comment Il ouvre notre cœur, comment Il révolutionne notre vie, Il la fait progresser.

N’oublions pas que Jésus n’est pas dans une position de pouvoir, mais la seule exaltation que Jésus vivra pleinement, qu’Il acceptera complètement, c’est celle de la Crucifixion. Il a pris la dernière place. Parce que, jusque là, Il laisse la Gloire de Dieu passer pour rejoindre tous les hommes. Et on le voit bien dans la Croix : Jésus ne dit pas : « ce corps, ce sang que j’ai répandus pour vous seuls, pour votre petit groupe… » mais :

« Voici mon corps et mon sang répandu pour la multitude… »

Le trésor de la Foi ne vaut que s’il est partagé

C’est bien pour la multitude qu’Il a donné Sa vie, et je ne viens pas à la messe pour Le recevoir moi seul dans une relation individuelle. Et concernant l’envoi, il ne s’agit pas de chasser les fidèles de l’église, mais plutôt de les inviter à redonner ce don de Dieu qui a été reçu : « L’Esprit Saint, le Corps vivant du Christ, communique-le ! »

Et Jésus continue avec cette histoire de scandale. Dans notre monde actuel, le mot scandale a une connotation médiatique, émotionnelle - avec l’horreur que l’on ressent face à l’injustice - et retentit dans la communication. Mais, revenons au terme que Jésus emploie et que Jean nous relaye : « N’empêchez pas, ne bloquez pas la grâce… »

« N’éteignez pas l’Esprit !. »

Voilà ce qui est important. Mais, très souvent, par respect humain, par peur, par manque de formation ou par paresse nous renonçons à dire les merveilles de Dieu…
Rappelons-nous de Sainte Thérèse qui commence ses mémoires ainsi :

« Voici le récit des merveilles de Dieu. »

C’est à travers une vie toute simple mais vraiment habitée par le Seigneur, conduite par l’Esprit Saint au fur et à mesure des âges de la vie qu’elle a porté un fruit incroyable, et nous savons quel retentissement aura cet ouvrage…
C’est cela que nous sommes appelés à faire : ne pas bloquer l’Esprit.

N’ayons pas peur de laisser notre trésor porter du fruit

Et c’est intéressant de voir que dans cette lecture, il s’agit des mains, des pieds et des yeux. Jésus fait ici l’énumération d’organes doubles. Alors ne soyons pas dans cette folie des apôtres qui veulent garder la totalité de la Parole pour eux : il s’agit de transmettre par le sacerdoce et par la prédication. Ce n’est pas un pouvoir à garder jalousement : c’est un service.
Et Jésus nous dit : « Ne restez pas dans cette folie de vouloir garder le tout : il vaut mieux qu’il te manque une main, un pied ou un œil : tu peux encore voir, tu peux encore prendre. »

Demandons cette grâce au Seigneur de pouvoir répondre à Son invitation, de vraiment reprendre nos vies et de ne pas simplement entendre comme on nous le répète : « Soyez des disciples missionnaires » en ne voyant que l’aspect compliqué de cette invitation.

Accueillez la grâce, accueillons-la, laissons nos cœurs être transformés et surtout, ne bloquons pas, n’empêchons pas ce don de Dieu.

On peut compléter ce travail avec la parabole des talents : le talent, ce trésor, cette richesse de la vie chrétienne pour que nous l’enfouissions et que nous le laissions au fond de notre cœur, ne l’utilisant que le dimanche entre 10h et 11h, le regardant un peu en semaine avec un temps de prière…

Faisons-le fructifier !

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre des Nombres 11,25-29.
  • Psaume 19(18),8.10.12-13.14.
  • Lettre de saint Jacques 5,1-6.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 9,38-43.45.47-48 :

En ce temps-là, Jean, l’un des Douze, disait à Jésus :
— « Maître, nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché, car il n’est pas de ceux qui nous suivent. »
Jésus répondit :
— « Ne l’en empêchez pas, car celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ; celui qui n’est pas contre nous est pour nous.
Et celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vous le dis, il ne restera pas sans récompense.
Celui qui est un scandale, une occasion de chute, pour un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes, et qu’on le jette à la mer.
Et si ta main est pour toi une occasion de chute, coupe-la. Mieux vaut pour toi entrer manchot dans la vie éternelle que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux mains, là où le feu ne s’éteint pas.
Si ton pied est pour toi une occasion de chute, coupe-le. Mieux vaut pour toi entrer estropié dans la vie éternelle que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux pieds.
Si ton œil est pour toi une occasion de chute, arrache-le. Mieux vaut pour toi entrer borgne dans le royaume de Dieu que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux yeux, là où le ver ne meurt pas et où le feu ne s’éteint pas. »