Homélie du dimanche des Rameaux et de la Passion

21 mars 2016

« J’ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous avant de souffrir ! Car je vous le déclare : jamais plus je ne la mangerai jusqu’à ce qu’elle soit pleinement réalisée dans le royaume de Dieu. »

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie :

Chers frères et sœurs,

Ce matin j’aimerais suivre tout simplement Jésus dans sa Passion pour mieux nous rendre compte à quel point il a aimé ceux qui se trouvaient sur son chemin de Croix et combien il nous aime nous-aussi.

Nous avons tellement l’habitude de dire que Jésus nous a aimés que cela nous paraît presque naturel. Pourtant, il suffit de relire la passion pour voir que ce n’est pas du tout naturel. En effet, Jésus aurait eu mille raisons de se décourager de nous aimer. Il aurait pu abandonner ses disciples.

Saint Luc, qui est l’évangéliste de la miséricorde, prend soin de nous manifester la douceur et la patience de Jésus. Je distinguerai volontiers 3 groupes de personnages : les disciples de Jésus, ceux qui font preuve de haine à son égard, ceux qui font preuve d’humanité.

Il y a tout d’abord l’attitude de ses plus proches.

La trahison de Judas

Le récit commence par l’annonce de la trahison de Judas :

« Voici que la main de celui qui me livre est à côté de moi sur la table. En effet, le Fils de l’homme s’en va selon ce qui a été fixé. Mais malheureux cet homme-là par qui il est livré ! »

Et de fait, c’est ce qui se réalise un peu plus loin :

« Celui qui s’appelait Judas, l’un des Douze, marchait à leur tête. Il s’approcha de Jésus pour lui donner un baiser.
Jésus lui dit : ’Judas, c’est par un baiser que tu livres le Fils de l’homme ?’ »

Être trahi par un inconnu, c’est déjà difficile mais par un proche, c’est infiniment plus douloureux. Vous le savez bien : l’insulte reçue d’un inconnu n’a pas le même impact que celle d’un proche. C’était un insigne privilège d’avoir été choisi par le Fils de Dieu. Imaginez-vous un peu : faire partie des 12 hommes coachés par Jésus pendant 3 ans !

Mais, à un certain moment, Judas a certainement perdu de vue cette chance car les exigences de la suite de Jésus lui sont apparues trop lourdes. Il a décroché.

Jésus n’a pas fini d’annoncer la trahison de Judas…

…que les apôtres se disputent pour savoir qui est le plus grand. Nous ne pouvons qu’être frappés du contraste entre la gravité de la situation où Jésus vient de révéler et la mesquinerie de leurs soucis de préséance.

Puis vient l’annonce du reniement de Pierre qui hélas se réalisera.

Pierre a plein de bons sentiments :

« Seigneur, avec toi, je suis prêt à aller en prison et à la mort. »

Mais il ne mesure pas encore assez sa faiblesse et sa fragilité. Je pense que le regard de Jésus après le chant du coq a dû se graver profondément dans sa mémoire.
J’imagine que ce regard n’était pas tellement un regard de colère ou un regard accusateur mais plutôt un regard douloureux, un regard rempli de tristesse mais aussi de miséricorde.
Comme il est important de nous laisser atteindre nous-aussi par ce regard de Jésus qui – au-delà de Pierre – vient nous rejoindre lorsqu’il nous arrive nous aussi de nous désolidariser de Jésus et de son Église lorsqu’ils sont mis sur le banc des accusés. Puissions-nous nous-aussi pleurer amèrement quand nous prenons conscience de nos infidélités.
Il ne s’agit pas de larmes de désespoir mais d’un profond regret, d’une vraie contrition de nos fautes.

Et ce n’est pas fini !

Il y a encore le sommeil de ses apôtres alors que Jésus est en pleine agonie :

« Père, si tu le veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que soit faite non pas ma volonté, mais la tienne. »

Le combat est tellement fort que «  sa sueur devint comme des gouttes de sang qui tombaient sur la terre.  » Quelle est l’attitude de ses disciples à ce moment-là ?

« Il les trouva endormis, accablés de tristesse. »

Quelle solitude que celle de Jésus !

Il y a aussi l’attitude de bien d’autres personnages

Ce qui m’impressionne le plus, c’est la manière dont on dispose de Jésus.
Mais surtout dont Jésus laisse disposer de lui. « Nous avons connu Sa douceur ».

Dans le jardin de Gesthsémani, les grands prêtres, chefs des gardes du Temple et anciens viennent avec des épées et des bâtons pour se saisir de Jésus.

Ensuite, « les hommes qui gardaient Jésus se moquaient de lui et le rouaient de coups. Ils lui avaient voilé le visage, et ils l’interrogeaient : " Fais le prophète ! Qui est-ce qui t’a frappé ?"
Et ils proféraient contre lui beaucoup d’autres blasphèmes. »

Ensuite Jésus est ballotté entre le collège des anciens du peuple, grands prêtres et scribes, le palais de Pilate, puis celui d’Hérode, puis retour chez Pilate.

À trois reprises Pilate déclare :

« Je ne trouve chez cet homme aucun motif de condamnation. »

Peu à peu, Pilate s’enfonce dans l’engrenage de l’injustice, par lâcheté. Il veut contenter Hérode qui avait envie de voir Jésus faire un miracle. C’est ainsi qu’ils deviennent amis sur le dos de Jésus. Ensuite, il relâche Barabbas. Et enfin, tout en ne trouvant en lui aucun motif de condamnation, il se propose de « le relâcher après lui avoir fait donner une correction. »
Ce qui n’est pas cohérent si Jésus est innocent. Pire encore, il « décida de satisfaire leur requête. Il relâcha celui qu’ils réclamaient, le prisonnier condamné pour émeute et pour meurtre, et il livra Jésus à leur bon plaisir. »

Hérode Le « traita avec mépris et se moqua de lui : il le revêtit d’un manteau de couleur éclatante et le renvoya à Pilate. »

Il y a les soldats et tous ceux qui sont au pied de la croix :

« Les chefs tournaient Jésus en dérision et disaient : "Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu !« _ Les soldats aussi se moquaient de lui ; s’approchant, ils lui présentaient de la boisson vinaigrée, en disant : » Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même !" »

L’un des malfaiteurs suspendus en croix répète le même refrain : « N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même, et nous aussi ! »

Devant tout cet acharnement et ce déferlement de haine et d’humiliation, il y a cette belle parole de Jésus :

« Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font. »

N’est-ce pas dans le prolongement de cette belle parole :

«  Le Fils de l’Homme est venu pour chercher et sauver ceux qui étaient perdus !  »

D’autres personnages plus sympathiques apparaissent.

Il y a par exemple Simon de Cyrène :

« Comme ils l’emmenaient, ils prirent un certain Simon de Cyrène, qui revenait des champs, et ils le chargèrent de la croix pour qu’il la porte derrière Jésus. »

Au point de départ, Simon de Cyrène n’a pas eu trop le choix mais son cœur s’est laissé émouvoir puisqu’on verra ses fils faire partie de la communauté chrétienne.

Il y a aussi celui que nous avons coutume d’appeler le bon larron. En un sens, il n’était pas si bon que cela et il le reconnaît lui-même devant son compagnon :

« Pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. »
« Et il disait : " Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume."
Jésus lui déclara : " Amen, je te le dis : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis." »

Il n’est jamais trop tard pour se tourner vers Jésus. Et la miséricorde de Dieu ce n’est pas seulement un pardon pour nos fautes, mais aussi le désir qu’a Jésus que nous soyons avec lui, et que nous y trouvions notre joie.
Ce n’est pas toujours ceux que l’on imaginerait les plus proches de Jésus qui font la preuve de plus d’humanité à son égard.

En conclusion.

Chers frères et sœurs, je vous laisse d’abord une question : comment nous situons-nous par rapport à Jésus : comme les disciples qui l’abandonnent, comme ceux qui le maltraitent, comme ceux qui font preuve d’humanité. Sachant que Jésus est présent aujourd’hui dans la personne des pauvres et de ceux qui souffrent, comment nous situons-nous ?

Et enfin, très concrètement, je vous invite vivement à relire la passion de Jésus au cours de cette semaine. Cela peut être aussi l’occasion de dépoussiérer très concrètement les crucifix de vos maisons avant d’y mettre un rameau de buis,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Isaïe 50,4-7.
  • Psaume 22(21),8-9.17-18a.19-20.22c-24a.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens 2,6-11.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 22,14-71.23,1-56 :

Quand l’heure du repas pascal fut venue, Jésus se mit à table, et les Apôtres avec lui. Il leur dit :
— « J’ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous avant de souffrir ! Car je vous le déclare : jamais plus je ne la mangerai jusqu’à ce qu’elle soit pleinement réalisée dans le royaume de Dieu. »
Il prit alors une coupe, il rendit grâce et dit :
— « Prenez, partagez entre vous. Car je vous le déclare : jamais plus désormais je ne boirai du fruit de la vigne jusqu’à ce que vienne le règne de Dieu. »
Puis il prit du pain ; après avoir rendu grâce, il le rompit et le leur donna, en disant :
— « Ceci est mon corps, donné pour vous. Faites cela en mémoire de moi. »
Et pour la coupe, il fit de même à la fin du repas, en disant :
— « Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang répandu pour vous.
Cependant la main de celui qui me livre est là, à côté de moi sur la table. En effet, le Fils de l’homme s’en va selon ce qui a été fixé. Mais malheureux l’homme qui le livre ! »

Les Apôtres commencèrent à se demander les uns aux autres lequel d’entre eux allait faire cela. Ils en arrivèrent à se quereller : lequel d’entre eux, à leur avis, était le plus grand. Mais il leur dit :
« Les rois des nations païennes leur commandent en maîtres, et ceux qui exercent le pouvoir sur elles se font appeler bienfaiteurs. Pour vous, rien de tel ! Au contraire, le plus grand d’entre vous doit prendre la place du plus jeune, et celui qui commande, la place de celui qui sert. Quel est en effet le plus grand : celui qui est à table, ou celui qui sert ? N’est-ce pas celui qui est à table ?
Eh bien moi, je suis au milieu de vous comme celui qui sert. Vous, vous avez tenu bon avec moi dans mes épreuves. Et moi, je dispose pour vous du Royaume, comme mon Père en a disposé pour moi. Ainsi vous mangerez et boirez à ma table dans mon Royaume, et vous siégerez sur des trônes pour juger les douze tribus d’Israël.
Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous passer au crible comme le froment. Mais j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne sombre pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères. »
Pierre lui dit :
— « Seigneur, avec toi, je suis prêt à aller en prison et à la mort. »
Jésus reprit :
— « Je te le déclare, Pierre : le coq ne chantera pas aujourd’hui avant que, par trois fois, tu aies affirmé que tu ne me connais pas. »
Puis il leur dit :
— « Quand je vous ai envoyés sans argent, ni sac, ni sandales, avez-vous manqué de quelque chose ? »
Ils lui répondirent :
— « Mais non. »
Jésus leur dit :
— « Eh bien maintenant, celui qui a de l’argent, qu’il en prenne, de même celui qui a un sac ; et celui qui n’a pas d’épée, qu’il vende son manteau pour en acheter une. Car, je vous le déclare : il faut que s’accomplisse en moi ce texte de l’Écriture : ’’Il a été compté avec les pécheurs’’. De fait, ce qui me concerne va se réaliser. »
Ils lui dirent :
— « Seigneur, voici deux épées. »
Il leur répondit
— « Cela suffit. »

Jésus sortit pour se rendre, comme d’habitude, au mont des Oliviers, et ses disciples le suivirent. Arrivé là, il leur dit :
— « Priez, pour ne pas entrer en tentation. » Puis il s’écarta à la distance d’un jet de pierre environ. Se mettant à genoux, il priait : « Père, si tu veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne. »
Alors, du ciel, lui apparut un ange qui le réconfortait.
Dans l’angoisse, Jésus priait avec plus d’insistance ; et sa sueur devint comme des gouttes de sang qui tombaient jusqu’à terre. Après cette prière, Jésus se leva et rejoignit ses disciples qu’il trouva endormis à force de tristesse.
Il leur dit :
— « Pourquoi dormez-vous ? Levez-vous et priez, pour ne pas entrer en tentation. »
Il parlait encore quand parut une foule de gens. Le nommé Judas, l’un des Douze, marchait à leur tête. Il s’approcha de Jésus pour l’embrasser. Jésus lui dit :
— « Judas, c’est par un baiser que tu livres le Fils de l’homme ? ».
Voyant ce qui allait se passer, ceux qui entouraient Jésus lui dirent :
— « Seigneur, faut-il frapper avec l’épée ? »
L’un d’eux frappa le serviteur du grand prêtre et lui trancha l’oreille droite.
Jésus répondit :
— « Laissez donc faire ! »
Et, touchant l’oreille de l’homme, il le guérit.
Jésus dit alors à ceux qui étaient venus l’arrêter, chefs des prêtres, officiers de la garde du Temple et anciens :
— « Suis-je donc un bandit, pour que vous soyez venus avec des épées et des bâtons ? Chaque jour, j’étais avec vous dans le Temple, et vous ne m’avez pas arrêté. Mais c’est maintenant votre heure, c’est la domination des ténèbres. »
Ils se saisirent de Jésus pour l’emmener et ils le firent entrer dans la maison du grand prêtre. Pierre suivait de loin.

Ils avaient allumé un feu au milieu de la cour et ils s’étaient tous assis là. Pierre était parmi eux. Une servante le vit assis près du feu ; elle le dévisagea et dit :
— « Celui-là aussi était avec lui. »
Mais il nia :
— « Femme, je ne le connais pas. »
Peu après, un autre dit en le voyant :
— « Toi aussi, tu en fais partie. »
Pierre répondit :
— « Non, je n’en suis pas. »
Environ une heure plus tard, un autre insistait :
— « C’est sûr : celui-là était avec lui, et d’ailleurs il est Galiléen. »
Pierre répondit :
— « Je ne vois pas ce que tu veux dire. »
Et à l’instant même, comme il parlait encore, un coq chanta.
Le Seigneur, se retournant, posa son regard sur Pierre ; et Pierre se rappela la parole que le Seigneur lui avait dite : « Avant que le coq chante aujourd’hui, tu m’auras renié trois fois. »
Il sortit et pleura amèrement.

Les hommes qui gardaient Jésus se moquaient de lui et le maltraitaient. Ils lui avaient voilé le visage, et ils l’interrogeaient : « Fais le prophète ! Qui est-ce qui t’a frappé ? »
Et ils lançaient contre lui beaucoup d’autres insultes.
Lorsqu’il fit jour, les anciens du peuple, chefs des prêtres et scribes, se réunirent, et ils l’emmenèrent devant leur grand conseil. Ils lui dirent :
— « Si tu es le Messie, dis-le nous. »
Il leur répondit :
— « Si je vous le dis, vous ne me croirez pas ; et si j’interroge, vous ne répondrez pas. Mais désormais le Fils de l’homme sera assis à la droite du Dieu Puissant. »
Tous lui dirent alors :
— « Tu es donc le Fils de Dieu ? »
Il leur répondit :
— « C’est vous qui dites que je le suis. »
Ils dirent alors :
— « Pourquoi nous faut-il encore un témoignage ? Nous-mêmes nous l’avons entendu de sa bouche. »
Ils se levèrent tous ensemble et l’emmenèrent chez Pilate. Ils se mirent alors à l’accuser :
— « Nous avons trouvé cet homme en train de semer le désordre dans notre nation : il empêche de payer l’impôt à l’empereur, et se dit le Roi Messie. »
Pilate l’interrogea :
— « Es-tu le roi des Juifs ? »
Jésus répondit :
— « C’est toi qui le dis. »
Pilate s’adressa aux chefs des prêtres et à la foule :
— « Je ne trouve chez cet homme aucun motif de condamnation. »
Mais ils insistaient :
— « Il soulève le peuple en enseignant dans tout le pays des Juifs, à partir de la Galilée jusqu’ici. »
À ces mots, Pilate demanda si l’homme était Galiléen. Apprenant qu’il relevait de l’autorité d’Hérode, il le renvoya à ce dernier, qui se trouvait lui aussi à Jérusalem en ces jours-là.

À la vue de Jésus, Hérode éprouva une grande joie : depuis longtemps il désirait le voir à cause de ce qu’il entendait dire de lui, et il espérait lui voir faire un miracle. Il lui posa beaucoup de questions, mais Jésus ne lui répondit rien.
Les chefs des prêtres et les scribes étaient là, et l’accusaient avec violence. Hérode, ainsi que ses gardes, le traita avec mépris et se moqua de lui : il le revêtit d’un manteau de couleur éclatante et le renvoya à Pilate.
Ce jour-là, Hérode et Pilate devinrent des amis, alors qu’auparavant ils étaient ennemis.

Alors Pilate convoqua les chefs des prêtres, les dirigeants et le peuple. Il leur dit :
— « Vous m’avez amené cet homme en l’accusant de mettre le désordre dans le peuple. Or, j’ai moi-même instruit l’affaire devant vous, et, parmi les faits dont vous l’accusez, je n’ai trouvé chez cet homme aucun motif de condamnation. D’ailleurs, Hérode non plus, puisqu’il nous l’a renvoyé.
En somme, cet homme n’a rien fait qui mérite la mort. Je vais donc le faire châtier et le relâcher. »
Ils se mirent à crier tous ensemble :
— « Mort à cet homme ! Relâche-nous Barabbas. »
Ce dernier avait été emprisonné pour un meurtre et pour une émeute survenue dans la ville.
Pilate, dans son désir de relâcher Jésus, leur adressa de nouveau la parole. Mais ils criaient :
— « Crucifie-le ! Crucifie-le ! »
Pour la troisième fois, il leur dit :
— « Quel mal a donc fait cet homme ? Je n’ai trouvé en lui aucun motif de condamnation à mort. Je vais donc le faire châtier, puis le relâcher. »
Mais eux insistaient à grands cris, réclamant qu’il soit crucifié ; et leurs cris s’amplifiaient.
Alors Pilate décida de satisfaire leur demande. Il relâcha le prisonnier condamné pour émeute et pour meurtre, celui qu’ils réclamaient, et il livra Jésus à leur bon plaisir.

Pendant qu’ils l’emmenaient, ils prirent un certain Simon de Cyrène, qui revenait des champs, et ils le chargèrent de la croix pour qu’il la porte derrière Jésus.
Le peuple, en grande foule, le suivait, ainsi que des femmes qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur Jésus.
Il se retourna et leur dit :
— « Femmes de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants ! Voici venir des jours où l’on dira : ’’Heureuses les femmes stériles, celles qui n’ont pas enfanté, celles qui n’ont pas allaité ! ’’ Alors on dira aux montagnes : "Tombez sur nous", et aux collines : ’’Cachez-nous’’. Car si l’on traite ainsi l’arbre vert, que deviendra l’arbre sec ? »

On emmenait encore avec Jésus deux autres, des malfaiteurs, pour les exécuter.
Lorsqu’on fut arrivé au lieu dit : Le Crâne, ou Calvaire, on mit Jésus en croix, avec les deux malfaiteurs, l’un à droite et l’autre à gauche.
Jésus disait : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font. »
Ils partagèrent ses vêtements et les tirèrent au sort.
On venait de crucifier Jésus et le peuple restait là à regarder. Les chefs ricanaient en disant : « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! »
Les soldats aussi se moquaient de lui. S’approchant pour lui donner de la boisson vinaigrée, ils lui disaient : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! »
Une inscription était placée au-dessus de sa tête : « Celui-ci est le roi des Juifs. »

L’un des malfaiteurs suspendus à la croix l’injuriait :
— « N’es-tu pas le Messie ? Sauve-toi toi-même, et nous avec ! »
Mais l’autre lui fit de vifs reproches :
— « Tu n’as donc aucune crainte de Dieu ! Tu es pourtant un condamné, toi aussi ! Et puis, pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. »
Et il disait :
— « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne. »
Jésus lui répondit :
— « Amen, je te le déclare : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »

Il était déjà presque midi ; l’obscurité se fit dans tout le pays jusqu’à trois heures, car le soleil s’était caché.
Le rideau du Temple se déchira par le milieu.
Alors, Jésus poussa un grand cri : « Père, entre tes mains je remets mon esprit. »
Et après avoir dit cela, il expira.

À la vue de ce qui s’était passé, le centurion rendait gloire à Dieu : « Sûrement, cet homme, c’était un juste. »
Et tous les gens qui s’étaient rassemblés pour ce spectacle, voyant ce qui était arrivé, s’en retournaient en se frappant la poitrine.

Tous ses amis se tenaient à distance, ainsi que les femmes qui le suivaient depuis la Galilée, et qui regardaient.
Alors arriva un membre du conseil, nommé Joseph ; c’était un homme bon et juste. Il n’avait donné son accord ni à leur délibération, ni à leurs actes. Il était d’Arimathie, ville de Judée, et il attendait le royaume de Dieu. Il alla trouver Pilate et demanda le corps de Jésus.
Puis il le descendit de la croix, l’enveloppa dans un linceul et le mit dans un sépulcre taillé dans le roc, où personne encore n’avait été déposé.

C’était le vendredi, et déjà brillaient les lumières du sabbat. Les femmes qui accompagnaient Jésus depuis la Galilée suivirent Joseph. Elles regardèrent le tombeau pour voir comment le corps avait été placé. Puis elles s’en retournèrent et préparèrent aromates et parfums.
Et, durant le sabbat, elles observèrent le repos prescrit.