Homélie du 4e dimanche du temps ordinaire

2 février 2015

Jésus l’interpella vivement : « Tais-toi ! Sors de cet homme. »

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Texte de l’homélie

Quand nous avons comme aujourd’hui le récit d’un miracle, il est bon d’être attentif à un certain nombre de choses.

Le lieu et le temps dans lequel se déroule ce miracle. Le temps ici c’est le jour du sabbat, le samedi, le jour où les Juifs font mémoire d’un Dieu qui s’est reposé selon la Bible, qui n’a pas prononcé de paroles. C’est intéressant de voir que le fait de prononcer une parole puissante comme celle du Christ cela veut dire qu’au fond, il complète dans sa parole l’œuvre créatrice de Dieu.
Lui-même est Dieu et les premiers à reconnaître la divinité de Jésus, étonnamment, ce sont les démons. Dans l’évangile de Marc, comme dans les autres évangiles, on voit bien que ce sont les démons qui reconnaissent d’abord l’évangile de Dieu manifesté en Jésus-Christ : « Éloigne-toi de nous ! Que nous veux-tu ? Nous savons qui tu es, le Saint, le Saint de Dieu ! »

Mais aussi, le fait que ce soit le jour du Sabbat, cela veut dire que le Seigneur va compléter, va recréer quelque chose de nouveau. Et il a cet homme en face de lui qui est possédé par un esprit impur. Les miracles, ce n’est pas simplement pour que Jésus montre ses supers pouvoirs, c’est pour annoncer à tous le Salut. Cet homme possédé de l’esprit impur, au fond, c’est le signe de toute l’humanité. Nous sommes nous aussi, hommes et femmes, dans le péché, avec les conséquences du péché en nous. Et nous sommes invités à nous laisser libérer par le Christ. Et cette libération par le Christ va faire que cet homme va, comme c’est le cas dans d’autres récits de guérisons, de miracles, être réintégré dans la vie sociale, réintégré dans le lien avec Dieu, parce qu’on imagine bien que cet homme ne pouvait pas aller à Jérusalem, il devait être connu de par ses agissements, de par sa possession. Il ne pouvait peut-être pas se marier, il ne pouvait peut-être pas exercer de travail.
C’est intéressant de voir que les miracles réintègrent la personne humaine dans son lien avec Dieu, dans son lien social, dans son lien aussi avec soi-même, et que les miracles que Jésus accomplis, c’est vraiment une recréation, le jour qui rappelle celui où Dieu n’a pas prononcé de paroles.

La Parole de Dieu est une parole performative, c’est-à-dire qu’elle accomplit ce qu’elle dit :

« Et Dieu dit, et cela fut. »

À la différence de nos paroles qui ne sont pas performatives : on a beau parfois donner des ordres, on voit bien qu’on a bien du mal à se faire entendre, que ce soit au sein de l’éducation ou dans la vie professionnelle, notre parole ne fait pas ce qu’elle dit. Et peut-être heureusement d’ailleurs ! parce que sinon ce pourrait être compliqué…
Mais la parole de Dieu, elle, accomplit ce qu’elle dit. Par sa seule parole, le Seigneur a libéré cet homme :

« Et toi, sors de cet homme ! »

C’est là que l’on voit l’œuvre de Dieu. Dans la puissance de la parole de Jésus. Et par la puissance de la parole de Jésus, nous sommes invités à nous laisser toucher. Cette parole que nous venons d’entendre, prononcée il y a deux mille ans, elle est aujourd’hui dans ta bouche et dans ton cœur. Elle a cette capacité d’agir aujourd’hui.

Bien souvent, lorsque je prépare des fiancés au mariage, ils me posent la question : « Que choisir comme texte pour notre messe de mariage ? »
Je leur dit de choisir des textes de la Parole de Dieu, pas des textes de sagesse ou autre, et il faut que cette Parole de Dieu vous accompagne durant votre vie, qu’elle soit une lumière. Et lorsque je célèbre une messe de mariage, j’invite l’assemblée à réfléchir : quel texte de la Parole de Dieu ai-je reçu lors de la célébration de mes noces ?
Cette Parole de Dieu nous accompagne. Parce que par la puissance du Saint Esprit, elle continue d’agir. C’est là toute la différence entre la parole de Dieu et la parole humaine aussi belle soit-elle. Il y a de très beaux textes de poésie, de sagesse, etc… mais cela n’a pas de comparaison avec la Parole de Dieu !

La Parole de Dieu porte autorité, elle renvoie à un auteur. C’est cela l’autorité : premièrement, elle nous fait auteur de nous-même, alors que le péché nous déresponsabilise, nous éloigne de nous-même. Jésus parle comme un homme qui a autorité, c’est-à-dire qui rend par sa parole les autres auteurs d’eux-mêmes. Deuxièmement, l’autorité a cet autre sens qui vient du latin augere et signifie ’faire grandir’. L’autorité a ce but de faire grandir par sa parole. Sa parole n’est pas comme celle des scribes, des répétiteurs, comme ceux qui rabâchent, mais au contraire comme un homme qui a autorité. Qui permet à l’autre de grandir.
L’on voit bien à travers ce récit du miracle comment le Seigneur par sa parole au sein-même de la synagogue, ce lieu où les Juifs se rassemblaient pour la prière, annonce la Parole de Dieu.

Être chrétien, c’est croire que, en Christ, toute la Parole de Dieu s’accomplit. Il est la dernière parole de Dieu. Après Lui, il n’y a pas de Parole de Dieu. En Lui s’accomplissent toutes les paroles depuis la Genèse et jusqu’à la fin des Temps.

Alors nous sommes invités à demander dans l’Eucharistie des forces. Nous venons puiser des forces parce que nous voyons que nous avons des résistances à cette Parole de Dieu. Il y a des Paroles très exigeantes, comme le pardon : pardonner à ses ennemis, cela n’a rien de facile. C’est pour cela que nous venons quetter auprès du Seigneur la grâce pour accomplir sa Parole, et demander que sa Parole s’accomplisse en nous, parce que cette Parole vient de Dieu, elle accomplit ce qu’elle dit.
Nous pouvons demander, pour nous-même mais aussi les uns pour les autres, cette grâce d’avoir une confiance renouvelée dans la Parole de Dieu, dans les promesses de Dieu. Quand on est attaqué, on se dit « mais jusqu’à quand, Seigneur, le juste sera mis de côté, sera même humilié, alors que le méchant, lui, triomphe ? Jusqu’à quand ? Est-ce que ta Parole, Seigneur a une valeur ? Est-ce que les promesses que tu nous as dites ont une valeur ? »
C’est là tout le sens de l’espérance. L’espérance est la confiance dans les promesses que Dieu nous a dites dans sa Parole.

Eh bien, parfois, oui, nous pouvons être attaqués. Même au niveau de la prière… je prie mais il n’y a aucune réponse… je suis attaqué de toutes parts… c’est de mal en pis… mais les psaumes en sont remplis de ces récits d’hommes et de femmes qui sont comme testés dans leur confiance en la Parole de Dieu.

Alors demandons nous-même un renouveau, demandons de connaître la Parole du Seigneur, que notre Bible ne soit pas simplement celle offerte pour notre première communion et bien rangée et recouverte de poussière… Cette Parole du Seigneur, il nous faut la scruter, la travailler, la manduquer.
Demandons aujourd’hui cette grâce au Seigneur, qu’Il nous relance dans cette confiance pour devenir auteur de notre vie.

Amen.


Références des lectures du jour :

  • Livre du Deutéronome 18,15-20.
  • Psaume 95(94),1-2.6-7abc.7d-9.
  • Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 7,32-35.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Marc 1,21-28 :

Jésus et ses disciples entrèrent à Capharnaüm. Aussitôt, le jour du sabbat, Jésus se rendit à la synagogue, et là, il enseignait.
On était frappé par son enseignement, car il enseignait en homme qui a autorité, et non pas comme les scribes.
Or, il y avait dans leur synagogue un homme tourmenté par un esprit impur, qui se mit à crier :
— « Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. »
Jésus l’interpella vivement :
— « Tais-toi ! Sors de cet homme. »
L’esprit impur le fit entrer en convulsions, puis, poussant un grand cri, sortit de lui.
Ils furent tous frappés de stupeur et se demandaient entre eux :
— « Qu’est-ce que cela veut dire ? Voilà un enseignement nouveau, donné avec autorité ! Il commande même aux esprits impurs, et ils lui obéissent. »
Sa renommée se répandit aussitôt partout, dans toute la région de la Galilée.