Homélie de la solennité du Christ Roi de l’Univers

24 novembre 2011

« Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : ’Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde.
Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi ! ’ »

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie :

La fête du Christ Roi de l’Univers vient conclure notre année liturgique, comme pour rappeler qu’à la fin des temps, tout sera placé sous l’amour du Père, sous la royauté du Père. Ce n’est pas un royaume à la manière du monde : « pour vous, que le premier se fasse le serviteur et l’esclave de tous ». Jésus l’a montré lui même en lavant les pieds de ses disciples.

Qu’est ce que l’autorité

L’autorité, c’est bien plus être au service de l’autre que de se faire servir par l’autre : dans toutes les formes du pouvoir : en politique, dans l’église , le société, en famille…
Le Seigneur nous appelle à exercer l’autorité à sa manière. Comme le rappelle le latin, augere c’est faire grandir : être au service de la croissance de l’autre. Notons la grande différence avec le pouvoir qui peut être assimilé à une domination. Cette autorité, cette royauté, est au service du bien de l’autre, ordonné à sa croissance.
Au fond, le Seigneur nous dit : « Regardez où vous me trouvez dans cette Royauté, si ce n’est au service des pauvres ? »

J’ai eu la grâce d’être aumônier de prison pendant 10 ans en Amérique Latine, dans des circonstances très difficiles. Cette expérience fût marquante dans ma vie de prêtre : cette présence de Jésus se fait sentir, alors que tout serait une manifestation de son absence. Etre au contact de personnes qui vivent ces situation de vulnérabilité extrême que décrit l’évangile peut donner un certain pouvoir à celui qui visite. Mais, selon les conseils de l’évangile, il faut se redire que l’on est en présence du Seigneur lui-même. Cette parole fait écho au Béatitudes, particulièrement la première : Bienheureux les pauvres, celle qui résume toutes les autres et qui se conjugue au présent, et fait écho à la Passion. C’est à ce moment que se manifeste la Gloire de Dieu, Jésus avec la couronne d’épines sur sa tête, qui arrache ces paroles au centurion : « Vraiment, cet homme était le fils de Dieu ».

Ne pas fuir les situations de vulnérabilité

Mettons-nous à l’école de Saint Jean, en regardant autrement les situations qui paraissent absurdes et contraires à l’évangile. N’ayons pas peur de nous mettre au contact de cette vulnérabilité, pour découvrir cette fameuse présence.
En dehors de nos situations habituelles d’autorité : santé, travail, et non pas dans ces catégories que cite Jésus, soyons attentifs à voir : « vous n’avez pas vu » ; la question est bien là.
Ceux qui sont appelés subissent déjà le jugement n’ont pas : vous n’avez pas vu son royaume qui était déjà là. Rentrent dans le royaume ceux qui le voient déjà, ceux qui y sont déjà.
Il faut demander au Seigneur la grâce particulière de voir ! la Foi est un regard. Etre au contact de personnes dans des situations de marginalité n’est pas si facile. Cela renvoie à nos propres incapacités à nos propres faiblesses. Elles deviennent comme une menace et non pas comme lieu de la rencontre…
Demandons au Seigneur d’ouvrir nos yeux, de ne pas avoir peur. Nous nous savons pauvres en capacités de relations, connaissant des situations d’impuissance. Lorsque l’on ne peut pas, le Christ nous dit : « Je suis là ».

L’humanité est sur la Croix, ou au pied de la Croix. Nous avons à vivre cette proféthie.
L’accueil de la faiblesse va être la cause, le lieu de notre salut : Dieu va y manifester sa puissance. Alors que nous sommes occupés à tout contrôler, obnubilés par le risque zéro…
Laissons-nous la porte ouverte à notre faiblesse, à notre frère qui peut nous aider. Nous sommes volontaires pour aider, mais il faut nous laisser aider et rejoindre ? et pourtant nous connaissons bien notre réaction habituelle : « non ! je n’en ai pas besoin, je me débrouille tout seul… »

Cet évangile est comme une épée à double tranchant : elle sonde notre cœur pour découvrir ce qui l‘habite. Faisons mémoire de cette parole de vie du Seigneur, car l’accueil de la vulnérabilité, c’est l’accueil même de la vie. C’est cela qui donne la véritable autorité : passés par l’eau et le feu, nous sommes sortis dans l’abondance.

Demandons, frères et sœurs bien-aimés, comme à la fin de cette année liturgique, à la toute fin de notre vie, lorsque les forces nous quittent, ayons cette attitude de foi, dans la fragilité, comme le nouveau-né. On relie naturellement ces deux périodes de la vie : la petite enfance et le grand-âge, et les appelle les deux grandes périodes bénies de la l’existence, parce que ce sont les moment où l’on se laisse faire et on accueille le Seigneur qui vient à notre rencontre dans le frère,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Ézéchiel 34,11-12.15-17.
  • Psaume 23(22),1-2ab.2c-3.4.5.6.
  • Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 15,20-26.28.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 25,31-46 :

Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il siégera sur son trône de gloire.
Toutes les nations seront rassemblées devant lui ; il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des chèvres : il placera les brebis à sa droite, et les chèvres à sa gauche.

Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : ’Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde.
Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi ! ’

Alors les justes lui répondront : ’Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu… ? tu avais donc faim, et nous t’avons nourri ? tu avais soif, et nous t’avons donné à boire ?
tu étais un étranger, et nous t’avons accueilli ? tu étais nu, et nous t’avons habillé ?
tu étais malade ou en prison… Quand sommes-nous venus jusqu’à toi ? ’
Et le Roi leur répondra : ’Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. ’

Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche : ’Allez-vous-en loin de moi, maudits, dans le feu éternel préparé pour le démon et ses anges.
Car j’avais faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’avais soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ; j’étais un étranger, et vous ne m’avez pas accueilli ; j’étais nu, et vous ne m’avez pas habillé ; j’étais malade et en prison, et vous ne m’avez pas visité. ’

Alors ils répondront, eux aussi : ’Seigneur, quand est-ce que nous t’avons vu avoir faim et soif, être nu, étranger, malade ou en prison, sans nous mettre à ton service ? ’
Il leur répondra : ’Amen, je vous le dis : chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces petits, à moi non plus vous ne l’avez pas fait. ’

Et ils s’en iront, ceux-ci au châtiment éternel, et les justes, à la vie éternelle. »