Homélie du 13e dimanche du Temps Ordinaire

1er juillet 2019

Il dit à un autre : « Suis-moi. »
L’homme répondit : « Seigneur, permets-moi d’aller d’abord enterrer mon père. »
Mais Jésus répliqua : « Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, pars, et annonce le règne de Dieu. »

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Texte de l’homélie :

De nombreux couples venus ici en retraite de préparation au mariage assistent à cette célébration. Ils répondent à l’appel du Seigneur, et c’est providentiel qu’il nous soit donné de méditer aujourd’hui sur l’appel à Le suivre. Le concile Vatican II le dit clairement : l’appel à la sainteté est pour tous, et dans la vie matrimoniale, c’est un appel singulier à être signe visible de cette alliance du Christ avec l’Eglise. C’est une invitation à témoigner de manière visible - par votre amour, chers fiancés - de cette grâce invisible, ce lien invisible qui nous unit avec le Seigneur.
Mais on voit bien qu’il y a des conditions pour répondre à l’appel de Dieu.

Une route parsemée d’épreuves

Il s’agit des différentes épreuves que le Seigneur propose sur la route de ceux qui veulent Le suivre.

« Je te suivrais partout où tu iras… »

Et c’est certainement l’intention que vous avez au début de votre vie matrimoniale : vous êtes dans une logique de don, d’amour mutuel, portés que vous êtes par l’émotion, par la grâce…

Et Jésus répond :

« Les oiseaux du ciel ont un nid, les renards des terriers, mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où poser la tête… »

C’est à dire que suivre le Christ, c’est aussi accepter un certain inconfort matériel, mais aussi un inconfort spirituel : nous sommes tous en chemin, nous ne sommes pas encore aboutis, et il en est de même dans votre couple. Si vous vivez dans cette dimension de suite du Seigneur, en fonction de là où vous en êtes chacun de votre vie spirituelle, vous aurez cette épreuve de confiance en Dieu.

« Le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où poser la tête » : Sa confiance n’est pas simplement dans le matériel, dans le confort, mais dans le lien avec Son Père.

Dans la bénédiction finale du mariage, il est même dit à un moment :

« Que le bonheur ne vous éloigne pas de Dieu… »

Et c’est ce que le Seigneur nous rappelle ici : « Accepte cet inconfort intérieur… »
Acceptez aussi de ne pas être comblé par l’autre, c’est toujours un piège. Etre comblé, c’est être comme l’enfant avec sa mère, dans une relation fusionnelle.
Acceptez qu’il y ait une place pour Dieu : c’est tout le sens des noces de Cana où il y a un manque au cœur même de cette fête. Il en va de même au cœur même de chaque relation conjugale.

Quand l’appel du Seigneur devient une épreuve…

Il y a une autre épreuve avec celle de l’appel du Seigneur, avec celui qui lui dit qu’il veut Le suive, avec cette réponse de Jésus. Ou encore lorsqu’Il appelle une autre personne à Le suivre :

— « Suis-moi ! »
— « Permets-moi d’abord d’enterrer mon père… »

C’est un commandement d’enterrer les morts, c’est même une œuvre de miséricorde pour l’Eglise, pour le Chrétien de célébrer les funérailles d’un être cher…
Mais à travers cet appel de laisser les morts enterrer les morts, il y a un appel à laisser ce qui est mort pour suivre le Christ.

C’est aussi un appel à renoncer à ce qui peut être mortifère dans votre couple, notre chacun de nos vies, consacrées ou non. Le Seigneur n’appelle pas à laisser grandir les choses mortifères en nous : il les appelle à devenir sources de vie.
Rappelons-nous que nous avons cette vocation à porter du fruit en abondance, et à laisser les morts enterrer les morts, à laisser sur le bord du chemin ce qui n’est pas source de vie et de fécondité.

Nous sommes parfois attachés à nos œuvres de ténèbres, c’est le principe du péché. Le pécheur est parfois attaché car plus confortable dans les ténèbres que dans la lumière et l’Ecriture en parle :

« Ils fuient la lumière de peur qu’on les découvre… »

Il est possible qu’il y ait des modes de fonctionnement dans votre couple qui sont toxiques, des comportements dans nos vies qui sont mortifères, ce sont des synonymes…
Il peut y avoir des modes de fonctionnement qui ne laissent pas la vie du Christ entrer, à commencer par notre façon de vivre les sacrements : c’est par cette manière que le Seigneur peut entrer dans notre vie. Ce n’est pas la seule, certes, car il y a la prière, la méditation de l’Ecriture, par la vie en communauté…
Le sacrement de mariage auquel vous vous préparez est une source de vie, une source d’eau vive à condition que vous laissiez les œuvres mortes de côté.

Le suivre sans regarder en arrière !

« Je te suivrai, Seigneur, mais laisse-moi d’abord faire mes Adieux aux gens de ma maison… »

Quoi de plus naturel ?

Dans l’enseignement avant la messe, nous avons vu qu’il y a une certaine forme de radicalité à adopter pour entrer dans une vie de couple, et c’est la même chose pour la vie consacrée : il y a un arrachement.

Il y a des affections qui sont bien légitimes - « les gens de ma maison » : nos parents, nos frères, nos sœurs, nos amis… - qui sont beaux, et c’est un arrachement, un renoncement que le Seigneur nous demande pour pouvoir Le suivre, chacun selon notre état de vie : il y a un prix à payer.

Pourtant, on en parle relativement peu : lorsqu’on prépare au mariage, on rentre dans un combat spirituel, comme dans tout chemin chrétien.
Et à travers ce passage, le Seigneur nous encourage à être déterminés. Au début de l’évangile, il nous est dit :

« Jésus, le visage déterminé, prit la route de Jérusalem. »

Il est même dit : « le visage endurci ». Il est comme finalisé, et ainsi, Il est décidé à ne pas se détourner de Son chemin, Il est prêt à aller jusqu’au bout du don. Et comme on le sait, cela Le conduira à l’offrande de tout Lui-même…

Chers amis qui vous préparez au mariage, et vous chers frères et sœurs, soyons des personnes déterminées, des gens finalisés, qui ont cet objectif et le contemplent. Et parce qu’ils voient qu’il y a quelque chose de beau, ils laissent de côté ce qui peut paraître attrayant, mais distrait de l’objectif initial.

Demandons cette force d’être profondément convaincus.

Et on le sait bien, choisir c’est renoncer : vous vous êtes choisis et avez renoncé à tant d’autres personnes.
Suivre le Christ, c’est bien ça !

On comprend ainsi que beaucoup n’aient pas envie de suivre Le Seigneur parce que c’est exigeant : il y a quelque chose de radical. Et ce n’est pas parce que vous avez choisi une vie matrimoniale qu’il n’y a pas de radicalité.
Nous avons choisi une vie religieuse avec sa radicalité, mais nous apprenons aussi beaucoup des couples dans leur radicalité quand ils se mettent à la suite du Christ. Au milieu du monde, ils sont obligés de se garder purs, de garder leur cœur en Dieu alors qu’ils rencontrent tant de forces adverses dans le monde professionnel, dans la manière de penser de cette société qui n’est pas conforme au Christ.

Nous allons donc demander cette grâce, cette communion, de nous enraciner d’avantage dans cette détermination, dans ce choix du Seigneur, de ne pas nous laisser distraire par des choses même légitimes, mais qui au fond ne construisent pas.

Demandons à la Vierge Marie, Celle qui - par définition - a fait ce choix du Seigneur, qu’Elle nous aide sur ce chemin,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Premier livre des Rois 19,16b.19-21
  • Psaume 16(15),1.2a.5.7-8.9-10.2b.11.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Galates 5,1.13-18.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 9,51-62 :

Comme s’accomplissait le temps où il allait être enlevé au ciel, Jésus, le visage déterminé, prit la route de Jérusalem.
Il envoya, en avant de lui, des messagers ; ceux-ci se mirent en route et entrèrent dans un village de Samaritains pour préparer sa venue. Mais on refusa de le recevoir, parce qu’il se dirigeait vers Jérusalem.
Voyant cela, les disciples Jacques et Jean dirent :
— « Seigneur, veux-tu que nous ordonnions qu’un feu tombe du ciel et les détruise ? »
Mais Jésus, se retournant, les réprimanda. Puis ils partirent pour un autre village.

En cours de route, un homme dit à Jésus :
— « Je te suivrai partout où tu iras. »
Jésus lui déclara :
— « Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids ; mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête. »

Il dit à un autre :
— « Suis-moi. »
L’homme répondit :
— « Seigneur, permets-moi d’aller d’abord enterrer mon père. »
Mais Jésus répliqua :
— « Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, pars, et annonce le règne de Dieu. »

Un autre encore lui dit :
— « Je te suivrai, Seigneur ; mais laisse-moi d’abord faire mes adieux aux gens de ma maison. »
Jésus lui répondit :
— « Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le royaume de Dieu. »