Homélie du 17e dimanche du Temps Ordinaire

1er août 2019

« Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira. »

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Texte de l’homélie :

« Demandez, vous obtiendrez ; cherchez, vous trouverez ; frappez, la porte vous sera ouverte. Celui qui demande reçoit ; celui qui cherche trouve ; et pour celui qui frappe, la porte s’ouvre. »

Frères et sœurs bien-aimés, qu’est-ce qui fait que cette parole de Jésus ne se réalise pas toujours ? De fait, j’imagine qu’il vous est arrivé de demander à Dieu sans obtenir. Pourtant, nous retrouvons cette affirmation de Jésus à plusieurs reprises dans l’évangile : par exemple en saint Marc :

« Tout ce que vous demandez en priant, croyez que vous l’avez déjà reçu. » (Mc 11,24)

Ce matin, je voudrais avancer trois raisons possibles qui font que nous ne recevons pas ce que nous demandons dans la prière.
La première est relative à la foi. La seconde à ce que nous demandons. La troisième à la persévérance.

La foi

La prière de demande implique une relation vivante avec Dieu. Nous le voyons dans la première lecture avec Abraham. La négociation d’Abraham se fait au terme de la rencontre près du chêne de Mambré, au verset 17 :

« Le Seigneur s’était dit : ’Est-ce que je vais cacher à Abraham ce que je veux faire ?’ »

Dieu lance une perche à Abraham pour qu’il puisse intercéder. La prière d’Abraham a d’autant plus de poids auprès de Dieu qu’il est proche de lui, qu’il est en communion avec lui.

De la même manière, nous voyons comment la prière de demande s’insère dans le Notre Père. La prière de demande n’arrive pas au début. Elle n’est pas parachutée ainsi. Comme le dit bien le catéchisme :

« C’est le propre de l’amour que de penser d’abord à Celui que nous aimons. » (CEC 2804)

La prière de demande est précédée par une démarche où l’on essaie d’entrer dans les vues de Dieu : « Père, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne. »
Un préliminaire de la prière de demande est en quelque sorte d’entrer dans les préoccupations de Dieu. Or, la préoccupation essentielle de Dieu, c’est de sauver tous les hommes.

Peut-être notre foi est-elle un peu hésitante (cf. Mt 21, 22) :

« Autant Jésus est attristé par le "manque de foi" de ses proches (Mc 6,6) et le « peu de foi » de ses disciples (Mt 8,26), autant il est saisi d’admiration devant la « grande foi » du centurion romain (Mt 8,10) et de la cananéenne (Mt 15,28). » (CEC 2610)

Saint Matthieu nous le dit :

« Jésus ne fit pas beaucoup de miracles à cet endroit-là, à cause de leur manque de foi. » (Mt 13, 58)

Saint Jacques le dit à sa manière :

« 06 Mais qu’il demande avec foi, sans la moindre hésitation, car celui qui hésite ressemble aux vagues de la mer que le vent agite et soulève. 07 Qu’il ne s’imagine pas, cet homme-là, qu’il recevra du Seigneur quoi que ce soit, 08 s’il est partagé, instable dans toute sa conduite. » (Jc 1, 6-8)

Il ne suffit pas seulement de croire en Jésus. Il ne suffit pas de croire, dans l’abstrait, que Dieu peut intervenir. Cette foi de conviction est un assentiment intellectuel à la possibilité de miracles aujourd’hui. Il faut encore demander le don de foi. C’est de cette foi dont il est question au chapitre 17 de saint Luc :

« Les Apôtres dirent au Seigneur : « Augmente en nous la foi ! »
Le Seigneur répondit : « Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : “Déracine-toi et va te planter dans la mer”, et il vous aurait obéi. » (Lc 17, 5-6 ; cf. Mc 9, 24 ; Lc 22, 32)

Dans saint Matthieu, Jésus dit encore :

« Tout ce que vous demanderez dans votre prière avec foi, vous le recevrez » (Mt 21, 22)

Ce don de foi est le don de croire que des miracles se produiront aujourd’hui. Nous laissons alors libre champ à l’Esprit pour que des miracles se produisent.
Ce don de foi suppose une coopération de notre part. Il faut poser des actes concrets de foi, ce qui permet à cette foi de grandir et de s’affermir. Cette foi n’est pas un vague espoir que Dieu pourrait intervenir. Ce n’est pas seulement la foi en certaines doctrines. C’est la foi qui fait que les choses arrivent.

Ce que nous demandons

Demandes mauvaises

Une autre raison pour laquelle nous ne sommes pas exaucés peut venir de ce que nous demandons. Dans certains cas, cela peut être évident si nous prions pour des choses qui ne sont pas bonnes. Dieu n’exauce pas une demande mauvaise : « Vous demandez, mais vous ne recevez rien ; en effet, vos demandes sont mauvaises, puisque c’est pour tout dépenser en plaisirs » (Jc 4, 3)
Dans bien des situations, notre demande est tout à fait bonne et pourtant elle n’est pas exaucée. Que faut-il alors comprendre ?

Remettre dans la perspective du Royaume

« La demande chrétienne est centrée sur le désir et la recherche du Royaume qui vient, conformément à l’enseignement de Jésus (cf. Mt 6,10 ; Mt 6,33 ; Lc 11,2 ; Lc 11,13). Il y a une hiérarchie dans les demandes : d’abord le Royaume, ensuite ce qui est nécessaire pour l’accueillir et pour coopérer à sa venue. » (CEC 2632)

« Cherchez d’abord le Royaume et sa justice et tout cela vous sera donné par surcroît. » (Mt 6, 33)

Jésus prononce cette parole à la fin d’un discours où il évoque ce qui est l’essentiel des préoccupations vitales : que vais-je manger et boire, de quoi vais-je me vêtir ? Nous vivons dans une société de consommation qui cultive l’insatisfaction du « jamais assez ». Or Jésus nous rappelle :

« A quoi sert à un homme de gagner le monde s’il en vient à perdre son âme ? » (Marc 8, 36)

Il remet les priorités dans l’ordre :

« La vie n’est-elle pas plus que la nourriture et le corps plus que le vêtement ? » (Mt 6, 25)

Resituer cette demande dans la globalité de notre vie

Il est très intéressant de voir ce que Jésus nous invite à demander dans le Notre Père : l’une des demandes concerne davantage le présent : « Donne-nous le pain dont nous avons besoin pour chaque jour. » ; une autre le passé : « Pardonne-nous nos péchés, car nous-mêmes, nous pardonnons aussi à tous ceux qui ont des torts envers nous. » ; et la troisième le futur : « ne nous laisse pas entrer en tentation. »

Dans le premier point, nous avons vu que la prière a comme arrière-plan notre relation avec Dieu. Dans ce deuxième point, Jésus nous invite à resituer la prière de demande dans la globalité de notre vie : présent, passé, futur. Au-delà d’une demande précise, c’est nous-mêmes que nous présentons devant Dieu. On ne peut pas isoler la demande de celui qui la fait.

  1. le pain représente ce dont nous avons besoin pour vivre aujourd’hui. Cela évoque la manne qui tombait chaque jour dans le désert pour éduquer le peuple à la confiance au jour le jour.
  2. le pardon concerne ce que nous avons fait de mal mais aussi ce que les autres nous ont fait de mal. Il s’agit aussi de se pardonner à soi-même. Comme le dit le Pape François, « celui dont le cœur est fermé ne peut accueillir les dons de Dieu. »
  3. dans la dernière demande (chez saint Matthieu : « ne nous laisse pas entrer en tentation mais délivre-nous du mal »), nous demandons une protection pour ne pas être complices du mal (nous ne présumons pas de nos forces). Nous savons aussi que la plus grave des tentations c’est de douter de l’amour de Dieu. Enfin nous demandons à ne pas être écrasé par le mal et le Malin. Il s’agit alors d’un mal qui nous est extérieur.

Quand on adresse une prière de demande à Dieu, on l’adresse avec tout ce que l’on est. Nous sortons en quelque sorte de l’instant présent pour nous présenter tels que nous sommes devant Dieu.

La persévérance

La relation avec Dieu est en quelque sorte l’alpha et l’oméga de notre prière de demande. Au delà de ce que Dieu peut nous accorder, ce qui l’intéresse, c’est la relation qu’il peut avoir avec nous.

« Le Donateur est plus précieux que le don accordé. » (CEC 2604)

Si la prière se fonde sur notre relation avec Dieu, elle nous fait aussi approfondir cette relation et c’est le lieu d’un combat. Toute une dynamique se met en route à partir du moment où nous faisons une demande à Dieu. Nous ne sommes pas devant un distributeur mais devant quelqu’un de vivant.

Dans la persévérance, nous essayons de mieux comprendre ce que Dieu veut nous donner s’il semble ne pas nous accorder ce que nous lui demandons. La prière est le lieu d’un combat car, comme le dit saint Paul :

« l’Esprit vient au secours de notre faiblesse ; car nous ne savons que demander pour prier comme il faut ; mais l’Esprit lui-même intercède pour nous en des gémissements ineffables, et Celui qui sonde les cœurs sait quel est le désir de l’Esprit et que son intercession pour les saints correspond aux vues de Dieu » (Rm 8,26-27)

Comme le dit le catéchisme :

« Notre Père sait bien ce qu’il nous faut, avant que nous le lui demandions (cf. Mt 6,8) mais il attend notre demande parce que la dignité de ses enfants est dans leur liberté. Or il faut prier avec son Esprit de liberté, pour pouvoir connaître en vérité son désir. (cf. Rm 8,27) » (CEC 2736)

Les difficultés rencontrées dans la prière nous provoquent à réajuster notre prière tant sur ce que nous demandons que sur la manière dont nous le demandons. Elles nous provoquent aussi à être attentifs à ce que Dieu peut nous demander.

Dieu veut avant tout nous donner l’Esprit Saint :

« Quel père parmi vous donnerait un serpent à son fils qui lui demande un poisson ? ou un scorpion, quand il demande un œuf ?
Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père céleste donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »

Finalement, nous sommes appelés à ouvrir notre cœur à l’Esprit Saint. Nos problèmes ne sont pas résolus pour autant par un coup de baguette magique, mais désormais nous ne les vivons plus seuls, nous les vivons avec lui.

En conclusion, je vous invite à vous tourner vers la Vierge Marie. Ce n’est pas par hasard si les prières qui passent par elles ont plus de chance d’être exaucées. C’est le sens de la prière du « Souvenez-vous » que l’on attribue à saint Bernard :

« Souvenez-vous, ô Très miséricordieuse Vierge Marie, qu’on n’a jamais entendu dire qu’aucun de ceux qui ont eu recours à votre protection, imploré votre assistance ou réclamé vos suffrages, ait été abandonné. Animé de cette confiance,
Ô Vierge des vierges, ô ma Mère, je viens vers Vous, et gémissant sous le poids de mes péchés, je me prosterne à vos pieds.

Ô Mère du Verbe Incarné, ne méprisez pas mes prières, mais écoutez-les favorablement et daignez les exaucer. Amen. »

Je vous invite à prendre cette semaine un temps sous le regard de la Vierge Marie pour essayer de voir quelles peuvent être les raisons pour lesquelles votre prière n’est pas exaucée comme vous l’aimeriez.

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre de la Genèse 18,20-32.
  • Psaume 138(137),1-2a.2bc-3.6-7ab.7c-8.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens 2,12-14.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 11,1-13 :

Il arriva que Jésus, en un certain lieu, était en prière. Quand il eut terminé, un de ses disciples lui demanda :
— « Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean le Baptiste, lui aussi, l’a appris à ses disciples. »
Il leur répondit :
— « Quand vous priez, dites : Père, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne.
Donne-nous le pain dont nous avons besoin pour chaque jour.
Pardonne-nous nos péchés, car nous-mêmes, nous pardonnons aussi à tous ceux qui ont des torts envers nous. Et ne nous laisse pas entrer en tentation. »

Jésus leur dit encore : « Imaginez que l’un de vous ait un ami et aille le trouver au milieu de la nuit pour lui demander : “Mon ami, prête-moi trois pains, car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi, et je n’ai rien à lui offrir.”
Et si, de l’intérieur, l’autre lui répond : “Ne viens pas m’importuner ! La porte est déjà fermée ; mes enfants et moi, nous sommes couchés. Je ne puis pas me lever pour te donner quelque chose.”
Eh bien ! je vous le dis : même s’il ne se lève pas pour donner par amitié, il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami, et il lui donnera tout ce qu’il lui faut.

Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira.
En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira.
Quel père parmi vous, quand son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu du poisson ? ou lui donnera un scorpion quand il demande un œuf ?
Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »