Homélie du 17e dimanche du temps ordinaire

26 juillet 2016

« Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira.
En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira. »

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie :

Chers frères et sœurs,

Ainsi, vous avez compris que le thème que la liturgie nous offre à travers les lectures de ce dimanche nous invite à réfléchir sur la prière.

Abraham négocie avec Dieu

J’aime bien cette première lecture où on voit la négociation.

Abraham, qui est un fin négociateur, s’adresse au Seigneur par rapport à Sodome et Gomorrhe, qui tente Dieu, qui insulte Dieu, qui va être détruite de par ses propres actes, c’est comme cela que c’est formulé dans l’Ancien Testament.
Dieu va la détruire, mais en fait ce sont ses actes mêmes qui la conduisent à l’anéantissement. Et puis cette négociation étonnante : et si on trouve 5 justes, et s’il n ’y en n’a que quelques-uns, …

Il y a deux choses que je retiens de ce passage :

Notre prière, si elle est personnelle, n’est jamais solitaire

Nous avons, dans cette retraite de préparation au mariage, à laquelle vous participez chers fiancés, parlé du sacrement du mariage qui aussi est personnelle, mais engage dans votre vie les autres, vos amis, vos familles, les enfants qui naîtront de votre amour et tous ceux qui vous sont proches et moins proches, le témoignage que vous donnerez.
Je trouve que c’est intéressant de dire que dans notre prière, notre prière retentit sur les autres, c’est la communion des saints.

Notre prière porte les intentions, on les porte dans les deux grandes prières officielles de l’ Église : la liturgie de l’Eucharistie à laquelle nous participons, qui est la grande prière de l’Église, où l’Église entière s’adresse par le Christ, dans l’Esprit, au Père et dans notre prière d’offices, pour nous comme religieux qui sommes au cœur, il y a toute une partie d’intercession, nous sommes là pour d’autres, c’est pour vous que je me consacre, dans ma prière j’inclue d’autres connus et inconnus.

Je trouve cela beau dans cet exemple qui nous est donné avec Abraham, il y en a d’autres qui attendent notre prière, on en prend pas assez compte parce qu’on est beaucoup dans une démarche très moderne, individualiste, on voit ses propres difficultés et du coup on pense à soi, on est un peu autocentré.
Il y a tout un cheminement à faire et les lectures d’aujourd’hui nous y invitent.

La prière, par définition, est un décentrement

À la différence de méditation par exemple que nous offre la sagesse asiatique. Il n’y a strictement rien à voir entre les prières chrétiennes et des sagesses asiatiques ou autres, des méditations transcendantales où on écoute sa respiration par exemple, être connecté aux énergies de la nature c’est bien mais ce n’est pas cela qui va te sauver !

Dans la prière chrétienne il y a quelque chose de très particulier.
Il faut faire attention parce qu’on sent bien qu’il y a dans cette démarche plutôt individualiste qui fait qu’on serait plutôt dans quelque chose qui flatte notre ego, alors qu’au contraire c’est ce décentrement de soi-même pour d’autres.
Moi ça me motive, parce qu’évidemment être dans une vie religieuse des années durant, et dans la prière, on a besoin de se remotiver, d’autres comptent sur notre prière pour avancer et de même vous aussi, chers fiancés, dans votre sacrement de mariage, dans votre vie de prière en couple et en famille, vous portez les intentions de nos frères les hommes.

Le Notre Père

On voit bien, ça n’est plus simplement le Créateur et la créature qui sont en dialogue, c’est vraiment cette filiation divine, c’est Jésus qui est Fils qui nous révèle, qui nous fait entrer dans cette filiation, dans cette confiance.

On voit les deux parties du Notre Père qui sont très connues et que vous connaissez par cœur, c’est d’abord s’adresser à Dieu et puis ensuite offrir nos besoins.
C’est beau que chacun de nous d’abord rende gloire à Dieu et que dans notre prière l’action de grâce soit présente, que ce ne soit pas simplement des demandes.

Rendre gloire à Dieu

On voit toujours au moment des examens, en fin d’année scolaire, il y a une vente de cierges qui explose dans les églises, les grands-mères mettent des cierges, les étudiants aussi s’avancent de manière très improbable, rentrent dans l’église au cas où ça marche…

Ne soyons pas simplement comme des consommateurs, on en a besoin bien sûr quand on a un coup dur, quand on est un peu en fragilisé, mais une vraie prière mature c’est d’abord de rendre gloire, de remercier, d’être dans cette action de grâce parce que Dieu est Dieu tout simplement.
C’est cette dimension d’adoration, on remercie tout simplement parce que Dieu et Dieu, on remercie, que ton règne vienne, que ton nom soit sanctifié, je suis comme un fils face à un père, remerciant, étant de l’action de grâce.

Dans notre prière, demandons au Seigneur avec audace

Et puis il y a la deuxième partie qui nous a peut-être plus familière, qui est cette partie de demande.
J’aime bien cette phrase du curé d’Ars :

« L’homme est un pauvre qui doit tout demander à Dieu. »

Nous parlions juste avant la messe avec les fiancés de la question de la fidélité et combien nous demandons la grâce de la fidélité, combien parfois nous pouvant être tentés. Le chrétien prend conscience qu’il doit tout demander à Dieu, de son néant, de sa fragilité absolue :

« Sans moi vous ne pouvez rien faire. »

Ce que nous dit le Seigneur après et peut-être là-dessus on peut se laisser interpeller, où en est-on de l’audace dans la prière ?

Cet ami qui frappe à la porte. En fait les gens étaient couché devant la porte, on fermait la porte et tout le monde se couchait à la queue leu leu, ouvrir la porte c’était réveiller tout le monde, le faire entrer c’était tout un bazar pas possible en pleine nuit.

Où en es-tu de l’audace dans la prière ?
Est-ce que tu crois à cette parole « demandez on vous donnera, cherchez vous trouverez, frappez on vous ouvrira » ?
Ce qui n’est absolument pas une évidence. Il y a des personnes qui s’éloignent du Seigneur parce qu’ils ont demandé, par exemple la guérison des enfants, l’enfant la guérison d’une grand-mère par exemple, ils ne l’ont pas obtenue.

Il faut se réveiller, que ce ne soit pas une prière somnolente, que ce ne soit pas une prière un peu de salon, que ce soit un cri !

C’est vrai aussi que parfois il y a des choses qu’on demande, on prie pour la paix, on demande la paix, on demande des vocations, on demande des grâces pour le monde entier et on se dit comment le Seigneur répond à notre prière ? Et pourtant nous avons foi dans cette parole :

« Demandez et vous donnera, cherchez vous trouverez, frappez on vous ouvrira. »

La prière vient changer notre regard.

Il y a des choses que le Seigneur donne, et on a pu peut-être expérimentées ces grâces à un moment donné où on a demandé quelque chose, mais la prière c’est d’abord ce regard de dire, en quoi ce fait de frapper, de chercher, déjà me met en chemin pour découvrir Dieu qui est à l’œuvre ? Ce n’est pas simplement donne-moi un bonbon, donne-moi un bonbon, et on vous donnera.

Cela va beaucoup plus loin, j’acquiers un regard dans la prière qui est différent, dans l’intimité avec Jésus, dans l’intimité avec les saints, avec la Vierge Marie, dans la fréquentation des sacrements. La vie part de l’intérieur, j’acquiers un regard qui me fait découvrir que Dieu est à l’œuvre au milieu de ce monde, au milieu de nous-mêmes, alors que nous sommes loin d’être convertis, au milieu de ce monde qui est encore bouleversé, malade, comme nous le dit Jérémie :

« Le cœur de l’homme est compliqué et malade. »

Jusqu’à la fin des temps on sera confronté au mal, justement la prière nous demande d’être fort face au mal, de ne pas nous laisser décourager face au mal, mais au contraire d’avoir cette confiance que Dieu aura le dernier mot dans notre existence, comme il aura le dernier mot sur l’humanité au jugement dernier, quand il viendra juger les vivants et les morts, quand il se révélera toute chose.

Demandons au Seigneur un regain dans la prière.

C’est difficile de prier parce qu’il y a une forme de mort à soi-même d’une certaine manière, parce qu’autant dans les activités de chaque jour on est, nous, à la manœuvre et c’est nous qui décidons, on fait ceci, on fait cela, on fait un camp, une retraite, mais dans la prière la rencontre est de l’ordre de la grâce. On ne la provoque pas par des techniques, ou des effets de groupe où on provoquerait la venue de Dieu dans la prière, ça n’est pas du tout ça, c’est Dieu lui-même qui agit.
C’est en cela que c’est difficile, on est dans une grande pauvreté dans la prière, c’est la dimension pascale de mort et de résurrection, d’accepter d’être simplement celui qui attend.
On l’a vu par exemple avec Mère Teresa, qui dans son carnet intime n’a pas été consolée dans la prière pendant des années, pourtant elle était présente, là. Pourtant on le sait bien aussi, ça a été une femme d’action.

C’est intéressant d’accepter cette grande confiance, cette remise de soi-même dans la prière pour que Dieu, lorsqu’il le jugera bon, vienne frapper et que nous puissions ouvrir. Puisqu’on a aussi pris l’habitude de chercher pour trouver, lui aussi du coup, quand il viendra nous chercher, qu’il puisse nous trouver.

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre de la Genèse 18,20-32.
  • Psaume 138(137),1-2a.2bc-3.6-7ab.7c-8.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens 2,12-14.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 11,1-13 :

Il arriva que Jésus, en un certain lieu, était en prière.
Quand il eut terminé, un de ses disciples lui demanda :
— « Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean le Baptiste, lui aussi, l’a appris à ses disciples. »
Il leur répondit :
— « Quand vous priez, dites : Père, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne.
Donne-nous le pain dont nous avons besoin pour chaque jour.
Pardonne-nous nos péchés, car nous-mêmes, nous pardonnons aussi à tous ceux qui ont des torts envers nous. Et ne nous laisse pas entrer en tentation. »

Jésus leur dit encore :
— « Imaginez que l’un de vous ait un ami et aille le trouver au milieu de la nuit pour lui demander :
“Mon ami, prête-moi trois pains, car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi, et je n’ai rien à lui offrir.”
Et si, de l’intérieur, l’autre lui répond : “Ne viens pas m’importuner ! La porte est déjà fermée ; mes enfants et moi, nous sommes couchés. Je ne puis pas me lever pour te donner quelque chose.”
Eh bien ! je vous le dis : même s’il ne se lève pas pour donner par amitié, il se lèvera à cause du sans-gêne de cet ami, et il lui donnera tout ce qu’il lui faut.

Moi, je vous dis : Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira.
En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira.
Quel père parmi vous, quand son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu du poisson ? ou lui donnera un scorpion quand il demande un œuf ?

Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! »