Homélie du 32e dimanche du Temps Ordinaire

9 novembre 2021

« Amen, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis dans le Trésor plus que tous les autres.
Car tous, ils ont pris sur leur superflu, mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a mis tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre. »

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Texte de l’homélie :

Nous pouvons nous arrêter sur trois ou quatre points, étant donné la richesse des textes que nous avons aujourd’hui
Tout d’abord, il ne vous a pas échappé qu’il y a une pauvre veuve dont Jésus loue le comportement dans l’Évangile. Il y a une autre veuve la veuve, celle de Sarepta, dans la première lecture, en faveur de laquelle Dieu a accompli le miracle par les mains du prophète Élie. Dieu accomplit ce miracle de la multiplication de la farine et de l’huile. Ces deux pauvres veuves, ce sont des pauvres tout court donc des « petits ».

Dieu se penche avec prédilection toujours sur les « petits »

Nous le savons bien aujourd’hui encore. Mais, il faut tout de même admettre qu’aujourd’hui, du fait de la civilisation dans laquelle nous sommes, nous sommes fascinés par la force par la puissance et par l’efficacité et la réussite. Or les pauvres les petits ne sont pas des puissants ni souvent des gens qui réussissent, et le monde les traite souvent avec mépris. Avec les anglicismes habituels, est-ce qu on ne les traite pas souvent de loosers, c’est à dire de perdants que l’on méprise.

Dieu ne méprise pas les petits. Il les met toujours en avant

C’est la pauvre veuve qui a déposé les deux petites pièces qui est loué, dont le comportement est loué par Jésus, et non pas tous les riches de Jérusalem qui ont déposé sans doute de grosses sommes. D’ailleurs, ces sommes qui était sans doute très utiles - ne l’oublions pas - pour l’entretien de l’énorme édifice qu’était le temple de Jérusalem.

Ensuite, je vous propose de nous arrêter sur deux ou trois choses. Tout d’abord, il y a ce miracle extraordinaire dans la première lecture, entre les mains du prophète Élie pour la veuve de Sarepta. Elle n’a rien. Elle a juste une poignée de farine, dit-elle, et un peu d’huile dans un vase. Et la multiplication infinie de ses biens qui va arriver dans sa maison annonce bien sûr la multiplication des pains à laquelle nous assistons dans l’évangile entre les mains de Jésus.

Une préfiguration de la multiplication des pains

Ce sont d’authentiques miracles qui ont lieu. Ce ne sont pas des symboles, ce sont des faits, de même que la multiplication des pains entre les mains de Jésus. Ce sont des faits par lesquels Dieu veut nous faire signe, Lui qui nous donne tout.

En effet Jésus, n’a pas multiplié les pains tous les jours dans l’Évangile. De même qu’en entre les mains du prophète Élie, l’huile et la farine ne se sont pas multipliés tous les jours : c’est arrivé une fois, ce qui veut dire que Dieu fait signe comme Il fait signe aujourd’hui par les miracles qui ont lieu à Lourdes. Ils n’ont pas lieu tous les jours, mais ils sont bien marquants et dont le dernier reconnu a eu lieu dans notre diocèse, nous le savons bien, en faveur de la sœur Bernadette Moriau.
Par ces signes le Seigneur veut nous rappeler que, sans cesse, nous vivons de sa richesse et de ses dons infinis.

Bien sûr, là, c’est un peu de farine et un peu d’huile. Mais, nous arrive-t-il quelquefois de nous étonner sur le miracle constant, le miracle sans cesse renouvelé, le miracle surabondant de la Terre qui nourrit les hommes ?

Par leur expertise car c’est difficile à compter, les statisticiens nous disent qu’aujourd’hui, nous sommes quelque chose comme six ou sept milliards d’hommes sur la Terre. Observons que la Terre est le travail de l’homme, et qu’elle nourrit ces sept milliards d’hommes.
Mais, par exemple, si on avait dit à nos contemporains de l’an 1800 - vous savez, au temps de Napoléon, l’humanité était déjà très nombreuse, mais on était loin des six ou des sept milliards – qu’un jour, la Terre aurait nourri six milliards ou sept milliards d’hommes, il est fort peu probable qu’ils nous auraient ri au nez ! Ils nous auraient dit : « Mais c’est impossible ! Comment voulez-vous que ça arrive… »

Or, non seulement ça arrive, mais il y a même des moments où, il y a encore peu d’années par exemple, dans notre propre pays, on nous parlait de surproduction agricole. Donc, non seulement les dons de Dieu sont sans cesse miraculeux, mais ils sont réellement surabondants.

Bien sûr, il y a dans le monde des territoires dont les peuples meurent de faim. Ça n’est jamais à cause de la planète Terre, mais toujours à cause des violences ou des injustices des hommes qui se déchirent entre eux ou qui refusent le partage.
Donc le miracle qui nous est relaté aujourd’hui dans la première lecture nous rappelle le miracle constant, tous les ans renouvelé, du don que Dieu fait à l’homme - moyennant le travail de l’homme - mais par la terre.

Le don de la vie est un miracle constant et abondant

C’est la même chose pour notre vie : est-ce que nous pensons quelquefois que la vie que nous vivons aujourd’hui, ici et maintenant, est sans cesse le don que nous recevons de Dieu. Ça n’est pas une chose toute simple : c’est un miracle constant et permanent. Dieu, ici et maintenant, nous donne la vie.

Pour faire un peu de mots savants, les philosophes nous dirait que Dieu nous « soutient dans l’être », autrement dit, nous ne serions pas vivants si Dieu ne nous donnait pas constamment la vie. Miracle constant et surabondant.
Et je crois que le seigneur nous appelle à nous arrêter sur ce miracle constant et surabondant pour vraiment Lui rendre grâce, pour Le remercier des dons qu’Il nous fait puisqu’Il nous donne tout.

« Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme.
Dieu les bénit et leur dit : « Soyez féconds et multipliez-vous, remplissez la terre et soumettez-la. Soyez les maîtres des poissons de la mer, des oiseaux du ciel, et de tous les animaux qui vont et viennent sur la terre. »

Dans la deuxième lecture, il y a aussi une chose importante : il s’agit de l’épître aux Hébreux. Toute l’épître aux Hébreux - dont les spécialistes nous disent que nous ignorons l’auteur - est consacrée au sacerdoce du Christ. En effet, seul le Christ est le « vrai prêtre ».

Qu’est-ce que c’est qu’un prête ?

Le prêtre, c’est le personnage qui unit Dieu à l’Humanité, qui fait le lien. Il est le pontife par excellence. Étymologiquement, le pontife est celui qui « fait un pont » entre le Ciel et la Terre, entre Dieu et l’Homme. Or, seul le Christ est le Grand Prêtre et comme dit l’épître aux Hébreux : « comme Il est sain car Il est lui-même le fils de Dieu, Il n’a pas besoin d’offrir des sacrifices pour Son propre péché puisqu’Il s’offre Lui-même tout entier sur la Croix pour notre vie et pour notre salut. »

Et les prêtres que nous avons sur la Terre, et qui sont consacrés solennellement pour la mission qu’ils accomplissent, sont des hommes bien sûr comme les autres, mais qui, par cette consécration peuvent participer au sacrifice, au sacerdoce du Christ Lui-même.

Alors, nous devons toujours nous référer au sacerdoce du Christ Lui-même.
C’est bien pour ça que, quand il célèbre la messe, le prêtre est invité par le rite liturgique à tenir ses mains étendues comme ceci. Ça n’est nullement une fantaisie, cela veut dire que le prêtre, quand il célèbre la messe, est configuré au Christ prêtre. Au moment où il célèbre la messe, le prêtre alors est un autre Christ. Et c’est vraiment là qu’il exerce sa mission, en tant que consacré pour cette mission.

La multiplication est une incitation au partage

Et puis enfin, il y a bien sûr dans l’évangile, avec l’histoire de la pauvre veuve, la question du partage. La pauvre veuve, nous dit Jésus, a mis « de son indigence » pour participer à la vie du Temple.

Tout d’abord, quand on donne à Dieu, on est toujours récompensé par Dieu. Et d’autre part, nous ne sommes jamais les propriétaires des biens de la Terre, si indispensables qu’ils nous soient pour notre chemin ici bas.
J’aurais envie d’employer un mot que l’on entend chez le notaire : quand on a un acte à signer, il nous est bien dit que nous ne sommes pas les propriétaires des biens de cette Terre quelqu’ils soient, mais nous sommes les usufruitiers.
C’est bien Dieu Notre Père qui est le maître de toute chose. Et, parce que nous en avons un besoin absolu, Il nous donne en surabondance tous les biens de la Terre. Mais, nous en sommes toujours les usufruitiers.

« Dieu dit encore : « Je vous donne toute plante qui porte sa semence sur toute la surface de la terre, et tout arbre dont le fruit porte sa semence : telle sera votre nourriture.
À tous les animaux de la terre, à tous les oiseaux du ciel, à tout ce qui va et vient sur la terre et qui a souffle de vie, je donne comme nourriture toute herbe verte. »
Et ce fut ainsi. »

Donc, comme on dit encore chez le notaire, nous sommes invités à gérer cela « en bon père de famille ». Vous savez, c’est l’expression juridique par laquelle on décrit ces choses-là :

Nous sommes les usufruitiers invités à gérer les biens de la terre en bon père de famille

Or, si je gère les biens de la terre en bon père de famille, je ne peux pas ne pas partager puisque, évidemment, les biens ne sont pas faits pour moi seul mais ils sont faits pour tous ceux qui m’entourent et dont j’ai la charge.

Alors bien sûr, quand on répète cette invitation à la générosité, ça ne veut pas dire qu’il faut sortir de la prudence. Par exemple, le père de famille ou la mère de famille ont d’abord le devoir d’utiliser les biens qu’ils ont à leur disposition pour leur famille, c’est évident ! Je ne peux pas enlever le pain de la bouche de mes enfants pour le donner à une autre famille. Mais, Il nous invite au partage car nous sommes les usufruitiers.

Ainsi, demandons tout simplement au Seigneur la grâce de toujours mieux savoir nous situer dans la Création, car c’est ce que Dieu nous apprend ici. Demandons-nous de nous situer par rapport aux autres et par rapport à Lui. Puissions, par rapport à Dieu, nous souvenir que nous recevons tout. On a pas à faire le détail, nous recevons tout ! Tout ce que nous recevons, nous l’avons pour le chemin de notre vie sur la terre, pour parcourir le grand pèlerinage sur la terre.

Nous ne sommes que des usufruitiers. Dieu nous donne tout cela pour que nous le gérions au mieux, que nous en vivions nous-mêmes et que nous aidions les autres à en vivre autour de nous.

Enfin, comme les grands saints, sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, Sainte Faustine, mais aussi Charles de Foucault, à nous abandonner toujours davantage à l’amour miséricordieux du Seigneur. C’est ce qu’a fait la veuve de Sarepta : elle a eu confiance en la parole d’Élie, et elle a donc eu confiance dans l’amour de son Dieu et elle a été récompensée immédiatement.

Demandons au Seigneur d’entrer dans la même sagesse et dans la même dynamique de confiance envers Notre Père du Ciel,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Premier livre des Rois 17,10-16.
  • Psaume 146(145),7.8-9a.9bc-10.
  • Lettre aux Hébreux 9,24-28.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 12,38-44 :

En ce temps-là, dans son enseignement, Jésus disait : « Méfiez-vous des scribes, qui tiennent à se promener en vêtements d’apparat et qui aiment les salutations sur les places publiques, les sièges d’honneur dans les synagogues, et les places d’honneur dans les dîners.
Ils dévorent les biens des veuves et, pour l’apparence, ils font de longues prières : ils seront d’autant plus sévèrement jugés. »

Jésus s’était assis dans le Temple en face de la salle du trésor, et regardait comment la foule y mettait de l’argent. Beaucoup de riches y mettaient de grosses sommes.
Une pauvre veuve s’avança et mit deux petites pièces de monnaie.
Jésus appela ses disciples et leur déclara : « Amen, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis dans le Trésor plus que tous les autres.
Car tous, ils ont pris sur leur superflu, mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a mis tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre. »