Homélie du 3e dimanche du Temps Ordinaire

30 janvier 2017

À partir de ce moment, Jésus commença à proclamer : « Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche. »

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Texte de l’homélie

Lorsqu’on lit une lecture à l’intérieur de la liturgie, comme c’est le cas de la messe, il est toujours intéressant de la restituer dans le temps liturgique.
Nous sommes au début du temps « ordinaire », c’est le troisième dimanche du temps ordinaire. Mais cette appellation « temps ordinaire » n’est pas très heureuse, comme s’il était moindre que les autres temps.

Nous venons de sortir du temps de l’Avent et de Noël, j’appellerai donc volontiers ce temps le temps de l’Incarnation.

Tous appelés

Le royaume de Dieu est tout proche. Le royaume de Dieu s’approche des uns et des autres, il est ouvert à tous. Le fait que Jésus Lui-même s’installe en Galilée, le carrefour des nations, c’est un signe que ce royaume de Dieu n’est plus réservé à un peuple choisi, un peuple élu, à quelques parfaits pour ainsi dire, comme cela a été l’occasion d’hérésies dans l’Église.
Toute l’humanité est appelée à la table du Seigneur.

Ce temps de l’Incarnation se réalise par des appels. C’est un Dieu qui intervient dans l’histoire.

Le Dieu de l’Ancien Testament n’est pas, contrairement aux dieux de la mythologie, un Dieu lointain. C’est un Dieu qui intervient à l’intérieur de notre histoire, dans notre temps, dans notre humanité, en appelant à sa suite des hommes et des femmes. Nous voyons aujourd’hui dans les lectures l’appel des premiers disciples : Pierre, Jacques et son frère Jean.

C’est le temps de l’Incarnation dans le sens où Dieu va se révéler par cet appel qu’il fait à des personnes concrètes de le suivre et d’annoncer que le royaume de Dieu s’approche.
Même du temps de Jésus, pour rencontrer Jésus, c’était rencontrer ses disciples, ses apôtres.

Rappelons-nous du passage où Jésus envoie ses apôtres en mission et où ils reviennent tout excités de voir que ce qu’ils font opère ! Les malades sont guéris, les morts sont ressuscités, les lépreux son purifiés, ils ont délivré des hommes possédés de Satan.
Déjà du temps de Jésus, rencontrer Jésus, c’était rencontrer ses disciples.

Dieu se manifeste par des hommes imparfaits

Nous sommes la religion de l’Incarnation. Nous sommes la religion de la médiation.
Par des personnes concrètes, Dieu veut se manifester et continue à se manifester comme il l’a fait par la personne même du Christ.
Nous avons un regard de foi à apporter devant tous ceux qui nous sont donnés, comme pasteurs, témoins de l’Évangile, catéchistes, qui sont certes des personnes imparfaites par ailleurs, mais Dieu n’attend pas notre perfection pour nous appeler, sinon il pourrait attendre bien longtemps ! Nous le savons tous, nous sommes faits de creux et bosses.
Connaissant la trahison de pierre, Jésus l’appelle.

Le Seigneur met toute sa confiance dans notre humanité, certes blessée par le péché, mais une humanité d’où s’approche le Seigneur et qu’il vient toucher. Il vient répandre sur nos blessures le baume de sa guérison, de son Esprit Saint.

Un appel disproportionné

Nous sommes la religion de la médiation et par conséquent aussi nous sommes la religion de la disproportion.
Est-ce que le Seigneur ne s’est pas trompé en voulant fonder une Eglise, a-t-il bien pensé aux conséquences ? Parce qu’entre nos humanités blessées et ce à quoi Dieu nous appelle, comme baptisés déjà, et puis au service du peuple de Dieu comme laïc ou comme consacré, il y a une distance considérable.

Prenons un exemple : le mariage. Quand on prend au sérieux le sacrement du mariage, c’est être témoin de l’amour de Dieu pour son peuple, témoin de l’amour de Jésus pour son Église, qui s’est livré pour elle. C’est rentrer dans une logique de don et de don total.
Quand on voit cela, quand on voit nos égoïsmes et nos orgueils, nos égocentrismes, on se demande si le Seigneur ne s’est pas trompé.
Mais c’est le sacrement qui nous rend dignes, ce n’est pas nous qui sommes dignes du sacrement.

Pour l’eucharistie, c’est la même chose. Qui sommes-nous pour nous approcher de la table du Seigneur ? Qui suis-je pour dire "ceci est mon corps, ceci est mon sang", et réellement par la grâce du Seigneur le Corps et le Sang de Jésus serons présents sur l’autel.

Quand on se met face à cela, il y a comme un abîme, on est pris de vertige.
Nous sommes la religion du vertige parce qu’il y a cette confiance totale dans le Seigneur qui, en intervenant dans nos histoires personnelles ou communautaires, continue d’appeler.
C’est important d’en faire un mémoire parce qu’on peut vite perdre confiance, on peut vite perdre l’espérance : peut-être que le Seigneur nous abandonne ?

C’est providentiel de pouvoir lire ce passage-là justement, dans ce temps-là. Il nous rappelle qu’il continue d’appeler et que cet appel et un appel à témoigner de la lumière.

Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière et sur les habitants du Pays de l’ombre une lumière a resplendi."

Nous sommes fils de la lumière
Reprenons confiance, frères et sœurs bien-aimés, dans cet appel de Dieu, dans cette grâce de Dieu. Rendons grâce pour toute l’œuvre accomplie par nos mains, parce que c’est ainsi que le Seigneur continue de se manifester, par nos paroles, aussi imparfaites soient-elles.
Le philosophe Pascal nous dit :

« L’Église c’est le Christ continué. »

Et bien avant lui, Jehanne d’Arc disait à ce sujet :

« L’Église et le Christ, c’est tout un. »

Rendons grâce au Seigneur pour notre Église. Rendons grâce à tous ceux qui veulent être témoins du Christ.
Demandons au Seigneur qu’il continue de nous appeler, qu’il continue par nos humanités fragiles, mais portées par la grâce de Dieu, de faire de nous des témoins de sa lumière.

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre d’Isaïe 8,23b.9,1-3.
  • Psaume 27(26),1.4abcd.13-14.
  • Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 1,10-13.17.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 4,12-23 :

Quand Jésus apprit l’arrestation de Jean le Baptiste, il se retira en Galilée.
Il quitta Nazareth et vint habiter à Capharnaüm, ville située au bord de la mer de Galilée, dans les territoires de Zabulon et de Nephtali.
C’était pour que soit accomplie la parole prononcée par le prophète Isaïe : ‘Pays de Zabulon et pays de Nephtali, route de la mer et pays au-delà du Jourdain, Galilée des nations !
Le peuple qui habitait dans les ténèbres a vu une grande lumière. Sur ceux qui habitaient dans le pays et l’ombre de la mort, une lumière s’est levée.’

À partir de ce moment, Jésus commença à proclamer : « Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche. »

Comme il marchait le long de la mer de Galilée, il vit deux frères, Simon, appelé Pierre, et son frère André, qui jetaient leurs filets dans la mer ; car c’étaient des pêcheurs.
Jésus leur dit : « Venez à ma suite, et je vous ferai pêcheurs d’hommes. »
Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent.
De là, il avança et il vit deux autres frères, Jacques, fils de Zébédée, et son frère Jean, qui étaient dans la barque avec leur père, en train de réparer leurs filets. Il les appela.
Aussitôt, laissant la barque et leur père, ils le suivirent.

Jésus parcourait toute la Galilée ; il enseignait dans leurs synagogues, proclamait l’Évangile du Royaume, guérissait toute maladie et toute infirmité dans le peuple.