Homélie du quatrième dimanche de Pâques

2 mai 2023

« Amen, amen, je vous le dis : Moi, je suis la porte des brebis. Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des bandits ; mais les brebis ne les ont pas écoutés. »

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Texte de l’homélie

Chers frères et sœurs,

Quel est le premier commandement ? Comme vous le savez bien c’est : « Sh’ma Israël Adonaï elohenou, Sh’ma Israël Adonaï ehad ! »

« Écoute Israël, le Seigneur est ton Dieu, Il est l’unique ! »

C’est ce que récitent deux fois par jour tous ceux qui observent la foi juive et ses commandements. On l’utilise plus particulièrement au moment de la mort, pour ce passage de ceux qui quittent ce monde. Le premier commandement c’est donc d’écouter.

A l’inverse, le péché est précisément marqué par la surdité. Non pas celle qui est causée par la maladie, le handicap ou la vieillesse… Il s’agit de cette surdité qui vient d’un décentrement de soi-même. Nous pouvons constater que nous en sommes tous frappés, et c’est pour cela qu’écouter est un commandement.
Car, au commencement de tout, il y a une parole créatrice. Ensuite, il y a les dix commandement que l’on appelle « La Parole ».

Et le fait d’écouter la parole fait que l’on découvre aussi que la Parole du Seigneur nous façonne. Bien sûr, il y a d’autre paroles que celles qui viennent de Lui qui viennent frapper nos oreilles.

Et on le voit bien dans l’Évangile :

« Moi, je suis venu pour que les brebis aient la vie, la vie en abondance. »

Mais, parfois, il y a des paroles de mort comme celles que l’on a pu entendre dans sa famille : « tu es nul ! », « tu ne vaux rien… », « Bon à rien », « Menteur », et le danger est que ces paroles deviennent une croyance. On appelle cela d’ailleurs les fausses croyances ou les croyances limitantes et qui font qu’il y a quelque chose de mortifère qui se développe en nous.

Et Jésus nous dit qu’Il vient pour que nous ayons la Vie Éternelle, la vie en abondance ! Il vient déraciner en nous ces fausses croyances, ces fausses paroles qui ont été prononcées sur nous-mêmes. Là où il y a eu des paroles de mort, Il vient prononcer une parole de vie et nous tirer des abîmes.
C’est tout le mystère pascal que nous célébrons durant ces semaines.

Durant ces semaines, nous faisons mémoire de la Pâque, de ce passage de la mort à la vie. Cela vient aussi du fait d’être disciple.

Et il est intéressant de voir que, dans la manière de nous construire et le rôle que les cinq sens ont dans notre construction personnelle, il y a l’ouïe qui construit en nous l’art d’être disciple.
Au fond, être disciple, c’est savoir écouter. Et c’est pour cela qu’au début de la règle de Saint Benoît, il y a aussi ce conseil :

« Écoute mon fils les enseignements de ton père. »

« Écoute ! » Parce qu’écouter c’est accueillir, rentrer dans un conversion. Écouter c’est rentrer dans une parole de vie.
Alors, le Seigneur nous demande de laisser ces paroles qui ont pu être prononcées sur nous mais qui ne sont pas vraies, et d’écouter Sa parole.

« A qui irions-nous Seigneur, tu as les paroles de la vie éternelle ! »

Ainsi, nous sommes attentifs à cette conversion de l’oreille. Nous le savons, la foi rentre particulièrement par les oreilles, et Saint Paul nous le rappelle d’ailleurs. En Latin, on le dit ainsi :

« Fides ex auditum. »

« La foi entre par l’oreille » car elle reçoit la prédication, puis elle touche le cœur.

Alors, il y a un chemin de conversion à opérer pour faire confiance à la parole du Seigneur.
Pourquoi sommes-nous dans cette assemblée si ce n’est parce que nous lui faisons confiance ? Pourquoi croyons-nous que, dans quelques instants, le Seigneur sera présent sur l’autel par Son corps et par Son sang ? C’est parce que l’on croit à Sa parole et parce qu’on l’a écoutée.

Tout à l’heure, celles et ceux qui recevront l’Eucharistie répondront « Amen ! » ce qui signifie « C’est vrai ! », car nous croyons que cette parole est véridique. C’est une parole vivante, car elle me redonne vie. Le pain que nous allons recevoir est un pain de vie.

C’est vrai que le fait d’écouter c’est se convertir en nous décentrant de nous-mêmes. Ce n’est pas spontané et c’est à cela que ce commandement nous aide : « Chema Israël ! ».

De même, Jésus nous commande de nous aimer les uns les autres car aimer n’est pas spontané, nous ne le savons que trop !

Ainsi, sortir, tendre l’oreille et se laisser toucher par la Parole du Seigneur qui nous façonne demande une conversion. Et c’est la grande conversion de notre vie. Le Seigneur vient nous donner cette parole pour que nous ayons la vie, l vie en abondance.
Accueillir Jésus comme le Bon Pasteur, c’est écouter Sa parole, lui faire confiance.

Dans notre société, il y a d’autre paroles qui viennent frapper nos oreilles, à commencer par le rapport d’amour dans le couple, le rapport à la Foi, à l’argent, et tant d’autres choses. Des paroles sont prononcées qui ne sont pas des paroles vivantes.
Soyons attentifs aux plus jeunes en leur demandant quelles paroles ils écoutent.

A quoi donnez-vous crédit ? qu’est-ce qui vous façonne intérieurement, intellectuellement ? C’est important car la parole façonne, on le voit au commencement du monde :

« Dieu dit et cela fut… »

Il a ainsi façonné le ciel et la terre ! Cela demande un discernement, car toutes les paroles ne se valent pas, loin s’en faut…

Ainsi, en ce dimanche du Bon Pasteur, le Seigneur nous demande de tendre l’oreille. Nous pouvons répondre à Son appel si, d’abord, on s’habite intérieurement. Cela nous rend attentifs à ce qu’il se passe à l’intérieur, on est à l’écoute.

La difficulté à accueillir les appels du Seigneur peut venir précisément de toutes ces forces centrifuges qui nous amènent loin de nous-mêmes, loin du Seigneur qui parle à notre cœur… Chacun peut le constater dans sa vie.

Et l’on voit combien la société moderne fait tout pour nous emmener loin de nous-même, jusqu’à devenir les analphabètes de nous-même… D’où l’importance de la vie contemplative qui nous appelle à être à l’écoute dans le silence et la prière pour laisser résonner en nous Sa parole de vie.

La vie contemplative est une conversion qui nous demande de sortir de ce brouhaha, de laisser cet activisme et cette tentation de mettre dans vingt-quatre heures plus que vingt-quatre heures. C’est Bernanos qui disait en 1946 :

« La société moderne est un complot contre toute forme de vie intérieure. »

Cette phrase est intéressante car elle semble se vérifier de tout temps. Par le trop plein d’activité, notre société nous emmènent loin de la Parole de Dieu.

Demandons alors au Seigneur de nous laisser toucher intérieurement par cette parole de Jésus qui conduit notre âme, Lui le gardien de nos vies, comme le dit Saint Pierre dans la deuxième lecture. Il est le berger de toute l’humanité, de notre humanité. Laissons-nous conduire et soyons attentifs à quelque chose qui nous est dit.

Demandons cette grâce les uns pour les autres pour que nous puissions être les témoins d’un Dieu qui nous appelle des ténèbres à Son admirable lumière,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre des Actes des Apôtres 2,14a.36-41.
  • Psaume 23(22),1-2ab.2c-3.4.5.6.
  • Première lettre de saint Pierre Apôtre 2,20b-25.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 10,1-10 :

En ce temps-là, Jésus déclara : « Amen, amen, je vous le dis : celui qui entre dans l’enclos des brebis sans passer par la porte, mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et un bandit.
Celui qui entre par la porte, c’est le pasteur, le berger des brebis. Le portier lui ouvre, et les brebis écoutent sa voix. Ses brebis à lui, il les appelle chacune par son nom, et il les fait sortir.
Quand il a poussé dehors toutes les siennes, il marche à leur tête, et les brebis le suivent, car elles connaissent sa voix.
Jamais elles ne suivront un étranger, mais elles s’enfuiront loin de lui, car elles ne connaissent pas la voix des étrangers. »

Jésus employa cette image pour s’adresser à eux, mais eux ne comprirent pas de quoi il leur parlait. C’est pourquoi Jésus reprit la parole :
« Amen, amen, je vous le dis : Moi, je suis la porte des brebis. Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des bandits ; mais les brebis ne les ont pas écoutés.
Moi, je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra entrer ; il pourra sortir et trouver un pâturage.
Le voleur ne vient que pour voler, égorger, faire périr. Moi, je suis venu pour que les brebis aient la vie, la vie en abondance. »