Homélie de la solennité de la Sainte Trinité

31 mai 2013

« Tout ce que possède le Père est à moi ; l’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître »

Écouter l’homélie

Texte de l’homélie :

« J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire.
Mais pour l’instant, vous ne pouvez pas les porter. »

Jésus a beaucoup de choses à nous dire, à nous enseigner. Et nous savons que, dans sa pédagogie, Dieu nous a préparés petit à petit pour nous amener à cette révélation du vrai Dieu. A partir d’Abraham et de sa foi, où il commence à suivre le Seigneur, à découvrir que le Seigneur est un et petit à petit à partir aussi de ce texte des proverbes qui parle de la Sagesse, qui a créé. On ne parle pas encore de trinité, mais déjà on a ce sens de cette sagesse qui était avant la Création (et le mot avant revient tout le temps dans le texte), de découvrir qu’il est le maître d’œuvre du monde, qu’il y a cette intériorité en Dieu, cette œuvre commune, cette joie à se communiquer, à être avec les enfants des hommes.

Comment expliquer la Trinité ?

Quand nous parlons de la Trinité, si nous avons à répondre de notre foi, bien souvent nous sommes ennuyés : qui pourrait se lever ici et faire un discours sur la Trinité ? Quand les gens commencent à faire un discours sur la Trinité, même les théologiens, cela nous laisse souvent un peu perplexes, parce qu’on ne peut pas l’expliquer. Comme dit Saint Paul, c’est cet accès que Jésus nous donne dans sa prière à Dieu.

Nous vivons du mystère de la Trinité mais nous sommes bien ennuyés bien souvent de l’expliquer, et pourtant nous sommes faits à l’image de Dieu ; et nous le comprenons peut-être un peu mystérieusement puisque nous entendons dans le faîte, le sommet de la Révélation que Dieu est amour, et nous savons que nous sommes faits et que nous n’aurons de repos que d’aimer et d’être aimé, d’être aimants et d’être aimés. Comme le dit saint Augustin :

« Le mystère de la Trinité, c’est que, en Dieu qui est amour, il y a l’aimant, il y a l’aimé et il y a l’amour. » (Saint Augustin)

Un mystère si grand qu’il contient notre vie entière

Toute notre vie est comprise dans ce mystère de la Trinité. Nous y sommes comme enserrés : si vous écoutez bien les textes de la messe et de l’office, la prière liturgique, c’est la prière officielle qui s’enracine dans celle de Jésus, puisqu’elle est aussi cette prière de l’Église qui répond à Jésus, mais aussi celle de Jésus dans son humanité qui répond à l’amour du Père. Toute la prière de l’ Église est toujours unifiée. Ce n’est pas, comme on le fait souvent dans notre dévotion personnelle qui est de s’adresser à l’une ou à l’autre personne de la Trinité. Cette prière de l’Église toujours unifiée : nous nous adressons au Père par le Fils et dans l’Esprit-Saint.

Chaque fois que nous prions, la Trinité est convoquée, présente. Et c’est dans ce mystère que nous baignons. Souvent nous en sommes comme enserrés, pénétrés, mais nous ne nous rendons pas compte, peut-être comme les poissons de la mer qui ne se rendent pas compte. Si j’osais cette comparaison, nous savons bien que dans notre être même, nous sommes faits à 71% d’eau, de la même manière, nous sommes faits de cette image de Dieu. Et cela, nous le reprenons aussi quand nous commençons notre prière, nous faisons le signe de la croix : au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit

Et Jésus nous entraîne, Il nous donne Son esprit pour que nous entrions dans Sa prière. Il désire, Il va faire grandir cette vie d’union. Cette vie d’union qu’Il a avec le Père, Il nous la donne, nous la confie. Il nous donne cet accès au Père.

Chose que nous avons comme bien propre au Père, dans ce mystère de la Trinité, de l’intimité de Dieu. Cette image, comme je vous le disais, a grandi dans la Révélation, elle a évolué. Il a fallu toute une préparation. Et dans notre vie personnelle, il faut aussi que ce mystère se développe. Mais, nous n’allons pas le comprendre d ‘une manière intellectuelle. Et Jésus insiste : l’Esprit de vérité va nous guider dans notre prière, Nous sommes guidés par l’Esprit-Saint pour avancer vers la Révélation de la vérité toute entière. Cette vérité qui n’est pas des concepts, mais qui est la personne de Jésus dans Sa relation au Père.

« Tout ce qui appartient au Père est à moi. »

Et Dieu, quand Il se donne, Il se donne tout entier, jusque dans sa Passion, dans l’Eucharistie. Alors c’est à nous d’apprendre à porter, de pouvoir laisser se développer, avoir un cœur pauvre, c’est à dire un cœur ouvert, vide, écoutant, pour laisser grandir ce mystère à l’intérieur de notre vie.

Le texte de Saint Paul est tout à fait étonnant, nous incitant à rentrer dans ce dialogue de Jésus avec son Père, dans l’Esprit-Saint :

« Notre orgueil, c’est d’espérer avoir part à la gloire de Dieu. »

Et il insiste :

« Nous avons été établis par notre baptême, nous avons reçu l’accès au monde de la grâce. »

Et c’est cette paix que le Seigneur nous donne, cette paix dans laquelle nous avons à rentrer chaque fois que nous prions, nous avons à nous mettre à l’école de cette paix.

Ce qui nous empêche de vivre pleinement ce mystère

Un grand argument pour ne pas écouter Jésus, pour ne pas contempler le visage du Père, c’est souvent celui de notre détresse, du mal qui est dans le monde. Et ici Paul, d’une manière tout à fait intéressante, exceptionnelle, mais que quelquefois nous écoutons en passant, assez vite : notre orgueil, c’est bien d’espérer avoir part à la Gloire de Dieu. Mais ce n’est pas tout : la détresse elle-même fait notre orgueil.

Et nous voyons ici briller le mystère de la Croix que nous nous sommes préparés à célébrer pendant tout le Carême et que nous avons célébré dans les fêtes de Pâques. C’est que nous n’avons pas à rêver sur Dieu, en imaginant que c’est tout dans la Paix, dans la Gloire et dans la beauté, et il n’y a pas de place pour le mal.

Le Seigneur vient à nous, et là où nous sommes, Il vient nous communiquer Son Esprit-Saint. C’est tout à fait étonnant de voir que, dans le Nouveau Testament, dans l’histoire de l’Église, la force des Chrétiens, la force de cet amour de Jésus ne s’est pas développé simplement dans les périodes de prospérité, mais toujours dans la contradiction. Parce que, c’est la réalité de notre vie : nous sommes blessés. L’Humanité est blessée. Elle veut marcher sur d’autres voies que celles de l’Amour, avec ses ambitions, ses soifs de pouvoir, de jouissance pour soi, d’attitrer les choses à soi, de dominer, de dévorer les autres. Mais, dans cette détresse, le Seigneur nous accompagne, et Il nous donne tout ce qu’Il est, comme Il a donné à Jésus, tout au long de Sa vie, tout ce qu’Il est.

Laissons-nous remplir de l’Esprit-Saint

Souvenons-nous des paroles de Jésus juste, avant la Résurrection de Lazare :

« Père, je sais que tu m’as toujours exhaussé.
Tout ce qui T’appartient est à moi. »

Et Il nous donne cette vie. Et Il nous donne Sa grâce, parce que cet amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit-Saint. Et, au cours de notre vie, au cours de nos journées, nous avons à vraiment nous laisser remplir, à laisser cette eau vivifiante de l’Esprit-Saint nous purifier, nous vivifier, nous conduire, nous faire connaître le Seigneur dans Son vrai visage qui sait être présent au sein de notre Monde et développer Son œuvre.

Encore une fois, ce mot connaître ne signifie pas simplement apprendre avec la tête. En hébreu, le mot connaître indique toujours cette expérience de vie, de communion, puisqu’il désigne en même temps l’union conjugale. Il s’agit donc de cette expérience que nous avons à faire avec le Seigneur : nous laisser conduire, nous laisser pénétrer par Sa Grâce, vivre dans Sa Grâce. Et nous allons, au long de nos journées, accueillir le don de Dieu et vivre à ce rythme du Royaume.

C’est cet amour qui nous est confié, cet amour dans lequel nous sommes aimés et avec lequel nous sommes appelés aussi à aimer. Chaque fois que nous aimons, chaque fois que nous nous laissons aimer par le Seigneur, c’est le mystère de la Trinité qui est présent. Et ce mystère est appelé à grandir. Notre amour humain est appelé à se laisser purifier. Nous savons que c’est bien souvent un rude chemin, et justement ici, Paul insiste bien, car il y a la détresse. Mais, cela produit la persévérance, la valeur éprouvée, cela produit l’Espérance. Et là, nous ne sommes pas trompés.

Que ce jour où nous fêtons la fête de la Sainte Trinité, où nous sommes appelés à aller au cœur de notre foi, nous puissions vraiment contempler, c’est à dire demeurer dans ce mystère, l’accueillir. Demeurer dans ce lien de Jésus avec Son Père. Que ce lien puisse grandir et nous aider à affronter toutes les difficultés de la vie.

Alors, nous serons, comme le dit Saint Pierre, des foyers de lumière dans le monde perverti. Nous serons au milieu de ce monde ces foyers de lumière où chacun pourra venir s’éclairer, se réchauffer, pourra vivre pleinement de sa vocation, de la Grâce de Dieu,

Amen !


Références des lectures du jour :

  • Livre des Proverbes 8,22-31.
  • Psaume 8,4-5.6-7.8-9.
  • Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains 5,1-5.
  • Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 16,12-15 :

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
« J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter. Quand Il viendra, lui, l’Esprit de vérité, Il vous conduira dans la vérité tout entière.
En effet, ce qu’Il dira ne viendra pas de lui-même : mais ce qu’Il aura entendu, Il le dira ; et ce qui va venir, Il vous le fera connaître.
Lui me glorifiera, car il recevra ce qui vient de moi pour vous le faire connaître.

Tout ce que possède le Père est à moi ; voilà pourquoi je vous ai dit : L’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître. »