Les 7 péchés capitaux

Père Laurent-Marie et Père Pierre-Marie

Qu’est-ce qu’un péché capital ? Quelle différence avec un péché mortel ? Quels sont les péchés capitaux ?
Cette conférence nous invite à les découvrir et comprendre vraiment ce qu’ils recouvrent, afin de les discerner dans notre vie et de les combattre.


 Conférences à écouter sur ce thème : Les péchés capitaux : Sept enseignements de la Session des Familles 2014 (des Pères Laurent-Marie et Pierre-Marie)

Les 7 péchés capitaux sont :

Le péché n’est pas seulement au départ une « infraction au code de la route », c’est d’abord se tromper de route, de cible, de bonheur.
Toute cette doctrine des péchés capitaux est née dans un milieu monastique (au IV° siècle) : volonté d’être plus libre par rapport aux tendances qui habitent les hommes.

Les péchés capitaux ou comment se tromper de finalité

Les péchés capitaux sont à la tête de péchés dérivés ; si l’on évite les péchés capitaux, on évite aussi les autres ! et si l’on s’y attaque on fera régresser aussi les autres.
Ces péchés capitaux se présentent comme un but, une finalité. Il y a en eux quelque chose d’attractif. Ils agissent un peu comme une faim (par ex dans l’impureté ce qui est recherché c’est le plaisir sexuel, la personne va mentir, mettre en péril sa réputation, etc. pour combler ce désir). On fait d’un bien fini une idole qui prend la place de Dieu. Les 7 péchés capitaux sont les 7 idoles de l’âme.

St-Thomas d’Aquin expliquait que le péché capital exerce un rôle de finalité : soit un bien désirable que l’on recherche, soit un mal dont on veut s’éloigner.

Du côté des « biens » il y a 4 péchés capitaux (que l’on peut mettre en opposition avec les vœux religieux) :

  • le bien de l’âme : désir d’être soi-même sa propre excellence, bonheur, pouvoir : c’est le péché d’orgueil (contraire au vœu d’obéissance)
  • le bien du corps : concerne non seulement la sexualité, mais aussi la nourriture : ce sont les péchés de luxure et de gourmandise (contraires au vœu de chasteté)
  • les biens extérieurs  : c’est le péché d’avarice (contraire au vœu de pauvreté)

Dans la consécration à la Vierge-Marie, Saint Louis-Marie Grignon de Montfort nous explique que :

« Tout notre être est fait pour Dieu ».

Le péché c’est manquer son but. On se met au centre du monde. Les biens matériels prennent la place de Dieu, au moins pour ces 4 péchés capitaux.

Pour les 3 autres péchés, on fuit ce que l’on considère comme un mal :

  • l’acédie (ou paresse) : aller vers Dieu c’est exigeant. Dans l’acédie on craint la difficulté sensible, du coup on baisse les bras, on choisit la facilité. Crainte de l’effort
  • la jalousie : je me sens menacé par le bien du prochain, alors je dénigre.
  • la colère : réaction vive. On réagit contre quelque chose que l’on considère injuste, mais de façon disproportionnée.

D’après les pères de l’Église, les péchés capitaux sont des maladies de l’âme.

Tout homme est habité par une soif d’infini.

Notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi (Dieu)" disait st-Augustin


Or ici nous sommes dans le « fini ». Le péché capital est comme un Dieu de substitution. (Ex : dans la démarche des alcooliques anonymes, à la 2° étape on cherche à reconnaître un absolu qui prendra la place de l’alcool).
Certains préfèrent parler de « vice capital » plutôt que de péché capital.

Attention, il faut faire la différence entre :

  • ce qui est d’ordre psychologique : ce sont des mécanismes de défense, pas des péchés, notre responsabilité n’est pas engagée ;
  • ce qui d’ordre éthique : là, notre responsabilité libre est engagée. Les péchés capitaux sont du côté éthique. Mais la ligne de « démarcation » n’est pas toujours facile à faire.
    Par exemple la paresse (l’acédie) : on peut avoir des tendances mais aussi une part de responsabilité. Il faut donc savoir distinguer le péché actuel (acte précis que l’on pose) et le péché habituel (disposition à l’acte, vice).

Le péché capital est plutôt dans le domaine des vices, des habitudes. Si on l’entretien, cela devient presque involontaire. Il y a un manque de liberté, on devient prisonnier (par ex : l’impureté peut devenir un pli et devient presque involontaire).
Selon notre caractère, notre personnalité, nous sommes plus ou moins disposés à tel ou tel péché capital. Cela n’enlève pas notre liberté, mais suppose d’être vigilant dans tel ou tel domaine.

Ces péchés capitaux s’enracinent sur notre tempérament (il y a des terrains plus ou moins favorables) ou sur des blessures rencontrées dans l’enfance. Mais comme il y a une part de volonté, on peut s’en sortir.

Et pourquoi 7 péchés capitaux ? Dans la tradition il y en a pratiquement toujours eu 7 (parfois 8 quand on distinguait la vanité de l’orgueil : contrairement à la vanité, dans l’orgueil on n’attend rien des autres). L’orgueil est le péché capital par excellence.

L’orgueil

L’orgueil a différentes facettes : c’est l’amour propre , la suffisance, la vanité, la gloriole, le mépris, l’arrogance, le dédain. C’est l’amour désordonné, démesuré de soi-même.
L’orgueilleux place sa sa personnalité au centre du monde et même au centre de lui-même. Il se croit supérieur aux autres. Dans la parole de Dieu : Dieu disperse les superbes… Dieu s’oppose aux orgueilleux, mais aux humbles il accorde sa grâce Dieu élève les humbles. « Bienheureux les pauvres de cœur… »
L’amour de soi n’est pas mauvais en soi, au contraire, il faut avoir une estime de soi, il ne faut pas se déprécier !

Critères pour discerner la présence du péché :

  • L’orgueilleux vit pour lui (il a évacué Dieu), il agit pour lui (pas pour la gloire de Dieu), il vit par lui, il a du mal à recevoir des autres et de Dieu, il n’a pas tellement besoin des autres. (La sainteté c’est entrer dans une bonne relation avec Dieu et avec les autres)
  • L’indépendance.
    Le curé d’Ars disait que lorsque l’on est orgueilleux on maîtrise son existence, c’est la suffisance.
    Pascal Ide dit que le salut de l’orgueilleux c’est l’humour (-Hu- de humilité et –Mour- de amour)
  • Quelques signes complémentaires : avoir toujours raison, être incapable de demander de l’aide, ne pas supporter et reconnaître la critique, accuser les autres, faire sentir que l’on côtoie du « beau monde », se mettre en avant, se valoriser…

Les remèdes :

  1. Prendre conscience de la gravité de l’orgueil : Dieu a une aversion particulière pour l’orgueil. Attention, on peut vouloir prendre la place de Dieu.
  2. Désirer l’humilité. (Attention, ce n’est pas tomber dans la pusillanimité ; ne pas se rabougrir !) On peut faire de grandes choses dans l’humilité. On accepte des humiliations sans râler, on reconnaît que l’on s’est trompé. Dans notre confession, on peut donner des faits précis…
  3. Apprendre à se tourner davantage vers Dieu
  4. Cultiver la discrétion
  5. Apprendre à accepter ses émotions. Accepter de pleurer par exemple.
  6. Apprendre à reconnaître ses dettes : on vit aussi par les autres. Sans les autres et sans Dieu on ne serait rien.
  7. L’humour. Savoir rire de soi. Ne pas se prendre trop au sérieux.

« L’orgueil c’est comme le sel, on en met partout ! » disait le Curé d’Ars

C’est notre orgueil qui nous empêche de devenir des saints.

L’avarice

L’orgueil est un amour désordonné de soi, l’avarice en est le mauvais usage.

Il y a 3 aspects dans ce péché :

  • l’attachement du cœur
  • le désir d’acquérir sans cesse de nouveaux biens (cupidité)
  • l’opiniâtreté dans la possession

Les « enfants » de l’avarice : l’insensibilité du cœur, l’inquiétude dans la possession, la violence dans l’appropriation, le vol / trahison.
La question de l’argent touche à notre sécurité. L’avarice c’est mettre notre sécurité là où il ne faut pas (dans l’argent et pas tellement en Dieu).
Pascal Ide nous conseille de regarder si cela occupe beaucoup notre esprit ou nos paroles.
Jean Pliya propose un test pratique pour vérifier si l’argent ne domine pas nos pensées : passe–t-on beaucoup de temps à comparer les prix , comment est-ce que je réagis quand je me fais « voler » par un commerçant , ou quand je repère un article acheté récemment moins cher ailleurs ?
L’argent deviendrait-il une finalité alors que c’est un moyen. Moyen au service de la relation, pas un but en soi. Ce qui est répréhensible c’est de mal en user, pas d’en avoir.

Les remèdes :

  1. Se rappeler l’origine et la finalité des biens que nous avons. « L’avare est comme le pourceau qui mange des glands sans lever la tête pour voir d’où ils viennent » disait le curé d’Ars.
    Et dans la doctrine sociale de l’Église la propriété privée n’est jamais un absolu.
  2. Pratiquer les vertus contraires : donner particulièrement aux démunis, sans retour, sans retard, gratuitement.
  3. Grandir dans la foi en la Providence : où met-on notre sécurité ? En Dieu ou dans des biens matériels ? Ce n’est pas de l’imprévoyance : il est normal, par exemple, d’économiser (pour les études des enfants…) mais cela n’empêche pas de se remettre entre les mains de Dieu.

L’envie, la jalousie

L’envie concerne les choses, la jalousie les personnes.
La jalousie c’est prendre conscience qu’il me manque quelque chose.
On ne s’en vante pas.
On peut être jaloux quand on ne s’estime pas assez.
C’est très proche d’un sentiment.

Les « enfants » de la jalousie : Malveillance, dénigrement, satisfaction devant la difficulté de l’autre, déception devant la réussite de l’autre, haine.
Dans la Bible on trouve beaucoup d’exemples : Caïn, Saül, Hérode tuent par jalousie.
On trouve aussi des exemples de personnes qui ne se laissent pas entraîner dans ce sentiment de jalousie : Moïse, les disciples de Jean-Baptiste.

Les symptômes de la jalousie : Quand quelqu’un est heureux, on n’arrive pas à s’en réjouir.
Le jaloux est captatif, exclusif dans sa relation
Il a besoin d’être préféré.
Il est plus dans la critique que dans la louange vis-à-vis des autres.

Les remèdes :

  1. Reconnaître sa jalousie
  2. Éviter les comparaisons
  3. Reconnaître ses propres qualités, les mettre en œuvre
  4. Accepter de ne pas être parfait
  5. S’efforcer d’être plus dans le registre de la louange que dans celui de la plainte, de la critique
  6. Se faire aider pour sortir de certaines ornières

La colère

Est-elle bonne ou pas ? Cela dépend !
Si elle se situe au niveau du sentiment, alors ce n’est ni bon ni mauvais, ce peut même être sain dans certaines situations. St-Jean-Chrisostome disait « Celui qui ne se met pas en colère quand il y a une cause pour le faire commet un péché » !
Il y a 3 conditions pour qu’une colère soit juste : l’objet doit être juste, l’intention doit être droite, la réaction doit être mesurée, proportionnée. Alors, la colère n’est pas une vengeance.

Les raisons de la colère : le fait de se sentir agressé, la déception, la résistance (quand l’aspirateur nous résiste ! ), l’altérité (le fait d’être autre). La première source de colère : l’autre résiste à notre volonté, y compris Dieu.

Les « enfants » de la colère :

  • Le jugement intérieur (3/4 de nos paroles intérieures sont des jugements
  • La médisance,
  • Les péchés en acte (le rouleau à pâtisserie !)

Les colères contre soi tendent à l’orgueil et n’ont d’origine que les blessures du passé" St-François de Sales

Les remèdes :

  1. Prendre du recul « Éloignez-vous de l’objet qui excite votre colère » disait le Curé d’Ars
  2. Ne pas fuir
  3. Se mettre à la place de l’autre
  4. Exercer sa patience
  5. Apprendre à renoncer au perfectionnisme
  6. Renoncer aux excitants (café), au bruit (musique forte)
  7. L’humilité
  8. Un accompagnement : regarder les blessures du passé
  9. Le pardon : c’est le premier des remèdes ! « Que le soleil ne se couche pas sur votre colère… montrez-vous au contraire compatissants pour les autres… » Ephésiens 4, 26-32

L’impureté, la luxure

Comme en ce qui concerne la gourmandise, il y a un dérèglement, un désordre. La sexualité se détourne de son but (le don) pour devenir possession.
Le plaisir est désordonné quand il est recherché pour lui-même. C’est un fruit, non une fin.
L’impureté réduit l’autre à son corps.
Pascal Ide fait remarquer que dans les films porno on évite les visages : le lieu où l’on rencontre vraiment la personne.
La luxure peut prendre plusieurs formes : tromperie, masturbation, ou au niveau de l’esprit dans l’imagination.

Les remèdes :

  1. La chasteté : maîtrise de sa sexualité. L’alternative est claire : ou l’on commande à ses passions et on est en paix, où l’on se laisse asservir et on est malheureux.
  2. Vouloir combattre , ne pas se laisser démobiliser par les discours d’aujourd’hui. Poser des actes. Avoir clairement à l’esprit ce que je veux vivre dans ma sexualité.
  3. La garde du regard : éviter certaines revues, films… « Il y a les yeux , mais il y a aussi les paupières ! » (pour fermer les yeux)
  4. La garde de la langue : parler avec des termes qui inspirent le respect
  5. La garde de l’imagination : ne pas cultiver certaines pensées
  6. La garde du corps : savoir se maîtriser.
  7. L’humilité : « C’est la chaîne qui relie toutes les vertus » disait le Saint Curé d’Ars. Ne pas se croire invincible.
  8. Renoncer dans certaines situations. Fuir pour ne pas succomber.
  9. Garder l’espérance : parce que la sexualité est beaucoup plus maîtrisable qu’on ne le croit.
  10. S’il y a des chutes, savoir s’en confesser.

Le pire ce n’est pas de déraper, mais de rester dans le fossé" Daniel Ange

La gourmandise

Il n’est pas interdit d’apprécier les bonnes choses ! C’est lorsque c’est désordonné que cela devient mauvais.
Aspect quantitatif : manger beaucoup.
Aspect qualitatif : chipoter sur la façon dont le plat est trop ou pas assez cuit…
Aspect convivial : les autres prendront dans le plat ce qui restera après moi…

Quelle place la nourriture occupe–t-elle dans mon esprit ?

Les « enfants » de la gourmandise :

  • L’excès à table, (qui souvent finit par l’excès au lit !)
    On perd sa liberté, elle rend « lourd » dans tous les sens. Il faut prouver que nous sommes libres (maîtrise de soi)

Les remèdes :

  1. Prendre du recul, revisiter ses motivations (mon corps en a-t-il besoin ou est-ce uniquement une envie ?)
    Se replacer devant Dieu (bénédicité et grâces)
  2. Apprendre à écouter son corps tout entier, ce qui nous fait du bien.
    Ne pas se laisser guider uniquement par le plaisir.
  3. Regarder la place que cela occupe dans nos paroles. « On prolonge le plaisir par le souvenir » Pascal Ide.
  4. Le renoncement (jeûne) en vue d’une certaine liberté. Ce peut être des petites choses à faire régulièrement. Utile pour arriver à une certaine liberté.
  5. La façon d’être à table : je fais attention à mon voisin.

L’acédie (ou paresse)

Paresse dans la relation à Dieu, démon de midi, fatigue de l’âme, anorexie spirituelle, dégoût des choses de Dieu, envie d’aller voir ailleurs : tristesse de l’âme qui démobilise.

Les symptômes :
L’instabilité, la recherche de la nouveauté, l’envie de changer…
Le manque de persévérance, l’impatience : vouloir tout, tout de suite et toujours plus vite…
La mollesse spirituelle : par exemple remettre la prière à plus tard, quand on aura le temps : « De toute façon je suis déjà en présence de Dieu, je pris dans ma voiture, c’est plus utile de se dépenser dans de bonnes œuvres… »
Activisme

  • La dispersion : on fait des tas de choses en oubliant le nécessaire.
  • Compensations : il y a un vide intérieur dans l’acédie, on essaie de le remplir (TV, nourriture, voyages…)

Les remèdes :

  1. Redécouvrir la prière
  2. Ne pas attendre de retrouver le goût de l’oraison pour commencer à prier
  3. Vivre l’instant présent. Ne pas changer de cap. Persévérer dans la ligne fixée. Or on pourrait penser qu’un changement extérieur provoquerait un changement intérieur, mais le changement ne résout pas tout.
  4. Arrêter de laisser les évènements décider à notre place : faux recours à la Providence. La providence n’exclut pas qu’on ait des décisions ou des initiatives à prendre.
  5. Ne pas fuir dans le sommeil
  6. Combattre l’oisiveté (mère de tous les vices). D’où l’importance du travail manuel chez les moines par exemple.

« Si ce démon n’est suivi immédiatement d’aucun autre, la paix vient habiter l’âme. »


 Cliquez pour écouter les enseignements audio donnés par les frères sjm à propos des sept péchés capitaux

Bibliographie :

  • « Donner comme un enfant de roi » par Jean PLIYA (Editions F.X. de Guibert)
  • « Les sept péchés capitaux ou ce mal qui nous tient tête » de Pascal Ide et Luc Adrian (Edifa)