Homélie du 6e dimanche du Temps Ordinaire

14 février 2012

— « Si tu le veux, tu peux me purifier. »
Pris de pitié devant cet homme, Jésus étendit la main, le toucha et lui dit :
— « Je le veux, sois purifié. »
À l’instant même, sa lèpre le quitta et il fut purifié.

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Texte de l’homélie :

Frère et sœurs,

Je me permets aujourd’hui de ne pas méditer la Parole de Dieu sur l’histoire de ce lépreux qui, par ailleurs, est une très belle histoire, très riche de spiritualité, mais je m’attarderai avec vous à méditer la deuxième lecture de Saint-Paul. Etonante parole de Saint Paul, que vous avez entendue : « Prenez-moi pour modèle » Je pense que personne d’entre nous oserait se l’approprier. Et pourtant, Saint Paul ne s’y est vraiment pas gêné !

« Prenez-moi pour modèle… »

Je vous propose donc que nous réfléchissions ensemble, frères et sœurs, sur ce que c’est qu’un modèle chrétien . Médiatiquement parlant, nous n’avons pas peut-être pas bonne presse, d’autres modèles sont bien plus admiré que nous ! Peu importe ! frères et sœurs, nous qui sommes chrétiens, nous avons au moins cette certitude dans notre cœur que nous sommes bien plus écoutés, regardés que nous pouvons imaginer. Je déclinerai alors cette parole en cinq variations, cinq thèmes, cinq manières d’être un modèle selon Saint Paul, même s’il y a beaucoup plus de choses à dire :

Un modèle chrétien est un modèle positif !

Je prends ce mot pour que ce soit bien clair. Trop souvent, nous les chrétiens, comme pas mal de gens dans ce Monde, il suffit d’écouter les médias, nous apparaissons plutôt comme des gens négatifs, à entretenir ce qui ne va pas, prônant peut-être davantage des interdits au détriment d’un regard de confiance, surtout à l’égard de ce monde d’aujourd’hui.
Écoutons Saint Paul :

« Frères, tout ce que vous faites, manger, boire, n’importe quoi d’autre, faites-le toujours pour la gloire de Dieu. »

Frères et sœurs, être chrétien à la manière du Christ c’est exercer cette manière d’être positive, positif, en toute chose, des hommes et des femmes d’Espérance, au sens chrétien.

C’est vrai que nous sommes là aussi pour dénoncer les mensonges. Nous sommes là aussi pour dire l’importance du bien au détriment du mal. Mais, savons nous le faire toujours, frères et sœurs, sans trop dramatiser, sans trop « brasser du noir », ou trop baisser les bras, comme si tout allait mal aujourd’hui plus qu’avant.

Je ne suis pas naïf, frères et sœurs, mais je pense qu’il faut garder cette folle certitude que Saint-Paul avait, parce que, de son temps, ce n’était pas mieux ! Tout est possible à Dieu, et pour celui qui croit vraiment en Jésus-Christ.

Un modèle chrétien est un modèle de souplesse

Le deuxième modèle chrétien que nous présente Saint Paul est celui de la souplesse. Il y aurait d’ailleurs beaucoup de choses à dire. Je m’explique : Très facilement, et cela peut se comprendre, notamment par soucis de vérité, mais souvent par peur, il arrive que nous soyons tentés d’être rigides, moralisateurs… Saint Paul nous apporte une magnifique parole, à méditer :

« Ne soyez un obstacle à personne, et en toute circonstance, cherchez à vous adapter à chacun. »

Être chrétien, c’est être souple, ouvert, à l’écoute des autres, disponibles à tous. Je dirais ce mot même : adaptable. Cela ne veut surtout pas dire qu’il s’agit d’être mou, ni tiède, ni sans caractère. Au contraire, nous avons à rester fermes dans nos certitudes de foi, d’autant plus aujourd’hui. Il ne s’agit pas d’être comme des caméléons qui changent d’idée ou de comportement selon les circonstances. Il ne faut pas « trafiquer » la vérité de l’Evangile, ni les exigences de la morale chrétienne.

Mes frères et sœurs, avons-nous la souplesse évangélique qui est nécessaire pour éviter d’imposer la vérité en bloc, sans nuance, sans intelligence, sans écoute et sans respect. C’est pourtant si vite fait…

Vous verrez, Saint Paul n’a cessé de s’exercer humblement à cette adaptation ; même si sa parole était toujours très ferme et très claire, il essayait de rejoindre les gens qui l’écoutaient pour les comprendre. Voyez, les vérités de la Foi ne s’imposent pas avec des coups de baguette magique ! C’est pour cela que l’Église parle non pas de relativisme, mais de la gradualité. C’est un terme que l’Église catholique aime beaucoup mettre en valeur : la gradualité de la morale chrétienne.

Frères et sœurs, demandons à Saint Paul d’être plus courageux et d’annoncer notre foi avec fermeté, mais aussi avec cette grâce, cette bonne souplesse, cette gradualité dont le Monde a besoin aujourd’hui. Nous purifier tant de notre rigidité que de notre tiédeur.

Un modèle chrétien est un modèle de générosité

Troisième modèle de Saint Paul : la générosité, bien précise selon Saint Paul . Bien trop souvent, il nous arrive d’être plus soucieux de notre propre salut, de celui de noter famille, de nos amis, en ignorant celui de mon voisin. Sur cette forme de générosité aussi, Saint Paul est très clair :

« Je ne cherche pas d’abord mon intérêt, mais celui de la multitude, pour qu’ils soient tous sauvés. »

Frères et sœurs, être chrétien, être catholique, c’est d’avoir un cœur universel, et éviter de s’enfermer dans des sortes de bulles de ses préférences. Là aussi, nous avons tous à grandir, à élargir notre cœur à une dimension plus universelle, particulièrement aujourd’hui, dans ce monde qui bouge tellement.

Un modèle chrétien est un modèle décomplexé

Quatrième variation : un modèle décomplexé. Je m’explique : En France, vous l’avez remarqué, nous sommes très marqués par la laïcité. Ce qui fait que la Foi reste du domaine strictement privé : on n’ose pas trop parler de notre foi en public…
Cela fait que, naturellement, nous sommes comme imprégnés par toutes sortes de fausses humilités : « je ne veux pas trop heurter les gens », « à quoi bon se mettre en avant », « laissons-les vivre », « à chacun ses convictions ».

Saint Paul et très clair et très décomplexé à ce sujet ; il dit devant tout le monde : « Prenez-moi comme exemple ». En toute simplicité. Il la vit sa foi ouvertement, et ce n’était pas plus facile qu’aujourd’hui. Il ne la cachait pas, il la rendait simplement visible, sans prosélytisme, mais avec goût et passion.

Cette année, dans un cycle de trois années, nous sommes introduits par l’Archevêque de Strasbourg, et de tout le diocèse, à méditer sur l’évangélisation, vaste question que nous pouvons nous poser : « Quelle part vais-je prendre dans ma cité pour montre à d’autres ma fierté d’être chrétien.

Un modèle chrétien est un modèle de liberté

Enfin, cinquième modèle de Saint Paul, un autre sujet très vaste, c’est celui de la liberté. Non pas celle subjective, toute autosuffisante que le Monde aime prôner, centrée sur l’assouvissement de ses envies, mais, saisissez un autre sens, frères et sœurs : choisir la meilleure part.
Que ce soit vrai ou pas, le Monde nous voit toujours comme des gens trop soumis, dans le mauvais sens du terme, imprégnés de fausses traditions, proches d’un Dieu très exigent. On se donne alors l’impression que l’on n’est pas libres face au vrai et au faux… vaste sujet là aussi. Mais, écoutons Saint Paul qui va nous donner cette porte :

« Mon modèle à moi, c’est le Christ. »

C’est le Christ, son grand bonheur, qui l’a totalement libéré. Notre liberté consiste à dire « Oui » à une personne concrète, vivant au cœur de ma vie, la personne du Christ. D’où cette parole que l’on retrouve ailleurs dans les évangiles :

« Passant au milieu d’eux, Jésus allait son chemin. »

Remarquez que Jésus se moquait du « qu’en dira t-on ». Il est resté parfaitement libre, que ce soit face à ses ennemis qui voulaient le tuer, que ce soit face à ses « faux » amis qui voulaient en faire un roi… Il passait son chemin…

Nous aussi, nous avons à vivre notre chemin avec Lui, nous laissant éclairer par sa Parole, et à ne pas avoir peur de ce que l’on dira de nous.

Je termine avec ces deux illustrations cinématographique, de très beaux films qui n’ont d’ailleurs pas été faits par des Chrétiens :

  • Des hommes et des Dieux, ces moines de Tibhérine, ces modèles de religieux décomplexés, libres, et généreux.
  • Qui veut être aimé ?, un autre film d’un autre genre, où l’on voit l’étonnante conversion d’un père de famille, d’un homme d’aujourd’hui.

Demandons alors aujourd’hui à la Vierge Marie, cela nous prépare un peu au temps de Carême, à voir comment je peux être un modèle positif : plus souple, plus généreux, plus ferme, plus décomplexé et plus libre,

Amen.


Références des lectures du jour :

  • Livre du Lévitique 13,1-2.44-46.
  • Psaume 32(31),1-2.5.11.
  • Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 10,31-33.11,1.
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 1,40-45 :

Un lépreux vient trouver Jésus ; il tombe à ses genoux et le supplie :
— « Si tu le veux, tu peux me purifier. »
Pris de pitié devant cet homme, Jésus étendit la main, le toucha et lui dit :
— « Je le veux, sois purifié. »
À l’instant même, sa lèpre le quitta et il fut purifié.

Aussitôt Jésus le renvoya avec cet avertissement sévère :
— « Attention, ne dis rien à personne, mais va te montrer au prêtre. Et donne pour ta purification ce que Moïse prescrit dans la Loi : ta guérison sera pour les gens un témoignage. »

Une fois parti, cet homme se mit à proclamer et à répandre la nouvelle, de sorte qu’il n’était plus possible à Jésus d’entrer ouvertement dans une ville. Il était obligé d’éviter les lieux habités, mais de partout on venait à lui.