La prière chrétienne - La vie de prière

"La prière est un combat. Contre qui ? Contre nous-mêmes et contre les ruses du Tentateur qui fait tout pour détourner l’homme de la prière, de l’union à son Dieu. (…)
Le « combat spirituel » de la vie nouvelle du chrétien est inséparable du combat de la prière." Catéchisme de l’Église Catholique (CEC)



 Pour compléter : La Prière chrétienne, partie 1 : Le Notre Père

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Père Éric

(Durée : 53 minutes)
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Le combat de la prière

Trois conceptions erronées de la prière :

  • Les premiers estiment que l’essentiel, pendant l’oraison, est d’être attentif à Dieu… d’une attention sans défaillance. Or ils n’arrivent qu’à de brefs instants d’attention. Le reste du temps ils sont emportés par toutes sortes de pensées, de sentiments, de rêveries, d’impressions, ce qu’ils appellent des « distractions » parce que cela les distrait de leur attention à Dieu. Ils ne tardent pas à se décourager. Or la valeur de l’oraison ne se mesure pas à la stabilité de l’attention de l’esprit. L’oraison peut être bonne sans cette stabilité. Là n’est pas l’essentiel. - Ce qui ne veut pas dire, bien sûr, qu’il soit inutile de recourir aux méthodes et aux moyens favorisant une meilleure attention.
  • Les seconds s’imaginent que cet essentiel consiste à rechercher et à cultiver de belles et profondes pensées sur Dieu. Tout heureux quand ils y parviennent, ils se découragent lorsque leur esprit est comme engourdi, stérile. Mais l’essentiel n’est pas là non plus. - Il ne faut pas pour autant s’abstenir à l’heure de l’oraison de penser à Dieu, de chercher à le mieux connaître, d’approfondir son mystère.
  • Les troisièmes se désespèrent quand ils n’éprouvent pas en eux d’impressions exaltantes ou tonifiantes : par exemple le sentiment d’une certaine présence de Dieu accompagnée de joie et de paix, ou bien encore une ferveur d’amour, un enthousiasme. Sans doute ont-ils connu un jour ou l’autre de telles impressions et depuis lors ils viennent à l’oraison avides de les retrouver. Ils s’égarent. En ce domaine de la prière, c’est l’homme désintéressé, celui qui vient à Dieu pour Dieu et non pour soi, qui trouve tout. Ferveur et abondance de sentiments ne sont pas l’essentiel de l’oraison mais un accompagnement accordé par Dieu quand il le juge bon. L’essentiel est dans le « Je veux » L’essentiel de l’oraison ne réside ni dans la stabilité de l’attention, ni dans le « je sens », ni dans le « je pense », mais dans le « je veux », l’adhésion de ma volonté à la volonté de Dieu. Ce qui revient à dire que l’oraison n’est pas affaire d’attention, ni de sensibilité, ni d’activité intellectuelle. Elle consiste en cette orientation que j’imprime volontairement à mon « cœur profond ». Il importe avant tout, au commencement de l’oraison, que soit réglé le « pilote automatique », c’est-à-dire le « je veux » par un acte de volonté lucide et vigoureux. Je dirai par exemple : « Seigneur, je veux de cette oraison ce que tu en veux », « Seigneur, je me mets à ta disposition »… Il s’agit d’établir ce que j’appelle la relation « Je-Tu » avec le Christ, avec Dieu. Sinon il risque de se passer avec Dieu ce qui souvent se produit avec un interlocuteur : tandis que nous lui parlons notre esprit est habité par tout autre chose. Nous ne lui sommes pas vraiment « présents ». Tant que je ne me rétracte pas, ma prière persiste portée par l’intention du départ. Aussi n’ai-je jamais le droit de penser : « Mon oraison a été mauvaise », du moment qu’au début j’ai réglé le « pilote automatique » et qu’en cours de route, de temps en temps, j’ai réaffirmé le « je veux » du début. A l’oraison, Dieu fait moins attention à mes défaillances, à mes faiblesses, qu’à mon « je-veux être-tout-à-toi » profond. Et qui subsiste tant que je ne le rétracte pas explicitement. Une bonne oraison n’est pas celle qui me donne satisfaction à moi-même. Il en est de l’oraison comme des sacrements : sa valeur et son efficacité sont d’ordre surnaturel et donc échappent à nos mesures d’hommes.

Vouloir prier, c’est prier. Cette formule irrite ceux qui ont la superstition de la spontanéité. Il n’y a pas besoin d’être doué pour prier. Ce n’est pas une question de technique mais d’amour. Cependant, il n’est pas dispensé de demander des conseils pour surmonter les difficultés de la prière. C’est comme la vie conjugale : ce n’est pas d’abord une question de technique mais d’amour. Cependant, on peut se trouver devant des difficultés pour lesquelles l’aide d’une tierce personne nous est précieuse. On peut avoir beaucoup de bonne volonté mais mal s’y prendre. L’amour seul unit à Dieu : L’oraison mentale est un entretien de l’âme avec Dieu. C’est ainsi que les spirituels l’ont toujours comprise.

L’oraison mentale est un commerce d’amitié où l’on s’entretient seul à seul avec ce Dieu dont on se sait aimé."
sainte Thérèse d’Avila

Les “échecs” de la prière : difficultés ou tentations dans la prière

Les distractions

La difficulté habituelle de notre prière est la distraction. Elle peut porter sur les mots et leur sens, dans la prière vocale ; elle peut porter, plus profondément, sur Celui que nous prions, dans la prière vocale (liturgique ou personnelle), dans la méditation et dans l’oraison. Partir à la chasse des distractions serait tomber dans leurs pièges, alors qu’il suffit de revenir à notre coeur : une distraction nous révèle ce à quoi nous sommes attachés et cette prise de conscience humble devant le Seigneur doit réveiller notre amour de préférence pour lui, en lui offrant résolument notre coeur pour qu’il le purifie. Là se situe le combat, le choix du Maître à servir (cf. Matthieu 6,21 ; Matthieu 6,24 ). (CEC n° 2729)

Quelques règles classiques :

  • Un vieil auteur (un peu misogyne) enseignait :

    Les distractions à l’oraison sont comme les femmes, n’y faites pas attention et bien vite elles vous laisseront tranquille !"

  • Se désoler d’avoir été distrait : une autre manière d’être distrait.
  • Inscrire sur l’agenda la pensée qui vient, suffit parfois pour s’en délivrer.
  • Choisir l’heure la moins favorable aux distractions.
  • Ecrire sa prière peut aider l’esprit à se fixer quand il est trop agité.
  • Faire de ses sujets de distraction des sujets d’oraison.

La sécheresse

Une autre difficulté, spécialement pour ceux qui veulent sincèrement prier, est la sécheresse. Elle fait partie de l’oraison où le coeur est sevré, sans goût pour les pensées, souvenirs et sentiments, même spirituels. C’est le moment de la foi pure qui se tient fidèlement avec Jésus dans l’agonie et au tombeau. « Le grain de blé, s’il meurt, porte beaucoup de fruit » ( Jean 12,24 ). Si la sécheresse est due au manque de racines, parce que la Parole est tombée sur du roc, le combat relève de la conversion (cf. Luc 8,6 ; Luc 8,13 ). (CEC n° 2731)

Le manque de foi

La tentation la plus courante, la plus cachée, est notre manque de foi. Elle s’exprime moins par une incrédulité déclarée que par une préférence de fait. Quand nous commençons à prier, mille travaux ou soucis, estimés urgents, se présentent comme prioritaires ; de nouveau, c’est le moment de la vérité du coeur et de son amour de préférence. Tantôt nous nous tournons vers le Seigneur comme le dernier recours : mais y croit-on vraiment ? Tantôt nous prenons le Seigneur comme allié, mais le coeur est encore dans la présomption. Dans tous les cas, notre manque de foi révèle que nous ne sommes pas encore dans la disposition du coeur humble : « Hors de moi, vous ne pouvez rien faire » ( Jean 15,5 ). (CEC n° 2732) Prier est une nécessité vitale : La preuve par le contraire n’est pas moins convaincante : si nous ne nous laissons pas mener par l’Esprit, nous retombons sous l’esclavage du péché (cf. Galates 5,16-25 ). Rien ne vaut la prière ; elle rend possible ce qui est impossible, facile ce qui est difficile. Il est impossible que l’homme qui prie puisse pécher (S. Chrysostome, Anna 4,5), (CEC n° 2744) « Qui prie, se sauve certainement ; qui ne prie pas se damne certainement » (S. Alphonse de Liguori, mez.). (CEC n° 2744) « Abandonner l’oraison, c’est se précipiter en enfer sans le secours du démon » (Thérèse d’Avila).

Si vous ne priez pas, vous perdrez la foi en six mois"

Marthe Robin.

La prière et le temps par sœur Jeanne d’Arc

"Pas le temps de prier ? Supposez que le bon Dieu donne un petit coup de pouce aux mécanismes célestes et nous accorde des journées de vingt-cinq heures pour nous donner le temps de le prier ; auriez-vous alors chaque jour une heure à lui consacrer ? Je vous vois hésiter. Loyalement vous hochez la tête : non, la surcharge des occupations absorberait aussitôt cette heure de surcroît… Et si le coup de pouce était en sens inverse, réduisant la journée à vingt-trois heures, ne pensez-vous pas qu’on s’arrangerait bien pour vivre quand même ? Nos occupations suivent la loi d’expansion des gaz, qui remplissent immédiatement tout l’espace qu’on leur offre. Elles déborderaient sur tout le temps supplémentaire qui pourrait nous être octroyé, comme elles débordent déjà peut-être sur ce jour supplémentaire, ce septième jour vacant qui nous est donné afin de le consacrer au loisir pour Dieu selon la grande leçon de la première page de la Genèse. Si nous attendons d’avoir le temps de prier, nous ne l’aurons jamais. Il faut le prendre ! - un peu comme si nous attendions pour faire l’aumône d’avoir du superflu, de l’argent absolument vacant et disponible seulement pour cela… Il est évident qu’il y a des périodes très chargées où l’on ne peut se réserver que peu de temps. Mais il faut savoir se rattraper ensuite. Dans bien des cas, outre le minimum quotidien indispensable, on peut assurer plutôt un rythme saisonnier : les dimanches, qui dans le plan de Dieu sont faits pour cela - des récollections mensuelles, des journées de retraite et de silence prises de temps en temps ; pour les étudiants et les professeurs, les vacances scolaires, etc… C’est beaucoup plus la rectification profonde de notre jugement sur la valeur irremplaçable de la prière et le devoir strict d’y consacrer tout le temps nécessaire, qui nous fera découvrir les rythmes possibles. Nous trouvons bien le temps nécessaire pour manger et pour dormir - parce que nous savons que cela nous est une réfection indispensable, sans laquelle nous ne pourrions pas tenir. Si nous jugions la prière aussi indispensable, nous en trouverions le temps."

Le fait de ne pas être exaucé

Certains cessent même de prier parce que, pensent-ils, leur demande n’est pas exaucée. Ici deux questions se posent : Pourquoi pensons-nous que notre demande n’a pas été exaucée ? Comment notre prière est-elle exaucée, « efficace » ? (CEC n° 2734) Quelle est donc l’image de Dieu qui motive notre prière : un moyen à utiliser ou le Père de notre Seigneur Jésus- Christ ? (CEC n° 2735) « Ne t’afflige pas si tu ne reçois pas immédiatement de Dieu ce que tu lui demandes ; c’est qu’il veut te faire plus de bien encore par ta persévérance à demeurer avec lui dans la prière »(Evagre, or. 34).

Il veut que notre désir s’éprouve dans la prière. Ainsi, il nous dispose à recevoir ce qu’il est prêt à nous donner"

(S. Augustin, ep. 130,8,17).

Priez sans cesse

"Priez sans cesse" (1 Thessaloniciens 5,17 ), "en tout temps et à tout propos, rendez grâces à Dieu le Père au Nom de notre Seigneur Jésus Christ" (Ephésiens 5,20 ). "Il ne nous a pas été prescrit de travailler, de veiller et de jeûner constamment, tandis que c’est pour nous une loi de prier sans cesse" (Evagre, cap. pract. 49). Cette ardeur inlassable ne peut venir que de l’amour. Contre notre pesanteur et notre paresse le combat de la prière est celui de l’amour humble, confiant et persévérant. (CEC n° 2742)

Prière et défauts

"Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres" ( Jean 15,16-17 ). (CEC n° 2745)

"Serions-nous étonnés, voire scandalisés que des défauts subsistent encore après la longue purification ? Ce serait nous méprendre sur l’œuvre de la grâce : elle ne dénature pas la personnalité humaine, mais elle apporte au croyant l’aide nécessaire pour que les traits et les défauts de son caractère ne dégénèrent pas en péchés." (Père Cafarel)

Prière et “lectio divina”

La Lectio divina (lecture de la parole de Dieu) est un complément nécessaire de la prière d’oraison.

Le Père Caffarel insistait beaucoup sur ce point. Sinon, on tourne vite en rond dans notre vie de prière. En fait, l’oraison est comme le sommet de la lectio divina.

Prier c’est d’abord écouter Dieu et non Lui parler"

(Enzo Bianchi) On peut définir la lectio divina comme la lecture priante de la Parole de Dieu. La Bible est comme le "tabernacle de la Parole de Dieu". La Parole de Dieu consignée dans les Ecritures ne devient vivante qu’à partir du moment où on la lit. Il peut difficilement y avoir un dialogue avec Dieu si notre Bible reste bien rangée sur notre étagère. “Que ta prière (oratio) et la lecture (lectio) soient assidues. Avec celle-là tu parles à Dieu, avec celle-ci il te parle” (Cyprien, Ad Donatum 15). Dans la prière tu parles à Dieu mais dans la lectio, Dieu te parle.

Lectio divina : s’ouvrir au monde de Dieu

“Dieu, personne ne l’a jamais vu.” (Jean), mais il s’est révélé à nous. Sans la lecture de la Parole de Dieu, nous restons enfermés dans un univers humain. Nous restons prisonniers de nos idées et de nos conceptions humaines. Notre foi n’est pas une construction de l’Esprit, elle est une réponse à Dieu qui se révèle.

Le concile Vatican II a rappelé l’importance de la lectio divina pour tous les chrétiens dans la constitution "Dei Verbum" (§ 25) : "Le Saint Concile exhorte de façon insistante et spéciale tous les chrétiens à apprendre, par la lecture fréquente des divines Écritures, "la science éminente de Jésus-Christ" (Pharisiens 3, 8). En effet, "l’ignorance des Écritures, c’est l’ignorance du Christ" (St Jérôme, PL 24, 17). Le but de la lectio n’est pas tant de savoir des choses sur Dieu que de le connaître Lui, personnellement. Lire l’Ecriture, c’est ouvrir la lettre de Celui qui nous aime. Césaire d’Arles compare même les Écritures à des lettres d’invitation : "Les saintes Ecritures nous ont été transmises comme des lettres venues de notre patrie. Notre patrie en effet, c’est le paradis […] notre roi, miséricordieux plus qu’on ne peut le penser, a daigné nous envoyer, par l’intermédiaire des patriarches et des prophètes, les saintes Écritures, comme des lettres d’invitation, par lesquelles il nous invitait dans notre éternelle et première patrie ." La Parole de Dieu nous fait connaître le Royaume. : "Nous désirons la cité à laquelle nous appartenons ! (…) Et comment pourra renaître en nous l’amour de notre cité, dont nous étions les oubliés au cours de l’exil ? C’est pourquoi notre Père nous a envoyé des lettres : Dieu nous a donné les Ecritures. Par ces lettres renaît en nous le désir du retour dans la patrie." (Augustin, Enarr. in Ps 64, 2) Fondamentalement, la lectio divina consiste à se mettre à l’écoute de Dieu qui s’est révélé. Le préliminaire incontournable de la lectio divina est l’écoute. "Ecoute Israël !" (Deutéronome 6, 4). C’est l’attitude du petit Samuel : "Parle Seigneur, ton serviteur écoute" (1 Samuel 3, 10).

La lectio : pour nourrir notre foi et nous donner la “mentalité” de Dieu.

Lire l’Ecriture nous permet de nourrir notre foi et notre amour de Dieu. "D’aucuns parmi vous disent : ’Je ne suis pas moine, j’ai une femme, des enfants et les affaires de mon foyer dont j’ai la charge’. Mais c’est là ce qui détruit tout : tu estimes la lecture des divines Écritures réservée aux seuls moines, alors qu’elle vous serait encore bien plus nécessaire qu’à eux. Qui vit au milieu du monde et y reçoit chaque jour des blessures a bien plus grand besoin de remèdes. Aussi y a-t-il encore un plus grand mal que de ne pas lire, c’est de croire la lecture vaine et inutile."

Déroulement de la lectio divina (en cinq étapes)

1- Implorer l’Esprit Saint

Guillaume de Saint Thierry affirmait que « les Écritures demandent à être lues et pareillement comprises dans l’Esprit qui les a dictées » (cf. DV 12). Saint Éphrem le Syrien conseille : « Avant la lecture, prie et supplie le Seigneur qu’il se révèle à toi. » Il s’agit donc de faire l’épiclèse, c’est-à-dire l’invocation au Saint-Esprit sur le texte. Sans épiclèse, la lectio divina reste un exercice humain, un effort intellectuel. « Notre Dieu, Père de la lumière, tu as envoyé dans le monde ton Fils, Parole faite chair, pour te manifester à nous, les hommes. Envoie maintenant sur moi ton Esprit Saint, afin que je puisse rencontrer Jésus Christ dans cette Parole qui vient de toi ; afin que je la connaisse plus profondément et que, en la connaissant, je l’aime plus intensément pour parvenir ainsi à la béatitude du Royaume. Amen. »

2- La lecture

Il s’agit de lire le texte attentivement, lentement, plusieurs fois. Ce peut être un passage du lectionnaire ou d’un livre de la Bible du début à la fin, en en faisant une lecture cursive. On ne doit et on ne peut feuilleter au hasard l’Écriture, et passer capricieusement d’un passage à l’autre. Ouvrir l’Écriture et la lire, selon saint Jérôme, « c’est tendre les voiles à l’Esprit Saint, sans savoir sur quel rivage nous aborderons ». Il faut lire le texte en lui-même et le contempler, puis s’arrêter aussitôt après, sans encore engager d’autres facultés que l’attention. La semence a été déposée dans la bonne terre et, soit que nous veillions soit que nous dormions, elle croît et se développe (cf. Marc 4,26-27). C’est un moment qui prend du temps. Je prends le temps de copier la parole, si je le peux, ou de l’apprendre par cœur. La lire et la relire. Me raconter ce passage avec mes propres mots. Voir ce que j’ai rajouté et omis. Pourquoi ? Rester au plus près du texte, sans y mettre du tout ma part personnelle. Le cœur dur trouve dure la Parole de Dieu, et cela peut arriver aussi aux croyants : « Cette parole est dure, qui peut l’entendre ? » (Jean 6,60). Demande alors au Seigneur un cœur large, un cœur qui écoute (leb shomea), comme Salomon le Sage l’a demandé à son Seigneur (I Rois 3,9).

3- La méditation

Ruminatio : le fait de ruminer, de mastiquer la Parole. Guillaume de Saint-Thierry s’exprime ainsi : « Pour tout Livre de l’Écriture, la lectio faite avec application (ruminatio) et la simple lecture diffèrent autant l’une de l’autre que l’amitié de l’hospitalité passagère, l’affection fraternelle d’un salut occasionnel. Il faut aussi chaque jour détacher quelque bouchée de la lecture quotidienne et la confier à l’estomac de la mémoire : un passage que l’on digère mieux et qui, rappelé à la bouche, fera l’objet d’une fréquente rumination ». Méditer, c’est chercher le goût de l’Écriture, non la science

4- … vous entrerez dans la contemplation

Il ne nous reste plus qu’à le regarder et à le contempler, telle Marie de Béthanie aux pieds du Maître (Luc 10,39). Il s’agit d’une expérience de foi. Antoine Bloom observe à ce sujet : « Après que la méditation nous a introduits dans la contemplation, il devient inutile de penser et de chercher. Réfléchir sur Dieu devient chose stupide quand on est en sa présence ! Les Pères nous mettent toujours en garde contre la tendance à confondre la rencontre de Dieu avec des pensées sur Dieu. » C’est un moment de prière simple du cœur, sans mots intellectuels. Les mots du cœur viennent tout seuls. Dans cette étape, se laisser faire, c’est Dieu qui mène, qui prend en main.

5- Réalisez la Parole, vous témoignerez du Seigneur.

Ecouter, c’est obéir. Il s’agit de mettre la Parole en pratique. L’auditeur de la Parole doit devenir réalisateur de la Parole (Matthieu 7,24 ; Jc 1,22). C’est seulement ainsi qu’il va atteindre le but qu’il s’était fixé avec la lectio divina, c’est-à-dire la proximité, le voisinage de Dieu, la communion avec lui. Si la Parole annoncée est accueillie, conservée, méditée dans le cœur à la manière de Marie (Lc 1,38 ; 2,19.51), il faut ensuite visiter, servir le prochain (cf. Lc 1,39-45). On comprend l’Ecriture en la mettant en pratique (Jacques 1, 22-23) Conclusion : Que vais-je faire maintenant ? Quelles résolutions prendre ? Comment traduire mon amour en actes concrets ? Nous ne comprenons la Parole qu’à partir du moment où nous la mettons en pratique. De même, nous ne comprendrons quelque chose à l’Eucharistie qu’à partir du moment où nous entrerons dans la “logique” de l’Eucharistie qui est de se donner pour ceux qu’on aime.